DARIUS J. BENSON ► Benjamin Mascolo

Vous m'auriez dit il y a plusieurs années qu'un jour, j'allais me retrouver dans une librairie de Manhattan, devant une table, à signer des autographes à certaines personnes qui avaient eu la chance de lire une histoire que j'avais écrite, je vous aurais ris au nez. Moi, le mec qui garde presque 17 romans complets et non-publiés dans les méandres de ses dossiers? Impossible. Et pourtant, me voilà, dans cette librairie, devant une foule de gens qui font la queue avec un exemplaire de mon roman, mon tout premier roman, et qui veulent absolument avoir un autographe. Mon éditeur avait fait un travail d'enfer pour que ce dernier se retrouve sur les étagères, et les campagnes publicitaires ont fait leur bout de chemin. Pourtant, j'étais un auteur inconnu, un simple gars de New York qui n'avait rien de mieux à faire de ses après-midi que d'écrire plusieurs pages de romans qui ne verront probablement jamais le jour. Il avait tout fait pour que mon roman prenne de l'altitude. Je ne peux que lui en être reconnaissant...

Je me souviens de mon tout premier roman, que j'ai lu à l'âge de 8 ans. Contrairement à ce que tout le monde pourrait penser, je n'ai pas commencé à lire activement avec Harry Potter, ou même avec Le Seigneur des Anneaux. Mon tout premier roman fut Le Prince des Voleurs, de Cornelia Funke, où de jeunes enfants découvrent le monde des voleurs de Venise, et partent à la recherche d'un carrousel qui possède de puissants pouvoir magiques. L'histoire était si bien construite, si merveilleuse, si magique, que j'en fus aussitôt captivé. J'ai commencé à ce moment-là à m'intéresser à l'écriture, à ce monde littéraire qui s'ouvrait à moi. Depuis ce temps, chaque fois que je me perdais dans une librairie, j'achetais un nouveau roman que j'ajoutais à ma bibliothèque. Le fait d'avoir un père qui travaille dans la finance à Wall Street me permettait de pouvoir dépenser un peu plus que d'autres personnes!

Depuis ma plus tendre enfance, j'avais une idole : mon grand-père, Jonathan Benson. Il était artiste, et habitait Cambridge dans un loft couvert de toiles qu'il avait peintes lui-même. Chaque fois que j'y entrais, je voyais tout le travail qu'il pouvait mettre dans chacun des traits de pinceaux, dans chacun des décors, dans chacun des points de lumière. J'étais absolument fasciné. À chaque fois que nous allions le visiter, il me demandais toujours la même chose : de lui montrer un de mes écrits, peu importe la provenance. Bien évidemment, je lui ramenais plutôt souvent des compositions de collèges, mais également des écrits qui m'étaient plus personnels : des poèmes, des histoires, des squelettes de romans que je voulais un jour réaliser. Je me souviendrai toujours avec quelle attention il prenait mes écrits et me donnait plusieurs conseils pour m'améliorer, pour faire de mon œuvre quelque chose de véritablement personnel et puissant. Le nombre d'heures que j'ai travailler pour tenter de les appliquer, pour pouvoir transformer mon œuvre...

Aujourd'hui, mon grand-père n'est plus de ce monde. Il y a de cela 3 ans, il était devenu gravement malade et n'a pas pu y échapper. Il nous a laissé dans le deuil, et m'a laissé sans guide, sans conseils... Les jours qui ont suivis son enterrement ont étés absolument pénibles, et mes écrits étaient devenus beaucoup plus sombres et basiques. Je n'avais pas envie d'écrire, je supprimais la majorité des pages de mes romans... Je n'avais personne pour m'aider, me supporter...

Le jour de la lecture du testament, j'avais la mine sombre. Je ne voulais pas être là, mais je savais bien que je n'aurais pas le choix d'y passer. Assis à côté de mes parents, j'attendais de voir ce que mon grand-père allait bien pouvoir me laisser. Je n'avais pas grand espoir d'avoir quelque chose de formidable dans cet arrangement...

Je n'aurais pas pensé avoir hérité non seulement d'un peu d'argent de sa part, mais aussi de son loft et des toiles qu'il n'avait pas encore vendu. J'avais donc maintenant un loft à mon nom dans les environs de Cambridge, une collection de toiles, et un endroit où j'allais maintenant pouvoir travailler. J'ai aussitôt compris que mon grand-père avait décidé de m'envoyer un message très important. J'avais besoin de ce petit coup de main posthume, j'imagine. Il avait déjà réglé la majorité des dépenses du loft, donc je n'avais rien à payer en tant que tel. J'avais donc un espace où j'allais pouvoir évoluer en tant qu'auteur.

Me voilà maintenant, 3 ans plus tard, dans mon appartement dans les environs de Cambridge, tout près de l'université d'Harvard, où j'avais décidé de suivre mes études et de continuer ma carrière. J'ai maintenant un roman à succès dans les étagères de plusieurs librairies aux États-Unis, et des traductions de ce roman un peu partout dans le monde. Les redevances de mes romans me permettent de vivre une vie décente hors de Manhattan, même si parfois, j'ai un peu le mal du pays. J'ai également un nouveau compagnon, mon petit shiba Miko, qui est devenu comme une nouvelle famille pour moi, et qui me permet d'avoir un peu de compagnie dans ce grand loft qui me sert de maison et d'atelier. Maintenant, j'écris également la suite de mon roman, et j'espère qu'elle pourra avoir le même effet, même si la célébrité est bien peu pour moi. J'ai toujours aimé une vie plus simple.

Maintenant, c'est une nouvelle aventure qui commence pour moi.