Wake up to reality ▬ Noé

Ta meilleure amie récupère de plus en plus et tu sais que bientôt tout ça sera un mauvais souvenir. Du moins, tu t'en persuades. Tu portes un sac contenant le bouffe parce que franchement Apple, tu la nourris plus que de raison quand tu vas lui rendre visite. Mais t'as aussi apporter un petit truc pour Jeannine, l'infirmière. C'est vraiment devenu ta copine maintenant. Tu veux entrer dans la chambre mais elle est encore en séance. Alors tu patientes dans le hall, faisant quelques allers retours pour t'occuper l'esprit. Tes yeux observent sans vraiment regarder. T'es dans ton truc quand une infirmière vient t'embrasser. Elle est contente de te revoir, que tu n'aies rien. Tu lui réponds affable, charmeur, comme à ton habitude. On t'oublie pas Maverick, toi ta géante carcasse et ta tête étrange. Et puis tu la vois elle. Noé. Cette fille pour qui t'as joué à la loterie, y'a des années. Tu souris malgré toi. Parce que la garce, elle t'a bien planté. « Qu'est-ce que tu fous là ? Je t'avais bien dit de pas me courir après. » En vrai c'est plus toi qui était derrière elle mais peu importe, ça fait des années et c'est super étrange de la revoir ici, un peu amochée aussi faut le dire. Trop bizarre.

@T. Noé Timchenko

J'en ai raz le bol d'être dans cette chambre d'hôpital. Je préfère être de l'autre côté, avec ma blouse, plutôt que de croupir dans ce lit. Les colocataires changent, parfois de jour en jour. La fatigue me tient, h24. J'ai l'impression de passer mon temps à dormir, et j'ai mal, terriblement mal. Pourtant, je pense que ma colère est encore plus grande que le reste. Cet ennuie de ne plus pouvoir faire de sport professionnel et autre, pendant un bon moment. Je ronchonne, croisant le personnel dans le couloir qui me propose de m'aider. Hors de question. Encore un drain, qui m'arrache la poitrine, bien caché sous ma blouse informe. Je me traîne, les poumons me brûlent à chaque effort. La grimace étire mon visage quand je glisse mes mains sur les roues du fauteuil. Jambe gauche tendue, avec ce plâtre immonde. Et cette voix qui me fait lever la tête, sans râler. Le sourire revient, sous les hématomes et ma peau trop blanche dessous. « C'toi qui me court après Rick ! » Des années après, des dollars en moins sûrement, mais toujours ce même sourire. « J'ai pas eu de chance tu vois, putain d'attaque terroriste. Et toi, ça va ? Qu'est ce que tu fais ici ?» J'attrape son pantalon, tire dessus pour qu'il se penche vers moi. Cette odeur, ses souvenirs qui refont surface. Demyan était là Rick, j'pense que tu avais compris. On n'a même sûrement trop joué. J'ai perdu. Tu as gagné un bon paquet de fric. Mes lèvres claquent péniblement sur sa joue alors que je cramponne le col de son pull entre mes doigts pour le maintenir penché sur moi. La bouche se dirige vers son oreille, chuchotant, préférant garder notre secret juste pour nous. « J'espère que t'as pas bouffé trop de pognon hein ?! » Je retombe dans le fauteuil, déjà épuisée de ma fugue de la chambre.

@Maverick Tenenbaum

Tu hallucines un peu de la voir là parmi les patients de l’hôpital. Des années que tu l'as pas revu et la voilà parmi les anonymes. Tu souris malgré toi parce que votre premier échange ravive ce petit jeu entre vous. « Rêve Noé. » Tu lui as couru après c'est vrai, mais tu as eu le temps de voir d'autres choses depuis. Bien d'autres. Tu vois qu'elle est tout de même dans un sale état. Et elle te le confirme en parlant de ses blessures. « Je vois ça, tu étais où ? » Si ça se trouve, vous vous êtes déjà croisés sans le savoir et tu te demandes depuis combien de temps elle est ici. Le campus est tellement vaste. « Je viens voir ma meilleure amie. » Parce que toi en tant que patient, tu t'es enfui depuis longtemps. T'as pas vraiment attendu qu'on te donne le feu vert. Estimant que tu avais déjà passé trop de temps dans cet hôpital. Elle te parle de la loterie et ça te fait sourire parce que finalement elle est la seule à être au courant de ta richesse. T'es bizarre et tu en parles à personne. « T'inquiète. » T'avais largement de quoi voir venir. La vérité, c'est que tu peux rester toute ta vie sans travailler avec de quoi vivre. « Et toi, il va comment ton copain ? » Tu te rappelles même plus son prénom, mais t'imagine que c'est pour ça qu'elle a pas succombé à ton charme. Du moins, c'est comme ça que tu préfères l'expliquer.