HARDY + En apesanteur

J'avais eu ce besoin de sortir, de prendre l'air. Et de traîner ailleurs que dans des bars en attendant l'ouverture de la boite de Zayn. En me baladant dans Boston, j'étais tombé sur ce théâtre, et sur la pièce à l'affiche ce soir-là. Ce qui avait piqué ma curiosité, c'était la comédienne principale. Tout simplement parce qu'il y a un peu plus de deux semaines, elle m'avait contactée pour mes photos. Alors comme je n'avais rien d'autre à faire, j'avais pris une place. J'aimais bien le théâtre, même si ma première expérience n'était pas géniale. J'crois que c'était quand mes parents m'y avaient traînés de force, à NY, parce que c'était le patron du groupe machin, qui connaissait untel qui avait financé la pièce. Et qu'il fallait bien lui témoigner notre soutient "tu comprends". Encore une histoire de fric quoi. Mais au fond, ça m'avait bien plu. Et j'y allais encore, de temps en temps, mais surtout en solo. Je comprenais vite que j'avais dû acheter mon ticket dans les derniers, puisque mon numéro de place m'amenait directement vers le fond de la pièce. Et alors que j'avançai dans ma rangée, je reconnu soudain Lucky, plongée dans sa lecture du dépliant qu'ils donnaient à l'entrée. « Toi ? Au théâtre ? » demandai-je, surpris, un sourire sur les lèvres. Et évidemment, le sort voulais que mon siège soit à côté du sien. Enfin de toute manière, la dernière rangée ne semblait pas avoir beaucoup de succès puisque nous étions les seuls. Ou plutôt, la majeure partie des gens avaient dû acheter leur ticket en avance. C'était surement ça ouais.

Quelle ironie, parce que franchement, il n'y avait pas d'autre mot pour qualifier la présence de Lucky à mes côté pour toute une pièce. Et vu sa tête, elle devait être aussi ravie que moi. Voir son exaspération était au moins une maigre consolation face à cette situation. « Je suis simplement étonné de te voir dans un endroit qui regroupe des gens si.. cultivés ? Venant de toi c'est une surprise, tu ne peux pas dire le contraire » lâchai-je tout naturellement sans la regarder, admirant la salle d'un air intéressé. Juste pour l'agacer un peu plus encore. Je jetais un regard à montre pour savoir si le spectacle allait bientôt commencer. « Non » répondis-je du tac au tac avec un sourire entendu. Clairement, quand Lucky était dans les parages, nous savions elle comme moi que je ne pouvais pas la laisser tranquille. Et la réciproque était vraie. « Tu es venue seule ? Encore autre chose qui m'étonne. Peut-être cherche-tu à t'aérer l'esprit ? Ton escapade en Italie n'est pas si loin pourtant.. » dis-je avec un sourire en coin, me moquant ostensiblement d'elle. Partir et tout quitter pour "l'amour", le genre d'idée à la con qui m'avait toujours fait marrer. Je lui avais dit que c'était voué à l'échec, qu'elle finirait par revenir, et seule. Alors oui, j'étais peut-être un salaud de lui rappeler son malheur, mais.. qui a dit que je n'en étais pas un ?

Lucky s'énervait. En même temps, c'était prévisible. Il était rare qu'on parvienne à rester plus d'une minute dans la même pièce sans se chamailler elle et moi. Il fallait que je la provoque, il fallait qu'elle pique. C'était plus fort que nous. Comme des atomes qui s'attirent et se repoussent. Et toute cette tension accumulée se traduisait par des mots acérés... ou des ébats torrides. Car si il y avait bien une chose que j'aimais autant faire avec elle que se disputer, c'était s'envoyer en l'air. Même si, je ne lui avouais pas, pas vraiment. Fierté mal placée, orgueil un peu trop présent, appelez ça comme vous voulez. On se détestait cordialement, et on en restait là. Elle perdait immédiatement son sang froid, tellement prévisible et.. commençait à me tirer la langue comme une gamine. Je soupirai, levant les yeux au ciel comme pour lui montrer mon ennui. La soirée allait être longue. Je l'écoutais se justifier en me tournant vers elle, et un sourire amusé venait étirer le coin de ma bouche, admirant au fond son côté rêveur. C'était mignon, et totalement naïf à la fois. Mais malgré tout, un part de moi arrivait à admirer cette facette de son caractère. Ce qui, bien sûr, m'amenait à lui rappeler à son bon souvenir sa petite escapade en Italie. Coup bas ? Peut-être bien. Mais n'était-ce pas moi, au final, qui avait eu raison depuis le début ? « Vas chier Hardin ! » Je lâchai un léger rire, soutenant son regard, aussi colérique soit-il. « Ouuh, j'ai touché un point sensible ? Le mal du pays peut-être ? » Désolé. Ou pas. Au fond, elle réagissait ainsi parce qu'elle savait très bien que j'étais dans le bon. « Et bien, bonne recherche. Ne compte pas sûr moi pour te donner un coup de main. » Chercher l'âme-soeur, le fléau de la jeunesse actuelle. Je le lui laissais, franchement. « Et puis toi, de tous les sièges libres, c'est ici que t'es venu poser ton cul ? C'est quoi l'arnaque ? » Elle était à point là, ça se voyait. Prête à me sauter dessus pour m'étrangler. D'ailleurs, les gens installés sur la rangée devant nous commençaient à se retourner régulièrement en nous jetant des regard réprobateurs, témoins malgré eux de nos chamailleries. « Toutes les autres places sont vendues, beauté. Mais si d'ici quelques minutes il n'y a personne d'autre sur cette rangée, je me ferai un plaisir de me décaler. » Mais elle était lancée, et je voyais bien qu'elle cherchait à me faire chier à son tour. « J'préfère encore écourter ma soirée ici, que t'entendre rabâcher des conneries. Oh et scoop, t'es pas un dieu au lit, j'crois même que t'as encore des choses à apprendre. L'Italie, c'était quand même un beau souvenir. Lui tu vois, il a réussi à me faire crier son prénom ! » Je restais muet face à ce coup bas, alors qu'une vieille dame devant-nous éventait son visage choqué des propos de Lucky avec le programme du spectacle. J'haussais un sourcil amusé, la provocant du regard. « Tu veux qu'on sorte de cette salle, que je te prouve le contraire ? » Cash. Et ravi de voir du coin de l'oeil la vieille dame se tortiller sur son siège, alors que je ne lâche pas Lucky du regard.

Tenter de toucher mon égo en remettant en question mes performances au pieu, c'était facile. Trop facile pour être réellement pris au sérieux. Pourtant malgré tout, c'était mon égo qui parlait en lui proposant à demi-mots et sans pudeur de lui prouver mes capacités sexuelles là, tout de suite. Je soutenais son regard, provocateur, et parfaitement sérieux. Jusqu'à ce qu'elle détourne ses yeux, témoin de sa gêne et du fait j'en étais sûr, que je l'avais troublée. Un petit sourire étirait mes lèvres, savourant les quelques secondes de silence qui voulaient tout dire, alors que de toute évidence, la vieille devant nous n'en ratait pas une miette. « J'ai une meilleure idée ! Comme je sais que t'aimes aussi les femmes plus âgées, pourquoi pas en choisir une là juste sur cette rangée devant nous ? Je te mets au défi de lui donner l'orgasme de sa vie et je serais bien entendu, le témoin en live pour m'assurer de la réussite de ce défi. Alors ? » Je me retenais d'éclater de rire, voyant clair dans son manège. Non Lucky tu n'allais pas t'en sortir comme ça. La vieille devant nous elle par contre, l'air de rien, semblait plus attentive que jamais. « Après quoi, je pourrais peut-être te laisser me prouver que j'avais tort. » Pile à cet instant, la salle fut plongée dans le noir, annonçant le début de la pièce. Le silence régnait encore, alors que Lucky se penchait vers moi pour murmurer à mon oreille. « J'ai l'impression qu'elle est déjà en train de mouiller sa culotte... » Cette proximité me donnait encore plus envie de lui faire du rentre dedans, même si tout ça était complètement paradoxal vu le discours que nous avions il y avait à peine quelques secondes. « J'aime les fruits juteux, mais pas au point de taper dans le "un peu trop mûr" » dis-je d'une voix parfaitement audible, si bien que la mémé se retourna vivement, l'air outré. « Pourriez-vous cesser de nous parasiter avec vos discussions ? » dit-elle sèchement. « Vous savez que c'est impoli d'écouter les conversations des gens Madame ? » dis-je le plus naturellement du monde, alors qu'elle se tournait à nouveau vers la scène en se tortillant, et que les applaudissement retentissaient devant le lever de rideau. Je me penchais vers Lucky, parlant à son oreille en l'effleurant de mes lèvres. « Ce n'est pas vraiment la personne que je souhaitais émoustiller le plus...Tu me provoques réellement Burberry, ou tu n'as pas le cran de sortir d'ici avec moi ? »

J'avais beau avoir été agacé et saoulé il y a quelques secondes, là, j'étais en train de me retenir d'éclater de rire en voyant la gueule de cette mamie, et Lucky qui essayait d'apaiser les choses en s'excusant. C'était elle qui avait commencé à me chercher, et maintenant, je ne pouvais faire autrement que de continuer à la provoquer. Surtout en la voyant aussi déstabilisée et gênée. Mes lèvres effleuraient son oreille, cherchant clairement à lui faire perdre ses moyens, alors que je pouvais deviner le rouge qui lui montait aux joues malgré l'obscurité. Je me rapprochais lentement d'elle, cherchant à lui voler un baiser pour la faire définitivement craquer, au moment où elle posa ses doigts sur ma bouche, me faisant reculer. Comme si elle en avait réellement quelque chose à faire que la pièce ait commencé maintenant. Je me mordillais la lèvre, acceptant l'échec de ma tentative avec un sourire. Pourtant en la voyais se relever d'un seul coup pour aller acheter à manger, je sentais bien que je l'avais piquée. Je secouais légèrement la tête de droite à gauche en la voyant s'éclipser, mes yeux vaguement tournés vers les acteurs qui s'échangeaient leurs premières répliques. Puis je me levais à mon tour, sortant de la pièce en silence pour aller la retrouver. Je la croisais pile dans le sas désert, pop corn et coca à la main. « C'est bizarre.. j'ai l'impression que tu me fuis » dis-je en m'approchant doucement d'elle, la faisant reculer contre le mur, un sourire aux lèvres. Savourant ses joues rosies lorsqu'elle se retrouva acculée, et que je posais mon avant bras sur le mur derrière elle. « Non ? » dis-je en baissant mon regard sur ses lèvres sans pudeur, l'excitation me gagnant de plus en plus. Elle m'avait cherché ? Eh bien elle était en train de me trouver.