quiproquo ◮ Jasper.

Jasper Ҩ Oléane

Une heure. Cela faisait maintenant une heure que j'étudiais, et à vrai dire, j'en avais un peu marre. C'est bizarre, parce qu'habituellement, je pouvais y passer minimum trois heures sans lever un cil de mes copies, et là j'étais gavé en une heure seulement. Je rangeais mes affaires dans le silence, et doucement pour éviter un maximum de faire du bruit, et me dirigeais vers la sortie. Mes yeux fixant le sol, je faisais peu attention à qui se trouvait autour de moi. J'ouvrais la porte, et c'est naturellement que j'essayais de passer. Droite, gauche, gauche, droite. L'homme en face suivait mes mouvements. Vous savez, quand vous essayez de passer, et que l'autre tente de vous laisser passer, mais que quoi que vous fassiez, vos mouvements se suivent, tout deux, comme si on avait décidé de perdre du temps devant cette sortie, ou entrée. Je soupirais et me bloquait à droite, ne bougeant plus, faisant un sourire un peu gêné en relevant la tête vers l'homme en question, qui n'était autre que Jasper. Génial. Moins je le voyais, et mieux je me portais. Mon sourire se retira rapidement, et je soupirais, devenant tout de suite moins agréable. « Bon, t'attends quoi pour passer ? »

Oléane Ҩ Jasper

Dunster, ça sonne comme intello, non ? Rien d'étonnant donc à voir Jasper quitter sa confrérie pour se rendre à la bibliothèque de l'université. Pourtant, cela faisait quelques temps qu'il ne s'y était pas rendu. Un mélange de mauvaises surprises et d'ennui. Le silence absolu imposé dans le lieu avait tendance à l'exciter plus que le pousser à la concentration. Seulement là, il avait besoin d'un manuel de maths. Ainsi on le retrouve devant la porte, à danser avec une étudiante sans avoir le bon sens de juste s'arrêter. Peut-être car son bon sens s'était envolé quand son regard avait reconnu l'identité de celle-ci. Le hasard se fout vraiment de sa gueule parfois, y a pas d'autres mots. Au moins, elle a l'air aussi heureuse que lui de se trouver sur son chemin. « J'en sais rien, que tu dégages le passage peut-être ? » Un sourire des plus forcés et condescendant prit place sur ses lèvres. Bon, certes, maintenant que la demoiselle s'était arrêtée sur le côté, il avait largement la place de passer. Mauvaise foi quand tu nous tiens. Il ne la quitta pas des yeux, l'observant avec un certain dédain tandis qu'il passait cette foutue porte. « Toujours le même terrain de chasse je vois. On ne change pas les bonnes habitudes. » Souligna-t-il en la frôlant. Énième sourire en coin.

« J'en sais rien, que tu dégages le passage peut-être ? » Je levais les sourcils, assez surprise. Je lui offrais mon plus beau sourire forcé que j'avais en stock, comme pour le remercier de ses doux mots. Et puis, ça ne faisait que répondre à son propre sourire à lui, presque tout aussi forcé que le mien. « Toujours le même terrain de chasse je vois. On ne change pas les bonnes habitudes. » Je ne sais pas si ça avait été le fait qu'il me frôle, ou alors son sourire en coin, mais ça éveilla chez moi des instincts violent, et c'est sans aucune douceur ni sans aucune pitié que je poussais violemment avec mon épaule contre l'encadrement de la porte. J'y avais mis tout mon poids, toute ma force, et toute ma rancune. J'espère qu'il avait eu mal, oui. « ça, c'est pour avoir dis que tu m'avais dans la poche, connard. »
La faute à pas de chance, j'ai effectivement su ses allusions envers moi, ce qui m'avait vraiment mise en colère. Ou en fait non, disons que quand je l'ai appris, j'ai surtout été très déçue de ce comportement, surtout venant de lui. On ne refait pas les hommes, après tout.
C'est sur cette phrase rempli d'amour que je poursuivais mon chemin hors de la bibliothèque.

Oléane Ҩ Jasper

A croire que malgré tout, elle parvenait toujours à le surprendre. Ca, Jasper ne l'a pas vu venir. Croyant l'échange finit et les choses définitivement réglées, il baissa surement un peu sa garde, puisque ce n'est pas à moitié qu'il se prit l'encadrement en bois. La furie le bouscula violemment, et il se mordit tout aussi violemment la langue afin d'éviter de pousser un juron de douleur. Fournir aux ennemis ce qu'ils attendent de lui, jamais. C'est son épaule et coude qui avaient prit, et c'est un désagrément lancinant qui prenait possession de son bras victime. Il serra le poing, avec comme seul objectif de garder un peu de contenance. Mais ce n'était rien comparé aux paroles de la demoiselle, qui plus que ses instincts primaires parvinrent à réveiller le placide Jasper. Qu'on se le dise, il avait surtout retenu « connard ». Demi tour, mâchoire serrée. L'étudiant la rattrape en quelques enjambées, ses doigts se referment sur le poignet féminin avec autant de douceur dont peu faire preuve un type d'environ 1m80, énervé au possible. Ses doigts l'entoure, serre, et tire d'un coup sec vers lui afin qu'elle lui fasse face. Aussi agréable que de se prendre une porte. « Je te laisse une chance de t'excuser. » Bon prince, Jasper. En souvenir du temps où ils ne s'envoyaient pas dans le décor. « On sait tous les deux que tu me dois bien ça. » Un brin d'amertume se laisse percevoir dans son ton, mais plutôt bien dissimulé par la colère.

Je pensais en avoir terminé maintenant avec lui. Je reprenais ma route comme si de rien, le laissant sur sa faim, espérant qu'il ai compris le message. Cependant, il semblerait que non, puisque sa main serra mon poignet, avec autant de douceur que pourrait avoir un lion en face d'une gazelle. Je me sentis presque voler jusqu'à être en face de lui. J'essayais de défaire mon poignet, mais en vain. Il était fort, c'est vrai, mais étant donné que j'étais une fille et que c'était l'excuse imparable, je supposais qu'il n'allait pas me faire grand mal. « Je te laisse une chance de t'excuser. On sait tous les deux que tu me dois bien ça. » Je me suis mise à rire un peu, mais ce n'était pas un vrai rire, non, c'était un rire moqueur. Je le regardais, haussant un sourcils « Celui qui a le plus à se faire pardonner entre nous deux, c'est bien toi. »
J'essaie à nouveau de retirer mon poignet, mais Jasper a l'air déterminé à ne pas lâcher. Je pensais déjà à la douleur que j'allais ressentir pendant les prochaines heures au poignet à cause de ces conneries, et j'ai besoin de mes poignets, c'est important en danse. Je suis certaine qu'il le savait, parce qu'il aurait pu agir autrement, comme par exemple s'excuser. « Allez lâche moi, tu trouve pas que t'en a déjà assez fais comme ça ? »

Oléane Ҩ Jasper

Jasper était quelqu'un de doux, vraiment. Il était rare de l'entendre hausser la voix, ou lever la main -oh, précieux doigts, trop pour être abimés par la violence-, même lorsque provocation il y avait. Alors, là, face à Océane, il devait bien y avoir une raison légitime pour qu'il renie un peu de sa nature. Le fait d'avoir heurté son égo suffisait amplement. C'était un peu plus que l'égo masculin classique, le primaire ; tant l'étudiant se fichait bien au fond, de plaire ou non. Par contre quand il se permettait de s'attacher un peu, là, les cartes étaient redistribuées. Et cela donnait cette main, solidement attachée au poignet de la belle, telle une sublime menotte. L'effrontée n'allait définitivement pas dans la direction d'une libération, le provoquant une énième fois d'un rire. Ils avaient probablement l'air idiots, à se rejeter la faute sans se justifier d'avantage. Un simple renvoi de balle. Sa prisonnière tente d'échapper à son emprise, et Jasper sert encore. « En tant que danseuse, je serais toi, j'écouterais celui qui est en phase de rendre tes prochaines séances d'entrainement assez pénibles. » S'apitoyer, ce n'était pas pour lui. Au moins elle aurait quelques souvenirs de leur entrevue, cela l'empêchera peut-être de réitérer ses conneries avec un autre naïf. « Juste pour rire, j'ai fais quoi, au juste ? » Non parce qu'assurément, elle n'avait rien à lui reprocher. Il n'avait rien fait.. enfin, c'est ce qu'il pensait. En attendant, il jubilait d'avance à l'idée de la voir se débattre dans des arguments sans sens.

Il serrait encore plus fort, ce qui m'arracha un soupire. « En tant que danseuse, je serais toi, j'écouterais celui qui est en phase de rendre tes prochaines séances d'entrainement assez pénibles. » Je ne l'avais jamais vu comme ça, dans cet état froid et cruel. Au moins, j'en apprenais de jour en jour sur lui. Têtue, je tentais encore une fois de me défaire, mais rien. Il serrait vraiment bien, et je savais déjà que mon poignet allait souffrir pendant les deux prochaines heures.  « Juste pour rire, j'ai fais quoi, au juste ? » Je fronçais les sourcils. Ce qu'il a fait ?! Il pensait vraiment être innocent dans l'histoire ? Je ris un peu, d'un rire sec, j'y croyais pas. « ce que t'a fais ? Tu te moque de moi ?! » Je le regardais, mais il ne semblait toujours pas comprendre. Je fis une nouvelle tentative pour retirer mon poignet, mais toujours rien. « t'a été dire que tu m'avais dans la poche.. comme si.. comme si j'étais une fille facile.. tu m'a fais passer pour une fille que.. t'avais sous le coude. Tu voulais juste me baiser c'est ça ? Au moins, c'était clair avec ce que je représentais pour toi.. ». Quand j'ai appris qu'il avait dis ça, j'ai été blessée, et j'ai pas voulu y croire, mais il fallait se rendre à l'évidence, et j'avais une énorme confiance en la personne qui m'avais annoncé ça. Comment ne pas croire quelqu'un en qui vous avez une confiance aveugle ? Ça m'avais réellement blessée, parce que je tenais à lui, et il était pas juste un gars. Je haussais les épaules, tentant encore une fois vainement de retirer mon poignet de son emprise. « tu vois, moi c'est pas quelque chose qui me fait rire. »

Oléane Ҩ Jasper

Si Jasper n'était pas aveuglé par la colère, surement se serait-il posé les bonnes questions. Surement aurait-il prit le recul nécessaire, exigé par la situation. Son esprit aurait compris il y a déjà cinq bonnes minutes que les deux jeunes gens ne se comprenaient pas, chacun décrivant une histoire, un passé diamétralement différent. Ils n'avaient pas vécu la même chose. Il y en avait forcément un des deux qui avait tord. Voir les deux. Mais ils étaient tous les deux trop bornés pour comprendre les mots qui sortaient de la bouche adverse. Particulièrement Jasper. Océane était tellement surprise, son visage trahissait les sentiments qui traversaient son corps, il était impossible de mentir aussi bien que ça. Ce ne fut que lorsque la demoiselle mit les cartes sur la table, dévoilant son jeu, que la tension faisant bouillir son sang s'évanouit, progressivement, au fur et à mesure des mots. Ses doigts se décontractèrent autour du poignet menu. L'incompréhension gagnait maintenant du terrain sur la rage. « De.. quoi ? Non mais qu'est-ce que tu racontes ? » Sa dernière tentative de libération fut la bonne, il lâcha prise. « C'est tout ce que tu as réussit à inventer pour me faire porter la responsabilité de tout ça ? » Mais la motivation n'y était plus. Le jeune homme pataugeait, et ses arguments prenaient l'eau. Elle paraissait tellement sincère, qu'il n'arrivait plus à l'ignorer. « Je n'aurais jamais pu dire ça, enfin, tu me connais quand même.  » Elle le savait que c'était pas un de ces types qui cumulent les conquêtes, qui rêvent d'additionner les filles, hein ? Non, vraiment, là tout de suite, ça ne lui disait rien. Mais peut-être qu'il ne cherchait pas assez bien dans sa mémoire, après tout.

On tournais en rond depuis le début. On était bien trop fier de nos petites personnes pour se rendre compte que c'était de nos fautes, à nous deux. Jeter la pierre sur l'autre est chose tellement aisé, et puis c'est aussi la solution de facilité. Enfin, en tout cas pour lui, parce que personnellement, je n'avais strictement rien à me reprocher. C'est quand il a commencé à dire des conneries pareilles que je me suis éloigné de lui, alors s'il faut s'en prendre à quelqu'un, c'est certainement pas à moi.  « De.. quoi ? Non mais qu'est-ce que tu racontes ? » J'étais enfin libérée. Je passais mes mains autour de mes poignets machinalement, comme pour les masser et éviter toutes futures possibles douleurs.  « C'est tout ce que tu as réussit à inventer pour me faire porter la responsabilité de tout ça ? » Je fronçais les sourcils sans comprendre sa réaction. Il était sérieux ou alors il jouait simplement avec mes nerfs ? J'ai fais l'effort de lui parler, de lui dire que ça n'allait pas, de lui dire pourquoi, et il me dis que c'est des mensonges ? Je savais que c'était la vérité. Je le savais. Il me rabaissais au rang de menteuse, et ça mon ego a du mal à le supporter. « de tout ça quoi ? C'est juste une erreur venant de ta part. » , « Je n'aurais jamais pu dire ça, enfin, tu me connais quand même.  » Je souris encore un peu blessée par ses précédents propos qui ont frappés en pleins dans mon ego. « Ouais, je pensais aussi que je te connaissais. » J'allais m'en aller. C'était trop dur de soutenir tout ça. Le fait de le voir en face de moi, de me dire que je mens, ou plutôt que j'invente. Comme si j'avais que ça à faire. Il en valait pas la peine, c'est ce qu'il fallait se dire.. ? Ouais, je m'en remettrais. C'est pas comme si c'était le premier débile que je croisais.

Oléane Ҩ Jasper

Allez savoir pourquoi Jasper avait du mal à se rappeler de la scène. De celle qui a créé tout ce désastre, qui a provoqué la colère de l'un, puis celle de l'autre, plus par répercussion que par réelle raison. Au fond, il lui en voulait juste de s'être éloigné de lui, sans excuse légitime, de l'avoir rayé de sa vie. La voir avec d'autres types avait fait fonctionner sa paranoïa. Sauf que la cause, première, il l'ignorait. Il ne savait pas que la raison pour laquelle Oléane avait coupé les ponts, était totalement inhérente à lui. C'était de sa faute. Et ça, il avait du mal à l'admettre, même quand elle lui balançait la réalité en plein visage. Son premier réflexe fut évidemment de nier, avec au fond, de la bonne foi. Il fallut quelques minutes avant que Jasper entraperçoive un vague souvenir pouvant correspondre aux faits développés par elle. Il y eu bien un soir, où au milieu d'autres Dunsters, le garçon a abordé le sujet Oléane. Pas mal d'alcool et quelques provocations l'avait poussé à suivre le mouvement, et lui aussi parler des filles qu'il fréquentait. Mêlant mensonge et réalité, le jeune homme s'était laissé allé à dire qu'il pouvait avoir quand il voulait la demoiselle dans son lit. En y pensant rien, mais il l'avait dit. Sans aucun respect pour elle. Maintenant que ca lui revenait à l'esprit, l'étudiant perdait de sa contenance. « Tu n'étais pas censée le savoir.. comment tu as pu l'apprendre ? » Au lieu de s'excuser. Crétin jusqu'au bout. Sauf que Jasper n'a jamais été dans la situation du connard, du moins, jamais dans cette situation où ce n'est pas voulu, où il éprouve des regrets. Il ne sait pas comment se comporter, la preuve, il ne la rattrape même pas quand elle tourne les talons. Avalant sa salive avec difficulté, le lâche la regarde s'éloigner.

FIN DU SUJET