AVALEB → we have nothing to lose and a world to see.

Quelques jours étaient passés. Peut-être assez pour que les esprits s’apaisent. Et ce matin, Caleb il avait eu besoin de courir pour vider son crâne de toute cette toxicité. Mais voilà qu’en se levant, le sable dégueulait d’une crasse que l’Homme était incapable de soigner. Et ça le rendait dingue. Alors il avançait pour constater les dégâts, lui qui travaillait au plus près de des espèces maritimes. Mais au loin, une silhouette familière. Et il s’approchait, sans un mot. Et puis elle avait dû le voir de loin, il s’imaginait. Et il ne parlait pas. Pas besoin de mot. Juste, il tendit son bras, pour qu’elle puisse lui donner un sac et lui filer un coup de main. S’il y avait bien quelqu’un pour comprendre ce monde dégueulasse, c’était bien lui, qui nageait parmi les requins et dansait sous l’eau. Peut-être qu’ils allaient pouvoir se rapprocher, en douceur. Elle ne connaissait plus rien de lui et Caleb, il ne savait pas qui elle était. Alors au moins, pendant ce moment de paix, ils pourraient s’apprivoiser de nouveau.

La silhouette est vue mais pas reconnue. Un humain de plus, un de ceux qui se balade, un de ceux qui marche à travers les détrituts sans les voir passer. Alors je reste concentrée, ma mission première est de rendre le monde un peu plus beau. J'ignore, je ramasse, enchaîne, continue. La main se tend, les yeux se relèvent. Caleb. Un humain, un de ceux qui a compté, un de ceux qui sont torturés. Je lui tends le sac, d'un sourire reconnaissant. Le destin nous a fuit déjà trop souvent, alors pourquoi maintenant ? Pourquoi est-ce qu'il nous réuni aujourd'hui ? "Merci." pour l'aide apporté, pour tendre la main quand personne ne le fait, pour le regard encore doux sur moi malgré tout ce que j'ai fais. Malgré tout ce que je n'ai pas fais. Tout ce que j'ai préféré ignorer, les yeux que j'ai préféré détourner. Au fond, je me dis que le travail n'a pas été si mauvais, regarde comme tu t'en es sorti, regarde comme t'es beau, depuis que je suis partie.  

hj : omg t'a été trop rapide voyons voir où ça nous amène

C’était peut-être malsain, ou tordu. Il y avait beaucoup de rancœurs mais encore plus de regret. Alors peut-être que juste partager ce petit moment un peu léger allait les faire s’apaiser. Il récupérait alors le sac en plastique pour y jeter des déchets, qu’il trouvait ici et là, parfois des mégots, des canettes, des trucs un peu dégueulasse. « De rien. » Il s’approchait un peu d’elle, juste assez pour la faire sourire. Mais ça ne fonctionnait pas, alors il bousculait son épaule avec la sienne, juste histoire de voir si elle était toujours réceptive. Et il se penchait en avant pour ramasser une algue verte, un truc un peu crade et bien salée… et il l’envoyait sur le tee-shirt d’Ava. « Oups. » Et il soulevait ses sourcils en se fendant d’un sourire mâché, avec un chewing-gum frais dans la bouche.

C'était plus doux que des conversations interminables, c'est plus doux que des explications insoutenables. C'était plus doux que tout ce qu'on aurait pu espérer, et moi, ça m'allait. « De rien. » Il s'approche et je continue ma quête, je le laisse faire et poursuit ce pour quoi je suis venue. J'avais une mission ce matin, et je voulais la mener à bien. L'épaule est bouculé, le sourire en coin est partagé, et la lèvre pincé. Je me ramasse pour ramasser un autre bout de plastique qui fini dans le sac, avant d'être attaquée. « Oups. » Regarde l'homme, le sourire est plus large, les yeux plus gros, "Hééé !" regarde le t-shirt, puis l'homme, avant de s'abaisser, d'attraper un peu d'eau là, dans une flaque restée, et de lui lancer. "Oups." le sourire est figée sur les lèvres, rien qu'un peu de légerté.

Il joue les airs choqués, la langue qui vient attraper la goutte salée dans la commissure de sa lèvre et finalement, en ramassant une bouteille en plastique remplis d’un fond de vodka et de coca-cola, il attrape de l’eau mélangé au sable et… forme un petit tas de boue dans sa main. « Tu veux jouer à ça ? » Il savait très bien qu’il allait gagner et lui lance alors la boue qui atterrit directement sur ses jambes blanches qui se teintent d’un très beau marron. Il étouffe un rire, narquois et amusé, le regard jovial et joueur. Il continue la quête des pourritures humaines mais derrière lui se trouve une Ava vengeresse, il la connait plutôt bien. Il attend le juste retour des choses, voir où va mener cette danse endiablée de deux gamins qui jouent dans le sable.

Je me joue de lui, et j'aime ça. Ca fait du bien de se dire qu'on peut être des enfants, malgré le passé ensemble. Je le vois former un pâté avec le sable, les yeux se font plus gros, « Tu veux jouer à ça ? » secoue la tête, "T'oserai pas ?" mais il ose, sur les jambes. Les yeux sont amusés, comme le sourire. J'attrape à mon tour un peu de mélange de sable et d'eau, formant cette sorte de boue qu'on connait tous pour y avoir joué étant enfant. Là, d'un coup, je m'avance rapidement, saute sur son dos en m'accrochant à son cou, l'un des poings fermé, emprisonnant l'espèce de sable mouillé, finissant par l'étaler dans son cou. "ça manquait de caractère, j'trouve." si c'est pour se retrouver comme ça, moi, ça me va.

Le rire qui éclate quand l’homme autrefois presque amoureux se croit victorieux, mais c’est sans côté ses maigres défenses qui s’abaissent et elle saute sur son dos pour mieux le prendre à son propre jeu. Ca lui tire un cri, tant la boue est froide, c’était une matinée fraîche tant il était tôt. « Ah ouais ? » Et il se penche en avant, retient son corps pour ne pas qu’elle parte tête la première, récupère de la boue et… la met dans ses cheveux. « C’est bon pour la peau ! » Et ça s’étale aussi sur son front. Et il passe une main sous sa cuisse pour ne pas qu’elle chute, mais c’est ce contact qui le rend fébrile, un peu. Alors il tournoie sur lui-même pour les rendre un peu malade, le corps entaché de sable humide.

Le cri me fait penser victorieuse, « Ah ouais ? » - "Hé ouais !" mais je sens que non. Le corps est basculé vers l'avant, se retiens au mieux, bien que le corps se fasse retenir. La main de l'homme s'étale dans les cheveux, et je sais. Je sais que la douche n'est pas loin, pour moi. "Noooon !" La bouche s'ouvre, choquée. « C’est bon pour la peau ! » Rigole à pleine gorge alors que ça coule sur le front. La main qui passe sous la cuisse, c'est un geste qui me semble trop naturel, tant j'essaie de ne pas tomber. La main elle, par contre, arrive à atteindre le sol pour une nouvelle poignée, et lâche dans la chute, tant mes gestes sont bancals. Finie, on ne sait comment, sur l'homme, à rire. La main s'étale sur la moitié du visage de l'homme, étalant les dernières traces de boues qui s'accrochait à la paume de la main, du front jusqu'à la joue. Les traces de doigt, comme l'ombre d'un ancien contact. S'arrête de rire, commence par sourire, termine par se perdre dans ses yeux.

Il n’y avait plus de faux semblants, c’était un jeu de sourire et d’éclats de rire, émotions qu’ils n’avaient jamais concrètement connu ensemble. C’était des sentiments faciles et ils avaient le mérite d’être tellement sincère. Elle jouait de lui, s’accrochant comme un animal à son corps pour ne pas chuter mais Caleb est bien plus fort qu’elle et secoue légèrement son bassin pour les faire rouler sur le sol. Et c’était Caleb, le dos dans le sable, Ava qui le surplombe et qui étale la boue de son front jusqu’à son menton. La moitié de son visage est dégueulassé et le rire se transforme tout doucement en soupir. Il s’accroche à son regard avec manque. Il avait oublié ce que c’était de l’observer jusqu’à ce que ses yeux s’endorment, d’écouter sa respiration se saccader après un moment de joie. Et les mains marrons de vase qui se posent sur ses cuisses, y laissant la trace de ses deux pattes. Et il se fout d’être dans un sale état, le cul humide, il sent son inspiration se calmer. « Tu m’as manqué Ava… » murmure déchirant qui se crache dans un aveu trop fidèle.