Andy McDougall ► Robbie Wadge

Je soupirai, refermant la porte du dortoir derrière moi et m'adossant dessus en fermant les yeux. Derrière la porte, j'entendais les autres enfants hurler, se taper, rire aux éclats. Je m'appelle Andy. En général, mon prénom fait rire et on se met à chanter les Rita Mitsouko. C'est ridicule, qu'ils refassent tous leur culture. J'ai treize ans, j'habite à Notting Hill, le quartier le plus chic de Londres, mais j'ai l'impression d'être dans un zoo à chaque fois que je vais en cours. Pourquoi crient-ils ? Les gens sont vraiment prêts à faire tout et n'importe quoi pour attirer l'attention. Je trouve ça triste d'en arriver à de telles extrémités, crier, pleurer, frapper ou rire trop fort pour qu'enfin, quelqu'un nous regarde. Moi, je n'en ai pas besoin. Quand je passe, les gens me regardent. Ils murmurent, je sais qu'ils ne m'aiment pas, et je m'en fiche. Contrairement à eux, j'ai une certaine présence, on me remarque, on me voit. En bien, en mal, peu importe, l'important c'est que j'existe dans les yeux d'autrui, ma famille tout particulièrement, alors je suis heureux. Et si ce n'est pas votre cas... et bien tant pis ?


« Plus tard, tu seras le meilleur, Trésor. » Je souris à ma mère. Ce sont le genre de paroles qui ont un effet étrange, puisque non seulement cela vous rend plus confiant, mais en plus, ça vous met la pression. Un véritable paradoxe hein ? On se dit que notre famille a vraiment confiance en nous, mais en même temps, qu'il ne faut pas la décevoir. J'ai appris à respecter les règles de vie de chez moi. Pas de saleté, on se déchausse toujours à l'entrée, on ne laisse rien traîner, on vérifie que la femme de ménage a tout fait correctement, on passe des heures et des heures sur son travail pour que tout soit toujours parfait. Les obstacles, on les détruit, les mauvaises ondes, on les repousse, les cafards, on les écrase. C'est aussi simple que ça, j'ai très vite intégré la leçon, il ne me restait qu'à la mettre en pratique. Et ça aussi, maintenant, je le fais bien. « Tu dois aller dans une école à la hauteur de tes compétences. ». Princeton, Harvard, Edinburgh... J'ai postulé dans diverses écoles pour des études en astrophysique, et j'ai été pris à Harvard. Ça a été un grand moment de joie pour moi. Mais une joie contenue ; je n'ai pas encore gagné, je ne suis pas diplômé d'Harvard, je ne suis pas astrophysicien. Je ne pourrai réellement me réjouir lorsque ça, ce sera fait.


J'ai fait mes mes valises, et je me suis envolé pour le Massachusetts, direction Cambridge. Pendant un certain temps, il m'a fallu le temps de m'adapter à l'accent Américain. C'est fou comme ces gens-là parlent mal, mais pour mieux les comprendre et qu'ils me comprennent davantage, c'était mieux d'adopter leur accent... Surtout si je voulais rester aux Etats-Unis par la suite afin d'avoir le meilleur travail possible. Havard est une université immense, malheureusement peuplée de gens cleans et travailleurs, mais aussi de grosses tâches qui ne s'effaceraient pas au lavage même avec Vanish, et les tâches s'évanouissent. Publicité mensongère, ces tâches-là ne tourneraient de l'oeil qu'au bout de la deuxième prise de coke. Ce n'était pourtant pas compliqué : les étoiles avec les étoiles, les tâches avec les tâches. A Harvard, les deux sont mélangés. Tu parles d'une brillante école.


Et puis, à mon arrivée aux Etats-Unis, j'ai fait la connaissance de ma fiancée. Ouais je suis fiancé. Et entre nous, une fiancée pareille... je m'en serais bien passé ! Mon père est un ami d'enfance, et pour leur bonne fortune à tous les deux, nos deux pères ont jugé bon de nous marier. Honnêtement, j'ai jamais eu l'intention de tomber amoureux, alors le mariage, je m'en tamponne les boulettes sur le coin de la table. Qu'ils me marient si ça les enchante. Mais au départ, j'étais censé me marier avec Mily. Mily Ravenswood. Je lui parlait souvent par le biais d'internet, quand nos parents avaient commencé à parler de mariage arrangé on avait voulu apprendre à se connaître. Le courant passait bien... et puis elle est décédée. Je m'étais dit à partir de là que l'idée tombait à l'eau ; c'est vrai quoi, j'étais même pas au courant qu'elle avait une jumelle. Elysia. Ouais, vous avez compris, maintenant je suis fiancé à Elysia et c'est vraiment pas un cadeau du ciel, elle est toujours à côté de ses pompes cette malheureuse. Qu'on m'achève, ou...non... qu'on l'achève elle !