Une consultation particulière... (PV Talya)

La salle d’attente débordait. Le pédiatre senior du service avait été appelé pour une urgence au bloc et du coup les consultations avaient pris un retard monstre. Le chef avait donc fini par me renvoyer là bas, me chargeant de commencer les consult sans lui, craignant que le nombre de petits patients à examiner ne finisse par être ingérable. J’arrivai donc dans la pièce où les enfants patientaient accompagnés de leurs parents, j’attrapai la liste que me tendait l’infirmière et appelai le prochain nom : « La petite Charlie Blackburn. » Je ne réalisais d’abord pas que ce nom pouvait me paraître familier, me dirigeant vers la salle d’examen. Ce ne fut qu’une fois assis derrière mon bureau que je relevai les yeux vers ma petite patiente et surtout vers la jeune femme qui la tenait dans ses bras. Je restais un instant scotché d’étonnement devant la petite blonde qui me faisait face : j’avais déjà vu cette demoiselle, et dans des circonstances tellement différentes… C’était la dernière personne que je m’attendais à recroiser ici, dans un service de pédiatrie, un bout de choux dans les bras. Elle était donc maman ? « Talya ? » fis-je me rappelant soudain du prénom de la jeune femme.

Il n'était pas impossible d'être étudiante et maman en même temps et pourtant bon nombre de jeunes ne pouvait pas le concevoir. J'étais maman et une étudiante comme les autres. Je ne criais pas sur tous les toits mon statut mais ne le cachait pas non plus si on me le demandait. Cependant, il était fort inutile en soirée d'aller dire que j'étais maman alors que je voulais simplement être une jeune femme comme tout le monde qui profite de la vie grâce à des parents très présents qui s'occupent à merveille de ma petite Charlie lorsque j'ai besoin de vivre ma vie à moi. Malgré cela, j'assure et j'assume mon rôle c'est pourquoi je tiens à emmener ma fille à ses visites de contrôle et pas que ce soit ma mère même si je lui porte une confiance aveugle. Aujourd'hui était le jour de cette consultation et en arrivant j'avais bien cru que je ne passerais jamais au vu du monde mais j'avais rendez vous et en moins de temps qu'il ne faut pour dire ouf on m'appelait déjà. Prenant toutes mes affaires je filais vers la salle où le médecin m'attendait pour finalement m'assoir en face lui. Lorsqu'il prononça mon prénom je levai les yeux et sentis le rouge me monter aux joues. Mon dieu, le médecin de ma fille était un homme avec qui j'avais légèrement passer une soirée bien arrosée à rigoler et se "dragouiller" c'était la meilleure. Tentant de me reprendre je finis par lui dire: « En personne ! J'étais loin de m'imaginer te revoir ici Priape ! » S'il avait du mal à m'imaginer mère vue son visage surpris j'avais du mal aussi à le voir comme docteur comme nous nous étions rencontrés dans des circonstances complètement différentes.

L’espace d’un instant, je m’étais demandé si ma mémoire ne me jouait pas des tours, après tout je n’étais pas à jeun lors de notre rencontre, peut être avais-je mal reconnu la blondinette qui me faisait face. Mais elle confirma mes soupçons. Mon regard parcourut alors le dossier devant mes yeux, histoire de m’assurer du lien de parenté qui liait la jeune femme et la petite patiente dont j’allais devoir m’occuper. Peut être s’agissait-il de sa petite sœur ? Mais non, le dossier de la petite puce confirma que Talya était belle et bien sa maman. Un cas loin d’être isolé, bien des étudiants et étudiantes du campus conciliaient études et vie familiale avec brio. D’ailleurs, cela m’avait toujours particulièrement impressionné. Ma dernière rencontre avec la blondinette avait eu lieu dans des circonstances tellement différentes que chacun de nous paraissait complètement surpris de faire face à l’autre. Bien sur, en soirée, je n’avais pas l’habitude de parler de mes études médicales, préférant profiter du moment pour décompresser et m’amuser, surtout lorsque j’avais la chance de faire la connaissance d’une aussi charmante jeune femme telle que Talya. « Je suis en 6ème année, j’assiste le pédiatre chargé des consultations aujourd’hui. » expliquai-je alors que la jeune femme me faisait part de son étonnement. « Il est parti au bloc opératoire sur une urgence, il m’a demandé de commencer l’examen de Charlie. » ajoutai-je avant de préciser : « Mais si ma présence te gène et que tu préfères, on peut aussi attendre qu'il revienne… »

Et voilà, cela n'allait faire qu'une personne de plus qui ne me verrait plus du même oeil... Priape venait de découvrir que je n'étais pas une simple étudiante qui sait s'amuser et tout lâcher, tout oublier certaines fois, il venait d'apprendre que j'étais aussi une jeune maman d'une petite crevette de quatre mois bientôt et que j'assumais parfaitement mon rôle. En soirée, je ne marquais pas sur mon front que j'étais mère mais je ne le cachais pas non plus. Ma gêne actuelle venait plutôt du fait qu'il apprenne mon statut comme cela, sans que je ne lui dise réellement mais plus par coïncidence. « Ne t'inquiètes pas ça ne me dérange pas du tout ! Si il a confiance, j'ai confiance et puis c'est simplement un bilan de routine ! » Charlie n'était pas malade ni rien, elle avait juste comme tous les bébés des visites de contrôle et ça en était une. Je n'allais donc pas faire un scandale auprès du médecin s'il ne revenait pas avant la fin de l'examen, Priape était pleinement capable de voir si elle était en pleine forme ou non. « Tant que toi ça ne te gêne pas que ce soit moi la mère du petit bout de chou que tu vas examiner, et que tu ne poses pas de questions gênantes sur notre dossier à toutes les deux, ça me va... » Je ne savais pas si toute notre histoire était marquée dans le dossier, il était probable que le décès du papa le soit... Et je n'avais pas vraiment l'envie d'en parler. D'ailleurs après avoir lancé cette petite phrase qui aurait pu jeter un vent, je pris la peine de lancer une petite vanne pour détendre le tout : « Attend, tu devrais me faire sentir ton haleine pour que je vérifie qu'il ne te reste pas des grammes de la veille... J'ai un avantage sur les autres, c'est que je sais qui tu peux être une fois ta blouse quittée! »

J’avais proposé à la jeune maman d’attendre que le senior revienne pour pratiquer l’examen, peut être serait-elle plus à l’aise avec le vieux médecin... Mais Talya me rassura sur ce point, elle avait confiance puisque mon chef m’estimait capable. Un petit sourire flatté apparut sur mon visage. Je me levai donc et m’avançai jusqu’au lavabo pour commencer à m’y laver les mains, écoutant la suite des paroles de la jeune femme. « Tu sais que je suis tenu au secret professionnel… » la rassurai-je alors qu’elle évoquait son dossier et les informations qui pouvaient s’y trouver. « Et je te promets de m’en tenir aux questions nécessaires à son suivi. » Bien sûr, j’avais d’autres questions, comme par exemple y’avait-il un père présent pour la petite Charlie ou encore Talya avait-elle un homme dans sa vie. Mais c’était le genre de choses que je ne voulais pas apprendre en fouinant dans le dossier médical de sa fille, ce ne serait pas correct de ma part. « Y’a des antécédents particuliers dans ta famille ou dans celle du père ? Maladies héréditaires, malformations, diabète ? » énumérai-je brièvement tout en me séchant les mains. Je m’approchai ensuite de la jeune femme pour prendre la petite dans mes bras lorsqu’elle me lança une petite pique. Un sourire amusé étira mes lèvres. Je n’allais pas me laisser déstabiliser par la blondinette, même si à cet instant précis j’étais plus qu’heureux que mon chef ne soit présent dans le bureau… « On devrait peut être même demander une prise de sang pour doser mon alcoolémie non ? C’est plus fiable que de se fier à mon haleine… Et puis au passage, on demandera à l’infirmière de te prélever aussi, je crois me rappeler que la dernière fois qu’on s’est croisés tu n’étais pas beaucoup plus sobre que moi… » Elle avait lancé les hostilités, je ne pouvais pas m’empêcher de riposter à mon tour.

« Le secret professionnel est une bonne chose mais ça ne t'empêcherait pas de poser des questions... » Je le regardai haussant un sourcil, s'il demandait, je n'étais pas sûre de lui répondre, une chose serait sûre cependant c'est que tout ce qu'il saurait sur moi ne pourrait pas sortir d'entre lui et moi, merci le secret professionnel. « J'apprécie d'ailleurs que les questions restent médicales ! » Cette fois il eut le droit à un sourire avant que je ne continue : « A ce que je sache, tout le monde va parfaitement bien dans ma famille et dans celle du papa il n'y avait pas de souci non plus. » Le passé était approprié, après, allait il comprendre cela dans le sens où nous n'étions plus ensemble ou dans le sens qu'il n'était plus de ce monde, je n'en savais rien à moins que mon statut de veuvage soit indiqué dans le dossier auquel cas la question ne se posait plus. « Je pense que la piqûre est une super idée surtout maintenant que tu as ma fille dans les bras! » Je le charriai, si j'avais eu le moindre doute j'aurais demandé à attendre le médecin en chef. « Tu peux demander à Charlie, maman s'occupe très bien d'elle même quand elle a passé une soirée très arrosée la veille... Et lorsqu'elle en est incapable, ce qui a du arriver une seule fois, mamie prend le relais. » Je n'étais pas une femme inconsciente qui ne s'occupe pas de sa fille parce qu'elle sort cependant, j'aimais bien m'amuser quand même et faire ce que tous les jeunes font : boire et faire la fête. Cela m'aidait aussi à passer outre le passé. « Mais insinues tu que j'avais un peu trop bu la dernière fois ? Non parce que quand j'ai trop bu il est difficile de se défaire de moi... » J'avais l'alcool séducteur, tendre, alors il devait s'en souvenir si il m'avait croisé la dernière fois, à moins que je ne me sois retenue avec lui, comme grâce à un genre d'instinct.

Visiblement, il y avait vraiment une partie de son histoire que Talya ne voulait pas aborder, chose que je respectais. Après tout, nous ne nous connaissions que très peu. J’essayais donc d’instaurer la confiance en lui rappelant que j’étais tenu au secret médical et que je ne m’en tiendrais qu’aux questions strictement médicales. D’ailleurs, lorsque je l’avais interrogée sur les antécédents familiaux de sa fille, la réponse concernant la branche paternelle, réponse au passé, m’apprit déjà que le père n’était plus dans sa vie d’une manière ou d’une autre. Je pris le nourrisson dans mes bras et je m’avançai jusqu’à la table d’examen. « Elle est bien tonique » fis-je en remarquant aussitôt que la petite fille tenait bien sa tête. Après l’échange de piques sur nos déboires respectifs lors de la dernière soirée, la jeune maman me rassura sur le fait qu’elle assurait son rôle dans tous les cas et qu’elle recevait également l’aide de sa propre mère. Deuxième info indirecte me confirmant que la blondinette devait élever Charlie seule, ce qui doubla mon admiration pour la jeune femme. Etre mère et étudiante était une chose mais lorsqu’en plus on devait tout gérer en tant que mère célibataire c’était encore plus compliqué. La deuxième remarque de mon interlocutrice à propos de la soirée où nous avions fait connaissance ne fit qu’accentuer mon sourire amusé. « Je crois que tu avais vraiment trop bu oui, et je confirme pas facile de se défaire de toi en effet… » Surtout que je n'avais pas eu spécialement envie de me défaire d'elle à ce moment là. Se faire aborder par une aussi jolie fille que Talya avait quelque chose de flatteur. J’avais bien vu alors qu’elle avait trop bu, je n’avais pas voulu profiter de la situation, ce qui ne m’avait pas empêché de passer un bon moment avec elle. Reprenant mon sérieux et ma concentration à l’égard de ma petite patiente, j’attrapai mon stéthoscope. « Attention Charlie ça va être froid. » fis-je à la petite avec douceur avant de glisser le pavillon sur son petit torse sous son body pour écouter son cœur et ses ausculter ses poumons. Je retirai ensuite les embouts de mes oreilles et tournai la tête vers Talya. « L’auscultation est parfaite. » l’informai-je avant de poursuivre l’examen.

« Ma fille est parfaite, tonique, éveillée, calme… Elle confond juste un peu le jour et la nuit parfois… » C’était mon esprit de maman qui parlait. Et oui quelle maman digne de ce nom n’aurait pas dit qu’elle trouve sa petite parfaite ? Pas moi en tout cas. «  Elle est en pleine forme alors ? » Je ne doutais pas que ma fille soit en pleine santé ou du moins qu’elle reçoive de bons soins, on pouvait me reprocher de sortir parfois de profiter de ma jeunesse mais en aucun cas de mal m’occuper de ma fille. Cependant, elle pouvait avoir des choses qui m’aient échappées, des petits soucis médicaux qui ne sont pas visibles par n’importe qui. Là, plus suspendu aux lèvres et aux paroles de Priape qu’à ses beaux yeux comme j’avais pu l’être lors d’une soirée précédente à ce qu’il avait l’air de dire, j’attendais qu’il me rassure. Lorsqu’il eut enfin dit les quelques mots rassurant, je pus le réattaquer sur notre précédente rencontre. « Si je me souviens bien, tu n’as pas réellement essayé de te défaire de moi… » Je le regardai lui lançant un petit regard malicieux, alors le médecin, qu’allait-il trouver à dire à cela ? Et oui, j’avais mon caractère bien à moi, je n’aimais pas être caractérisée comme la grosse dragueuse mais je pouvais aimer séduire parfois, surtout en soirée, sauf que j’aimais aussi qu’on reconnaisse qu’on était bien content que j’eus été là.

Talya vantait les mérites de sa fille, c’était touchant de voir combien la jeune maman était fière de sa fille. Elle évoqua néanmoins les nuits agitées. « Elle fait la fête la nuit ? Comme sa maman quoi… » la taquinai-je avant de reprendre mon rôle d’apprenti pédiatre en interrogeant la jeune femme plus sérieusement : « Tu lui prépares quelle quantité et quel type de lait et elle boit combien de biberons par jour ? » On ne sait jamais, peut être que d’augmenter un peu les quantités ou changer de marque pourrait éluder le problème et permettre à la mère et la fille de passer des nuits complètes et paisibles.  Je terminais par tester quelques réflexes du nourrisson. Plaçant une cible colorée devant les yeux de la petite Charlie, je testai sa vue vérifiant qu’elle fixait bien l’œil de boeuf dans ses mouvements. Je reposai alors l’objet. L’examen complet ne montrait rien d’anormal, je pouvais donc rassurer Talya. « Elle est en pleine forme en effet. » fis-je avec un sourire avant de reprendre la petite dans mes bras pour la redonner à sa mère. J’allais me réinstaller derrière mon bureau, histoire de noter mon examen et mes observations dans le dossier de ma petite patiente et pour rédiger ses ordonnances, lorsque la petite remarque de sa maman me fit relever les yeux. La blondinette n’avait pas tord du tout et un sourire amusé se dessina sur mes lèvres. Heureusement encore une fois que nous n’étions que trois dans cette pièce et que mon chef était toujours occupé au bloc opératoire… Les petits rappels de notre précédente rencontre auraient pu certainement me porter préjudice auprès du médecin senior. « Honnêtement, je ne vois pas pourquoi j’aurais voulu me défaire de toi Talya. Ta compagnie est plutôt agréable et une soirée est toujours plus intéressante quand on est bien accompagné… » Pourtant, nous n'avions pas dépassé le simple stade du flirt ce soir là, et heureusement dans un sens, sinon cette consultation ne se serait surement pas passée sans un certain malaise...

« Oui c'est ça je devrais peut être l'emmener avec moi ça la fatiguerait surement! » Je ris à sa remarque, la fille était déjà aussi fêtarde que la mère à son âge... Ca promettait! C'était d'ailleurs ce qu'il devait penser à son fort intérieur. « Elle est encore à cinq biberon de cent cinquante, je devrais la passer aux plus gros biberons et à seulement quatre bierons par jour tu penses ? » Je ne savais pas quoi faire pour que ma fille dorme mieux et j'espérais bien qu'il avait les réponses à mes questions car il n'était bien sûr pas question qu'elle vienne danser avec moi parce que oui, il me serait impossible d'en profiter comme j'avais pu le faire avec Priape par exemple, tout en restant sérieuse. « T'es tellement sérieux quand tu dis ça ! Ca doit être la blouse qui te rend comme ça ! Mais merci c'est gentil... » Indirectement j'avais eu le droit à quelques compliments, c'était toujours flâteur il fallait bien le reconnaitre. Charlie étant en pleine santé l'examen touchait à sa fin. « Pas utile d'attendre ton supérieur, on va pouvoir y aller non ? » Ce petit entretien allait toucher à sa fin, non pas que je passe un mauvais moment avec lui mais il y avait du monde dernier nous... Dommage car la compagnie de Priape était loin d'être déplaisante, peut être y aurait il une prochaine fois autour d'un café ou autre.