CAMERON ELLIS ► stephen curry

« Vous êtes sûr que c’est la bonne décision ? » demanda le jeune Ellis à son professeur d’université qui l’avait toujours poussé à se surpasser. Le vieil homme acquiesça, se levant de son bureau, faisant des pas dans son bureau comme s’il s’apprêtait à lui confier quelque nouvelle grave. « Tu deviendras un grand cardiologue Cameron. Mais ce n’est pas ici que ta carrière prendra son envol. Je sais que c’est dur de quitter ses repères, mais tu acquerras de nouvelles compétences là-bas pour parfaire ta formation. » Mais il sentait bien que le jeune homme était sceptique parce qu’il avait toujours souhaité rester ici pour veiller sur les siens. Pourquoi aller à Harvard, alors qu’ils ne manquaient de rien là-bas ? « Des cardiologues, il y en a des milliers là-bas. » Ce à quoi son professeur rétorqua immédiatement : « Dont tu te distingueras. Tu peux devenir le meilleur, et tout le monde ici sera fier de toi. Ca ne veut pas dire que tu ne reviendras jamais. Même si je ne souhaite pas te voir revenir. » Cameron ne se vexa pas à la dernière provocation de son mentor parce qu’il savait qu’il ne lui souhaitait que du bien. Dès sa première rencontre avec lui, il avait su qu’il apprendrait beaucoup. L’homme l’avait pris sous son aile à son arrivée à UCLA alors qu’il venait de Trinité et Tobago. Il avait été impressionné par le dévouement de ce garçon et de son acharnement à faire de la vie des gens, une vie meilleure. Il avait vu en lui le fils qu’il aurait voulu avoir. Aussi, il ne pouvait que le remercier en l’envoyant là où il pensait que sa carrière prendrait son envol. « Merci M. Banks. » Il lui serra la main et quitta le bureau du professeur, pas forcément rassuré, mais reconnaissant. Parfois, il songeait aussi à ses adieux à ses terres, et elles lui manquaient inévitablement, mais par ambition, il se devait de songer à faire des sacrifices. Au fond, c’est ce qu’il avait toujours fait.

Il avait sacrifié son image des années en arrière quand il était sorti avec Naya. Elle était belle comme le jour avec ses longs cheveux noirs ébène et son sourire radieux. Elle était un peu délurée comme fille et c’est ce qu’il appréciait chez elle. Ils avaient passé plus d’un an et demi ensemble, provenant tous les deux de la même bande d’amis. On disait d’eux qu’ils formaient un couple inséparable, qu’ils se marieraient et qu’ils auraient de beaux enfants. Lui se voyait bien l’épouser juste parce qu’elle le rendait heureux et qu’il avait l’impression qu’elle était épanouie à ses côtés. Il s’était apparemment trompé. Il était rentré un soir dans le petit appartement qu’il partageait, sans faire de bruit, un gros bouquet de fleurs plein les bras, mais il s’était vite aperçu qu’elle n’était pas là. Toutes les lumières étaient éteintes, et l’appartement ne donnait pas signe de vie. Il ne trouva aucun mot sur le frigo ou sur la table pour l’avertir, et manque de chance, elle avait oublié son téléphone portable. Si d’ordinaire il ne s’intéressait pas à ce qu’il pouvait trouver dans le téléphone de sa copine, ce soir-là, il fouilla. Plus inquiet que méfiant, il parcourait les derniers messages à la recherche d’un indice sur l’endroit où elle se trouvait. Dans les messages qu’elle envoyait à sa meilleure amie Naomi, il ne trouva rien. Mais un nom particulier attira son attention : ‘Olivia’. Il n’avait pourtant jamais entendu parler de cette fille, et ayant les mêmes amis, sa curiosité fut poussée à l’extrême et il commença à lire les messages ses yeux s’écarquillant toujours plus. Sa petite-amie semblait éprise de cette femme, dont les écrits étaient toujours plus sensuels plus aguicheurs. Elle parlait de lui faire l’amour, de tout quitter l’emmenant avec elle. Remontant toujours plus haut, il tomba sur une photo de sa copine et d’un homme. Et c’était Olivia qui avait envoyé ce fichier. La légende affichée en dessous lui hérissa le poil : ‘Le bonheur, c’est toi et moi.’ Olivia était donc un homme, le nom était une couverture. Cameron ne savait pas quoi faire. Il n’avait pas envie d’en parler de toute façon. Il quitta la maison pour réfléchir. Ce qu’il ne savait pas, c’est que ces messages n’étaient pas récents, que bien que Naya ait fait une erreur en tombant dans les bras d’Oliver, elle lui avait expliqué qu’elle ne comptait pas quitter Cameron pour lui et qu’il devait l’oublier. Mais les conversations téléphoniques ne sont pas enregistrées. En ce moment-même, Naya passait une soirée avec Naomi, sa meilleure amie. D’ailleurs, quand elle revint à la maison et qu’elle ne trouva pas son petit-ami, elle l’appela. Au bout de trois sonneries, il décrocha : « Bébé, t’es où ? » Il ne répondit pas tout de suite. Puis, il lui lâcha sans aucune émotion : « C’est terminé. Toi et moi c’est fini. » Il raccrocha. Elle essaya de le rappeler maintes fois, sans comprendre, mais il ne décrocha pas. Le lendemain, Naomi vint s’acharner sur lui à le traiter de tous les noms d’oiseaux. Elle ne savait pas. Mais il ne dirait rien. Il s’envolait pour l’UCLA.

Le voilà maintenant à Harvard, sans se douter que son passé finirait par le rattraper, car si Naya n’y est pas. Sa meilleure amie, elle, est bel et bien là. S’il compte devenir cardiologue, Cameron pourrait voir ses plans soumis à une adaptation.