Waves of Past

Le calme, la pression de l'eau. C'est l'envers du monde auquel on est habitué. Et c'est des plus plaisant et des plus relaxant. Plus besoin de penser, plus qu'à se laisser glisser. Le poids de la vie est amorti et allégé, les problèmes se tassent et partent en même temps que les cauchemars et les mauvais réflexes. Plus de passé. Plus de rien. C'est l'apesanteur.

Remontant à la surface, je stoppe la dérive de Jonathan qui se cognera bientôt la tête au bord de la piscine sinon. Les yeux fermés, il n'a pas sembler constater cette éventualité. Doucement, je me moque à savoir s'il a ou non envie de tester si sa crinière amortira ou non le choc que ça pourrait créer. Je ne crois pas que ce soit le cas et ma réplique me vaut un sourire de sa part. Si ce que je dis peut parfois être mal pris, là ça ne semble pas être le cas. Un vague mouvement de tête et il semble réaliser à quel point le mur de béton est tout près. Je ne sais pas si c'est cette constatation, mais sa planche coule et j'ai un mouvement pour le repêcher, mais il se relève tout seul. C'est un grand garçon, il peut nager tout seul. Ma pensée m'amuse et mon sourire s'élargit quelques peu. Seulement, ça ne reste que quelques secondes quand je réalise à quel point il est tout près. Un pouce et demi, deux gros maximum. Un peu trop près. Plus que ce que j'endure habituellement quand il est pas question de corps à corps. ...ou y'a Blondie qui fait exception à la règle. Imperceptiblement, et très tranquillement, je me recule, à peine, juste assez pour laisser un espace un peu plus respirable. Et le voyant qui me fixe, je penche légèrement la tête sur le côté.

- Ça va où tu veux rentrer? m'enquis-je.

Ça fait quelques temps qu'on est là. Et faudra penser à aller se coucher, mais rester dans la piscine un peu plus longtemps… pas besoin de me tordre un bras pour que j'accepte l'idée.

Maintenant qu'il s'est redressé - juste un peu trop près - je lui propose de partir, aller dormir. Il m'avoue avoir froid et donc aussi que ça commence à être tentant. Faudra aller se reposer oui. Lui il a son trajet en avion, moi celui en camion.

- Je suis fatigué, avouais-je. Juste que je ne le sens pas réellement. Pas pour l'instant.

J'ai moins de force, probablement moins de précision et je suis sûrement plus lent dans mes réactions, mais puisque je suis dans la piscine, je ne le sens pas. On pèse moins lourd dans l'eau, déjà, alors ça fait de moins à endurer. Et la température de l'eau m'aide. Une fois sorti, par contre, si j'arrête cinq minutes pour me poser, probablement que ça va me tomber dessus comme une cargaison de briques. La fatigue accumulé se fera sentir et je ne mettrai pas long à m'endormir. Faudra que je penses à mettre mon cadran si je veux me réveiller à l'aube, d'ailleurs.

Je tique lorsqu'il m'avoue avoir peur. Peur de quoi? Y'a pas de monstres sous le lit. Et si c'est du noir, il peut laisser une lumière allumée. Sinon… Oh. Cauchemars. Plus aléatoires comme résultats. C'est difficile à gérer. Je le sais parce que j'en ai longtemps eu et parce que Blondie est au prise régulièrement avec ça. C'est ce qui fait qu'elle squatte mon lit à tout moment. Apparement, ma présence la calme et l'aide à se rendormir plus calmement, sans se réveiller à nouveau jusqu'au matin. Je lui sers de Teddy Bear humain, quoi! J'hoche la tête quand Jonathan suggère pour lui-même de laisser la télévision allumée.

- La radio aussi, ça peut être une idée, ajoutais-je doucement.

Dépendamment de ce qui joue sur les deux. Je suis pas certain que ce qui passait tantôt soit le mieux pour sa cause. Quoi que, s'il arrive à s'épuiser… C'est sa vie, j'ai pas besoin de détails.

- Oui, on y va, confirmais-je en m'approchant du bord, joignant la parole au geste.

Les mains appuyées sur le bord, une traction et je m'extrais de l'eau.


Grossièrement séché et épongé, j'ai enfilé ma veste et on a parcouru le chemin en sens inverse. Couloirs, hall, ascenseur, couloir… Le sol me parait simplement un peu plus froid qu'à l'aller. Signe que la fatigue me gagne rapidement. Les draps seront particulièrement confortables. Arrivé à la chambre du brun, il me salue, mais je vois bien qu'il est peu enclain à s'enfermer tout seul. Un avant-bras appuyé au cadrage de porte, je pousse un léger soupir. Je sais pas si je vais regretter dans quelques minutes ce que je vais dire.

- T'as besoin que je reste? demandais-je.

J'ai pas envie de jouer les calinours, seulement il a dit avoir peur de se claquer encore une série de cauchemars suite à la médicamentation qu'il a pris dans la journée. Allez savoir comment un truc qui le rends amorphe peut créer des cauchemars. C’est la même chose avec certaines drogues que des amis de ma mère prenaient. Presqu’euphorique pendant quelques heures puis l’envers complet du décor et limite si c’était pas crise de panique et paranoïa. Combien de fois j’ai dû aller en porter en désintox ou à l’hosto? 'Fin bref...

Si la télé peut l'aider, le fait que je dorme dans sa suite devrait aider aussi. Et ça, ça reste encore dans mes cordes. On peut la laisser allumée aussi, ça ne me dérange pas. Je suis habitué à pire comme boucan. Faudra juste penser à changer le poste, parce que c'est pas vrai que je vais que je vais me claquer la série des Bleu Nuit pour dormir. Déjà que ça m'intéresse pas quand je suis tout seul, j'irai pas endurer quand on est deux dans la pièce! Si je peux avoir un minimum de contrôle sur le bruit ambiant, c'est certainement pas celui que je vais choisir. Sinon, si Jonathan doit se réveiller en pleine nuit, je serai pas loin. Ça devrait être ça de gagné pour lui.

Il part se changer dans la salle de bain et je m'installe sur le canapé, rapatriant un ou deux coussins pour me permettre de me caler la tête et le haut du dos. J'ai accroché ma serviette pour lui permettre de sécher, mon maillot est encore humide et ma veste l'est vaguement aussi, mais avec un drap ça devrait être correct. Ou une fois qu'il dormira j'irai me changer. Si je reste éveillé jusque là.

Lorsqu'il sort, il a l'air ...découragé? Scandalisé? Mais il argumente pour que je ne dorme pas où je me suis encore assis.

- Va dormir, Jonathan, lui répondis-je simplement avec un signe de tête en direction de son lit. J'ai connu pire.

Je dépasse du divan, et alors? Y'a un rebord que d'un côté, je m'étendrai les jambes sur une chaise et puis voilà.

Dans le lit de bébé ours? Je le regarde un instant sans comprendre avant de lentement faire une possible connection avec un vieux conte pour enfant. C'était quoi déjà cette histoire? J'essaie de me rappeler, mais comme ça faisait pas parti de mes contes préférés quand j'étais kiddo… je sais plus. De ce que je comprends ça reste que je suis trop grand pour le petit canapé. J'ai vu ça tantôt, j'y était installé. Ça m'empêchera pas pour autant de dormir. Au moins, je peux encore m'allonger les jambes, c'est pas comme dormir sur la banquette du camion où t'as les deux portes qui délimitent l'espace.

Allez savoir ce qu'il a en tête quand il s'approche, mais il ne semble pas réaliser que tout son matériel électronique est encore au sol. Lorsqu'il réalise cependant, c'est l'acrobatie totale, sans trop de grâce. Si j'ai l'habitude de rattraper Miss Catastrophe quand elle se prend les pieds dans les fleurs du tapis, j'ai le même mouvement pour Jona. Sauf qu'il perd l'équilibre et m'atterrie dessus à peine ais-je le temps de saisir son bicep pour essayer de le maintenir sur ses pieds. Sans grand résultat. J'étouffe un grognement sourd, contractant les abdos en réponse au choc de son corps sur le mien. À deux poils près, je testais ses lèvres là! Il se confond en excuse et je me contente de soupirer tandis qu'il tente de se relever.

- Ça va.

C'est pas comme si il pesait 14 tonnes ou qu'il m'avait fait mal. Le regardant, j'attends qu'il bouge et s'enlève totalement.

Il est encore à moitié avachi sur moi après être tombé. Le choc n'a pas été particulièrement fort et la surprise y était pas non plus puisqu'à le voir faire ses acrobaties pour éviter le portable, c'était assez évident que ça finirait par quelque chose du genre. Lorsqu'il se relève les mouvements sont lents. Je sais pas si c'est parce qu'il veut éviter un mouvement brusque pour ne pas retomber ou parce qu'il a peur de m'accrocher, mais… prends ton temps mec, hen!

Il finit par stopper ses excuses à répétition, m'assurer qu'il va bien et se redresser. Sans pour autant s'éloigner. Il reste près du canapé où je suis allongé et… Et me demande de ne pas dormir là. Je m'en fou qu'il soit pas assez long et que je dépasse d'un peu partout. Les coussins et l'assise sont confortables, alors ça va. Et je bouge presque pas en dormant. Au pire des cas, une main au sol et le compte est bon pour que je ne tombe pas. Pour l'heure cependant, j'ébouriffe plutôt la tête à portée, un peu pour l'emmerder. Un sourire en coin pour le rassurer sur mon état s'il en besoin.

- Va dormir.

Je serai là si tu fais un cauchemar. J'ose seulement espérer que je me ferai pas vriller les tympans.