ARTUR MORDACHOV ► Dawid Auguscik

Quatre frères, quatre personnalités, un même nom. Mordachov, nom d'un père aimant mais surtout absent, il n'en était pas moins un pilier pour notre famille. C'est un homme que j'ai toujours admiré tout comme mes grands frères. Des portraits crachés de bourgeois russes avec un avenir radieux devant eux. Ma mère aurait tellement aimé avoir un dernier enfant de sexe féminin, raté, je suis arrivé comme un cheveu sur la soupe après 3 gaillards nommés Pyotr, Zakhar et Feodor. Ce qui nous fait 4 modèles masculins différents, je crois qu'ils n'ont jamais compris à quel point la pression était forte pour moi, le dernier, le bébé, l'ado permanent. J'essaie de me détacher de tout ça, d'être une personne à part entière, de faire aussi bien ou mieux que les autres. Enfin, je m'en persuade.

Je n'ai pas eu le droit à l'erreur, jusqu'à ce que j'entre à l'université. Je n'étais plus enfermé dans la peau du "fils de". Je me souviens encore des paroles de Pyotr juste avant mon départ « Tu as finalement la chance de briller par toi même Artur, profite. Ces années passent tellement vite » Depuis, je prends son conseil à la lettre. Bon élève, mais totalement immature et imprévisible, on m'aime mais on me déteste tout autant. Une seule ombre au tableau, la présence omniprésente de Zakhar, même au sein de ma propre confrérie.

Au fond de moi, la relation entre lui et Alexys ne me déplaît pas, la frontière Mathers/Eliot s'est depuis apaisé. Mais je connais mon frère, presque mieux que n'importe qui, tout aussi imprévisible et solitaire que moi, tout ne pouvait pas être rose. C'est à cette période que nous avons appris la maladie de père. Choc. Mère est la première personne à qui j'ai pensé. Il n'en fallait pas plus pour voir la famille Mordachov de nouveau réuni au pays. J'étais le premier sur place de ce dont je me souviens, mère restait forte devant nous tous, je ne pouvais m'empêcher d'imaginer ce qu'il se passerait si elle se retrouvait seule. Nous étions tous partis, loin pour la plupart d'entre nous. J'ai vu Pyotr et Zakhar signés une paperasse énorme, j'ai vite compris qu'il s'agissait de la société et que je n'étais pas convié aux discussions. La décision de quitter Harvard s'est faite naturellement, l'université de Saint-Pétersbourg ne me plaisait pas comme la belle américaine, mais cela me semblait évident de revenir auprès de mes proches. Rien ne m'attendait là-bas, comparé à d'autre.

La mort de père arriva bien trop vite, même si les diagnostics n'étaient pas encourageant, personne ne se fait à l'idée de voir partir un être cher. Notre pilier n'était plus. Je n'ai plus les mots pour décrire tous les sentiments qui m'ont traversé à cette période. Malgré tout, la société devait perdurer et finalement j'étais bien heureux d'avoir ce poids en moins sur les épaules.

J'étais content de recevoir des nouvelles des mathers et surtout d'Alexys via les réseaux sociaux, nous parlions comme si je faisais toujours parti des leurs. Sauf que bien tôt, c'est le comportement de Zakhar qui m'alerta. Je le sentais distant, préoccupé, il se noyait dans l'administratif de la société sans plus voir autre chose.

Extrait de la fiche de Zakhar a écrit:
« Arrête de me prendre pour un con Zakhar, je sais que Alexys n'est pas qu'une histoire de cul ! Tu ne serai pas en train de lui écrire des lettres si elle n'était qu'une passade sexuelle.. sauf que tu n'arrives pas à te décoller de ton trône d'Eliot parfait ! Alexys était l'histoire de ta vie Zakhar... » Je m'approchais de lui, le toisant d'un regard méchant.  « Et toi l'histoire de ta vie c'est d'être con, alors reste la dessus et laisse moi tranquille Artur ! » Il ne semblait pas bougé, ses yeux étaient planté dans les miens.. il jouait à quoi au juste ? Il voulait vraiment que l'on en vienne aux mains ? Je serrais les dents. « Tu vois comment ça t'énerve quand on aborde le sujet Alexys.. tu n'es même pas foutu de reconnaître que tu es fou amoureux de la vice-présidente Mather, putain mais c'est grave ! » Je me mordais la joue, il essayait simplement de me mettre hors de moi, Artur était comme Alexys : il me faisais bouillonner sur place.. il arrivait toujours à piquer où il ne fallait pas. « Merde ! Merde Artur ! Qu'est-ce que tu voulais que je fasse ? Tu voulais que je reste à Harvard, que je dise fuck à notre père, fuck à Pyotr... J'ai des devoirs familiales moi, contrairement à toi ! Je n'avais pas le choix que de quitter Alexys, père à besoin de moi, la société a besoin de moi. »

Tiens, prends ça dans ta gueule Artur, tu sers qu'à pousser tout le monde à bout. Mais j'avais raison et il a fini par le comprendre. Il est reparti à Harvard peu de temps après.

Aujourd'hui c'est mon tour de retrouver les states, mère va bien, ou mieux en tout cas je m'en suis assuré avant de partir.
Et puis ouais, vous m'avez manqué.

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