Tell me that's a joke ♣ Briony

Il était déjà très tard et Boston dormait paisiblement lorsqu'Alekseï avala d'une traite son énième shooter. Il le reposa violemment sur le bois de la table qui fit un bruit sourd qui d'ordinaire aurait été entendu par n'importe qui mais ce soir, la musique était forte et l'allégresse au rendez-vous. Personne ne remarqua ce mouvement brutal de la part du russe. Ce dernier était là depuis le début de la soirée, entouré par une petite dizaine d'amis, autant d'homme que de femmes d'une trentaine d'années pour la plupart. Ils avaient tous énoncés cette éternelle phrase « ce soir, c'est soft » et, d'une façon qui était totalement prévisible, aucun d'entre eux n'avait tenu sa promesse. Alekseï était loin d'être saoul, il lui en fallait plus pour commencer à dérailler, mais il se sentait bien et apaisé.
Tout les verres de la table étaient vides et dans un élan de générosité, le russe se leva et prit la direction du bar afin d'en commander pour tout le monde. Il connaissait chacun de ses amis et n'eut pas besoin de leur demander sur quelle boisson se portait leur choix. Une fois la commande passée il resta debout, accoudé au bar à regarder l'assemblée. Tout le monde avait l'air de bien s'amuser, l'ambiance était à la fête et il n'y avait aucun nuage à l'horizon. Mais c'était évidemment des pensées qui avaient fleuries bien trop vite puisque le professeur put voir une silhouette se dégager de la pénombre. Avant qu'elle ne soit à ses côtés, il roula des yeux et se retourna face au bar, les deux coudes appuyés dessus et s'employa à observer les bouteilles qui étaient présentées devant lui. Il espérait qu'elle ne l'ait pas vu et surtout qu'elle n'ait pas la merveilleuse idée de venir passer sa commande juste à côté de lui. Qui était-elle ? Briony Silver, une jeune femme qui l'avait prit en grippe alors qu'il ne savait même pas pourquoi. Et en bon petit soldat, quand est irrité par Alekseï, ce dernier en fait de même.

Un an que je n'avais pas spécialement bu. UN AN. C'est beaucoup trop pour une ancienne Mather, surtout pour la présidente. J'ai une réputation à tenir les gars, comment je fais moi ? Quelle idée de tomber enceinte mmh. Bon, c'est pas comme si je l'avais choisi et comme si je le regrettais. C'était bien l'une des dernières choses positives que j'avais dans ma vie ces derniers temps. Putain, c'était obligé qu'à un moment ou un autre mes pensées allaient me ramener vers mon ex. Pourquoiii tant de haine ? Pourquoi est-ce que j'aime me torturer de cette façon ? L'humain est sado-masochisme, l'humain ne souhaite pas heureux et fait tout pour entraver la possibilité d'avoir une vie stable et équilibrée. Quoique, c'est pas moi qui ais dit fuck off à la sérénité pour une fois ahaha. On devrait le marquer quelque part d'ailleurs tellement c'était inédit. Anywaaay, je m'écarte 1) du sujet, 2) de la table. Doux jésus que la terre est basse. Je crois que j'ai un peu bu. Un peu beaucoup. Lolilol, c'est qui la mauvaise mère ? Ca devait être l'une des dernières choses que j'avais pas encore à mon palmarès, ça serait con de le louper. Nos verres étaient vides. Et ça portait malheur, moi je vous le dis. Je paie la prochaine. Je prenais la commande, acquiesçant quand ils me disaient ce qu'ils voulaient, sachant pertinemment que j'allais pas retenir. Ils m'avaient mis bien trop cher au dernier jeu d'alcool tellement ils étaient contents que je revienne dans le game les enfoirés. C'est pas juste de s'acharner de cette façon. Le fait est que je me retrouvais au bar à passer du coup ma commande, souriant à tout le monde car voilà la vie est belle, je suis absolument pas mère célibataire, absolument pas pathétique et pitoyable m'voyez. Et là, j'me retournais. Et y avait ce gars. Trentaine ou quarantaine, i don't know, entre les deux certainement. Il était pas mauvais à regarder mmh. Maiis sa tête me disait quelque chose. Coucouuu. Ouai, c'est une manière d'aborder les gens j'vous le dis. Dis voir.. toi.. moi.. Je nous montrais du doigt pour que ça soit concret. On s'est pas déjà croisés quelque part ? Si ça se trouve c'était un prof de la fac OU PIRE, un collaborateur. En tout cas, ta tête me paraît familière, mais j'sais pas si j't'aime bien ou pas, faut que tu m'aiguilles.

Et merde. Tu enfouis ton visage dans ta main. Elle t'avait vu et s'approchait de toi. Elle semblait te dévisager comme si l'alcool lui avait fait perdre la mémoire. Ou le temps peut-être. Avec un air complètement saoul, elle te demande si vous ne vous connaissiez pas. Tu arques un sourcil, surprit qu'elle ne te reconnaisse pas, surtout méfiant qu'il s'agisse d'une mauvaise blague. Tu lances un regard dubitatif autour de vous, afin de voir si personne ne vous regarde, voir si elle n'avait pas de spectateurs. Non, visiblement elle n'est soutenue par personne et elle t'a réellement oublié. Tant mieux, mais tu ne comptes pas passer le reste de la soirée avec elle « Je crois qu'on ne s'aime pas beaucoup, alors tu perds ton temps » puis sans un mot te tu retourne, accoudé au bar et tu prie pour qu'elle lâche l'affaire et qu'elle s'en aille. Tu te contente de cette phrase parce qu'en temps normal, tu n'aime pas trop parler ni en faire des tonnes. Mais alors quand c'est quelqu'un qui te crispe, c'est encore pire.
Tu n'as jamais réellement su pourquoi elle était habituellement désagréable avec toi, mais tu t'en fiche bien. Tu pense que c'est par rapport à sa meilleure amie avec qui tu as eut une brève relation, mais tu ne sais absolument pas ce qui la dérange là-dedans. Avec Alexys, ce fut une relation expresse mais cela vous avait convenu à tout les deux. Tu venais d'arriver à Boston et elle avait autant envie que toi de cette relation. Vous vous étiez quittés en bons termes et surtout, aujourd'hui vous ne gardez aucune animosité de cette relation. C'est même tout à fait cordial. Alors pourquoi cette nana t'en voulait autant ?
Rapidement, ta commande fait son apparition. Un grand sourire se dessine sur ton visage car tu te dis que tu vas pouvoir t’éclipser vite et terminer cette conversation que tu n'as pas du tout envie de continuer. Seulement, c'était sans compter sur le barman qui était en train de s'excuser d'avoir oublier un verre. Et le tiens en plus. Il repartit aussi vite qu'il était venu et tu es condamné à rester là encore quelques minutes. Avec une Briony complètement saoule à tes côtés.

Honnêtement, je me sentais bien et mal. Etre bourrée soit ça me réussissait, soit c'était un échec désastreux. Parce que je pouvais très bien me dire que voilà, c'était ma soirée et faire absolument tout ce que je voulais, que j'étais une queen en fait. Mais de l'autre, je pouvais me rappeler d'une seconde à l'autre pourquoi je voulais absolument me prouver que j'étais vivante et séduisante et belle et tout ce que vous voulez. Et la soirée pouvait basculer du très mauvais sens, jusqu'à la crise de panique et tout le toutim. Je suis merveilleuse, je ne vous l'avais jamais confié ? Voilà qui est chose faite. Ce monsieur là, il m'intéressait. Oh il était pas forcément dégeu à regarder on va pas se mentir, au contraire. Mais c'était surtout son faciès qui m'importait, ouai j'suis pas superficielle vous comprenez. Oui oui. Il me disait quelque chose. Et voilà il fallait qu'il soit coopératif. « Je crois qu'on ne s'aime pas beaucoup, alors tu perds ton temps » HEEEY pourquoi tu pars déjà ? Pourquoi tu veux pas rester avec moi ? En vrai, ça remet un coup dans mon ego et ma fierté qui avaient déjà été bien assez pietinés par Wade dans sa grande bienveillance. Fuck you. Bref, reprenons. Il s'en allait mais il était coincé car vu le sourire de la serveuse, tout n'était pas arrivé. T'es pas sûr ? On est censés savoir si on s'aime pas.. Fin chais pas, ça se ressent. Tu vois moi, là, par exemple, j't'aime pas, car t'en as rien à foutre de moi alors que je te souris itout, fin y a tout pour qu'il y ait une bonne communication. C'est pas la vérité ?  Pourquoi on devrait pas s'aimer alors ? T'as fait une connerie ? T'as essayé de me pécho ? T'as fait du mal à une de mes potes ? T'es.. omg, est-ce que t'es un de mes anciens profs ? Jesus Christ, me dis pas ça, j't'en prie.

Tu roules des yeux de manière désabusée lorsqu'elle entame une tirade dont tu as peur de ne jamais voir la fin. Elle était sérieuse là ? Il n'y avait jamais eut de bonne communication entre vous et il n'y en aurait probablement jamais. La voilà qui énumère toutes les situations possibles et inimaginables que vous auriez put vivre pour être en mauvais termes. Enfin, visiblement tu es le seul à ressentir de l'animosité pour quelqu'un ce soir puisqu'elle ne se souvient toujours pas de toi. Tu la regardes sans dire un mot, ne l'écoutant qu'à moitié et priant pour que la serveuse refasse son apparition.
Ah, enfin, les fils semblent se toucher là haut puisqu'elle se trouve sur la bonne voie. Tu lui adresses un sourire qui se veut ironique « bien joué, j't'ai jamais eu en cours mais je suis bien prof, tu percutes maintenant ? ». Elle semble totalement être à des lieux du bar dans lequel vous étiez réellement. Tu te demandes si elle remarquerait si tu partais maintenant sans rien dire. Tu l'imagines en train de continuer à parler seule, face au bar. Cette relation est tout de même spéciale puisque jamais tu n'as été foutu de lui demander la raison de sa colère. Tu t'es toujours contenté de répondre à ses piques, sans savoir qu'elle était leur origine. Au moment où elle reprendra ses esprits, où elle reconnaîtra ta face de russe mal luné, l'idée te vient de lui demander enfin la raison de votre relation conflictuelle.
Tes doigts tapotent nerveusement sur le bar, attendant impatiemment cette serveuse qui n'arrivait jamais.  

Il était mignon. Il avait l'air gentil. Mais il avait l'air d'être parallèlement un vrai connard, qui en avait rien à foutre des autres. Ou alors lui et moi on s'aime vraiment pas. Boarf, ça m'étonnerait pas tant que ça d'être autant en froid avec quelqu'un avec honnête, combien de fois j'avais clashé des gens parce qu'ils allaient pas dans mon sens ou parce qu'ils avaient fait des trucs que je ne supportais pas, genre en touchant à mes potes ou quoi ? Un peu trop souvent. Pis, j'suis une ancienne mather et les mathers ne sont pas tellement connus pour être les pros de la communication mais bel et bien parce qu'ils disaient ce qu'ils avaient à dire, ils défendaient leurs convictions et toussa, donc forcément c'est pas forcément très rose bonbon partout où on passe. Si ça se trouve ce mec.. nan franchement, faut que j'arrête de me faire des hypothèses de folie, c'est lui qui allait tout me dire. Ou alors fallait juste que j'espère avoir l'illumination à un moment donné, vous avez le mot clé ou paf l'attitude qui me rappelle pourquoi on pas se saquer. « Bien joué, j't'ai jamais eu en cours mais je suis bien prof, tu percutes maintenant ? ». Oh. Ouai. Ouai ouai, je reçois qui est ce monsieur au fur et à mesure. C'est un prof. D'Harvard. Et il s'est tapé Alexys. Ca devait être elle ou alors Keyla.. non pas Keyla, mais c'était quelqu'un de proche de moi donc ça devait être Alex. Oh doux jésus, ayé je remettais doucement les choses en place dans ma tête. Ooooh, mais t'es le russe là. J'aime pas les russes. Tous ceux que j'ai eu l'occasion de croiser ils se pensaient tous supérieurs aux américains et j'ai tellement envie de leur dire fuck off. Ah oui en effet toi et moi c'pas possible. dis-je avec une moue embêtée. C'est moche, t'étais pas dégeu à regarder, mais faut croire que Satan t'habite. J'haussais les épaules. Allez, vas picoler pour oublier ta condition. La bise. dis-je en m'éloignant.

Enfin, la voilà qui percute et qui évidemment, se souvient en premier lieu de ta nationalité. Pourquoi les gens se souviennent toujours de ça avant le reste ? De toute façon, ça t'importe peu. Tu continues de la toiser, un sourcil arqué, à écouter son monologue qui commençait déjà à être trop long pour toi. Elle feint un compliment puis te compare à Satan pour finalement te demander de te noyer dans l'alcool en s'éloignant. Tu ne peux t'empêcher d'étouffer un rire ironique. Les ravages de l'alcool.
Avant qu'elle se retourne tu lui réponds sèchement « c'est l'hôpital qui se fou de la charité, il m'semble que c'est pas moi le plus amnésique des deux ce soir ». Sans un mot de plus, tu reprends ta position initiale, accoudé au bar, attendant cette ultime commande qui semblait ne jamais arriver. Non mais sérieux, c'était quoi son problème ? Alexys ? Fallait qu'elle arrête par qu'elle ne connaissait ni les tenants, ni les aboutissants de cette relation qui avait été la vôtre. Entre toi et Alexys, tout avait été très clair depuis le début, vous vous étiez bien amusés et ça en était resté là. Mais va savoir pourquoi son bouledogue s'en été mêlé, décidant pour les autres que cette relation n'avait été consentante que de ton côté.
Elle vient juste de se retourner, tout comme toi, « tout ça pour une histoire de cul » lances-tu  dans le vide, comme si un interlocuteur t'écoutait patiemment de l'autre côté de ce bar.