NUMA JONES ► Zoe Kravitz

J'pense pas que ma vie intéresse grand monde, à vrai dire j'ai pas grand chose à raconter si ce n'est comment j'ai débarqué là et pourquoi. J'ai toujours été, à l'école, une petite fille très soigneuse des détails, très perfectionniste et très ambitieuse. D'ailleurs mon père voyait toujours une futur chirurgienne et vétérinaire (il avait vu plusieurs voyantes pour confirmer ma 'destinée', inutile de vous dire que c'était du pipeau.). Moi j'ai jamais aimé disséquer les animaux, j'aimais bien les caresser mais sans plus et ça il le comprenait pas. Mais un jour, il a eu le malheur de m'offrir une guitare (sois disant parce que j'avais bien travailler), je ne vous mens pas, je suis tombée amoureuse de cet instrument. J'ai appris toute seule parce qu'à la base, mon père voulait que je m'amuse et pas que je lui fasse dépenser des sommes astronomiques pour prendre des cours. J'me suis bien débrouillée, je farfouillais des partitions ça et là et au final j'me suis pris d'une véritable passion pour cette chose. Au début mon père trouvait ça mignon, mais au fur et à mesure il s'est rendu compte que j'en devenais carrément obsédé et ça le rassurait pas de savoir que je pourrais finir ma vie à faire des concerts sur une scène devant une tonne de monde. Je vais vous passer les détails sur ô combien lui annoncer que je voulais faire des études de musique l'ont détruit et même si ma mère m'encourageait et était plutôt indifférente face à la colère de mon père j'étais destinée à échouer tout ce que j'entreprenais. Mais j'me suis accrochée, j'ai pas baissé les bras, j'voulais même le top du top pour étudier, j'voulais que mon talent soit reconnu que je puisse jouer librement et chanter aussi, j'adorais ça, les deux ensemble c'était mon Nirvana.
Alors on a coupé les ponts avec mon père. J'avais beau lui dire que j'men fichais des vétos ou chirurgiens, qu'ils pouvaient bien faire c'qu'ils voulaient, c'était pas ma voie. Mais lui il voulut rien entendre.
Mon objectif c'était Harvard. Oui j'visais haut, oui j'en avais conscience mais c'était le prix à payer. Des sommes exorbitantes à débiter pour un semestre, je savais que j'allais en chier. Alors même à Johannesburg je me produisais sur des petites scènes les week end, j'économisais, ma mère complétait sans le dire à mon père qui m'l'avait toujours pas pardonné ça. Et les sous commençaient à s'accumuler et dès que j'en eu assez ce fut le départ, la vraie rupture quoi. Ca m'a toujours foutu la boule au ventre le visage stoïque de mon père quand j'ai pris l'avion direction les Etats Unis alors que ma mère essuyait ses petites larmes avec son mouchoir en agitant sa main dans ma direction. Pourtant j'ai pas pleuré, je le voulais vraiment ça. J'voulais vraiment avoir ma chance, j'ai toujours été brillante dans mes études, pas d'échecs, rien, j'avais le niveau. J'voulais montrer à tout le monde de quoi j'étais capable. Et j'allais le faire. Et j'lavais fais.