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Je crois que j'ai besoin de le voir. Les sms, malgré nos engueulades récurrentes, font naître cette chaleur en moi dont seul lui en est capable. C'est agaçant, nos envies de corps à corps. Mais là, tout se mélange dans ma tête comme un cocktail imbuvable. Trop de choses me donnent envie de le frapper, et le reste de l'embrasser. Il y a d'abord eu cette nana, dans son appartement, alors que j'étais brisée de mes retrouvailles avec Demyan. Puis ce baiser, pendant l'attentat. J'appuie sur la sonnette. Les collègues sont débordés avec l’afflux important de patients. L'infirmière finit par arriver alors que je pose mon portable sur mon ventre. « Faut que tu me lèves. » Elle fronce les sourcils, et se radoucit pourtant rapidement. Je regarde les drains qui sortent de ma poitrine, et le plâtre entourant ma jambe gauche. Elle se rapproche de moi, ferme les pressions derrière ma blouse avec cet air bienveillant. Son soupire ne m'aide pourtant pas. Elle sait que je risque de faire un malaise, et que la douleur va s'intensifier. Comme si je pouvais lire ses pensées, j'appuie pour me faire un bolus de morphine, sans hésiter. La perfusion dans mon bras coule comme un métronome, c'est d'ailleurs ma seule occupation de la journée. Mais là, j'ai besoin de voir Ares. L'infirmière appelle sa collègue, qui fait la gueule en me voyant, avec son air de « c'est impossible ». Je fais la moue, et commence à essayer de me lever seule alors qu'elles accourent pour m'aider. Après une bonne douleur lancinante dans la jambe, et un effort sur-humain qui me donne la nausée autant que le souffle coupé, je suis enfin sur ce putain de fauteuil. La jambe droite tendue, la perfusion accrochée, les drains maintenus. Elle me fait enfin sortir de ma prison pour m'emmener dans la chambre de mon choix. Les points sur ma joue me tire, c'est étrange, j'ai l'impression que c'est la première fois que je les sens. Je suis épuisée, je comprends pourquoi elle faisait la gueule de me lever. La porte s'ouvre devant moi, alors que j'observe tout de suite le corps que je veux sentir contre le mien dans ce lit. « Pas trop longtemps Noé. Si ça ne va pas, tu sonnes. » Un léger signe de tête. J'ai compris, pas de vagues dans le service pour ce soir, je vais essayer de me tenir à carreau. Je fais avancer moi même le fauteuil jusqu'au lit, manœuvre un moment pour pouvoir être au plus proche, dans la longueur, avec cette jambe emprisonné qui gène tout mouvement droit. J'attrape sa main dans l'épuisement, ferme les yeux. J'ai les cheveux gras, t'as raison, ça me dégoûte. Toi aussi, mais c'est presque sexy. Mais on est vivant. Et j'tiens ta main comme si plus jamais je n'allais la lâcher.

@Ares Raad
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L'homme a souvent considéré, à tort, que les ténèbres consistent en une entité propre, alors qu'elles ne sont qu'absence de lumière. Elles n'existent que par un manque et, s'il faut convenir qu'elles incarnent bien quelque chose, ce n'est rien d'autre que le néant.
Est-ce que je suis reconnaissant d’être vivant ? J’en sais rien, je ne sais pas c’est quoi le mieux, entre être ici, et être dans la rue. Personne te calcule, et ils savent que je n’ai aucun moyen pour payer ça, et que je n’ai aucune assurance. Dans le fond, je remercie une certaine amie qui m’a avancé, sans doute pour m’aider, même si je sais que je vais devoir lui rembourser au moins la moitié. Mais comment faire ? Je veux dire, comment lui régler ça, alors que je me trouve allongé sur ce lit d’hôpital, que je n’arrive à bouger, ou même simplement respirer m’oblige à donner toutes mes forces. Cette balle, m’a traversée la ventre, et n’a touché aucun organe, une chose, comme les médecins aiment tant le dire. Mais l’autre, l’autre, j’ai le muscle déchiré, et j’arrive même pas à poser le pied parterre. J’ai la gueule défiguré, sans doute à cause de la chute que j’ai fait. J’arrive pas à contrôler mes tremblements, et mes crises. D’ailleurs, une infirmière doit passer une fois toutes les trente minutes, elles disent que c’est pour mon bien.
Elles disent que c’est pour ne pas être seul, qu’avec en plus les médicaments, je pourrais être plus calme. Je ne dors plus. Je ne rêve plus. Je suis constamment sur mes gardes, je garde un œil sur la porte, je garde même la grande lumière allumée. Moi qui d’habitude dort toujours avec la lumière du couloir, là, c’est différent. Mes démons remontent à la surface lorsque je tente de dormir, et c’est ça, le plus flippant.
Après nos messages, je lève les yeux au ciel en te sachant en train de bouder. T’es pire qu’une gosse, et même avec ça, t’arrives encore à être adorable, à vouloir me frapper pour m’apprendre les bonnes choses. Tu me manques, et c’est une vérité que j’ai du mal à encaisser. Je ne préfère même pas te le dire, et je coupe carrément mon téléphone afin de pouvoir me reposer. Je ne mange pas encore des aliments solides, j’ai des câbles partout sur le corps. On voit les cicatrices, déjà que j’en avaient pas mal. Mes tatouages un peu griffés, mais étonnement la faucheuse à la cuisse a bien survécu.
Quand je suis sur le point de fermer l’œil, c’est là que je sens une présence, et ta main vint réchauffer la mienne. C’est dans ce simple geste que je sens ta sincérité, et ta peur. Je lève mes paupières, je dépose mes iris en ta direction, je reste comme figé par ton corps qui habituellement est en forme. Malgré tes bleus. J’arque un sourcil. « T’es belle. » Tu es belle, même avec tes cheveux gras, même avec ta mine et tes cernes. Je garde se sourire intérieurement, en me tournant faiblement pour apporter le dos de ta main contre mes lèvres. Sans doute le seul geste que je m’autorise faire, puisque la douleur me remonte jusqu’à ma colonne vertébrale. « T’as pas pu t’empêcher de voir ce bel homme ? » Je t’offre un clin d’œil, et un sourire. Je regarde les infirmières nous laisser, alors que je reprends mes traits, haussant les épaules difficilement. « Comment tu te sens ? »
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