"CHAP. 1"
Aujourd'hui, t'as perdu Thalya. la famille entière l'a perdu. Tu n'as que douze ans, mais tu commence à comprendre ce qu'est la vie. On nait, on meurt un jour ou l'autre, quelque soit notre âge. Tu sais que tes proches mourront, seulement t'avais pas prévu que ça se passe si tôt. Douze ans, tu croyais vivre encore longtemps avant de contempler le bois ciré d'un cercueil et des joues creusés par les larmes. Rictus désespéré, mâchoire serrées, pleurs incontrôlés. La dureté de la vie vient tout juste de te gifler la face. Tu t'étais interrogé sur pleins de trucs, de sentiments, mais tu n'avais pas vu arriver la mort et sa faux. Certes ta sœur n'allait pas bien depuis des mois, la leucémie qu'on t'avais dit, un mot compliqué parmi tant d'autre. Maintenant, tu comprenais. La leucémie, c'était mal, c'était dangereux, on en mourait. Des personnes crèvent tous les jours et ta petite sœur était une des victimes. C'était dégueulasse, elle n'avait rien fait de mal, à quiconque. Si, elle avait peut-être menti, mais si elle devait en payer le prix, alors tu serais déjà six pieds sous terre. Finalement, ce n'était pas si compréhensible que ça en avait l'air.
(...)
On ne voit presque plus Emrys à la maison, du moins c'est le sentiment que tu ressens lorsque tu le vois. Tu as l'impression que ça fait des jours que tu ne l'as pas croisé. T'en as parlé à Priape et il pense pareil. ton grand frère voit bien que ça te chagrine de le voir s'en aller peu à peu. Déjà Thalya, maintenant Emrys. On ne dirait pas comme ça, mais ça te ronge le coeur. Tu vois ta famille se décomposer et ce n'est pas ce que tu veux. Tu es encore jeune, tu as besoin d'eux pour mûrir correctement, tu as besoin de piliers et de ciment. C'est pour cette raison que tu aime désespérément ta famille, que tu veux la voir réunie comme au bon vieux temps. Ton papa tenant Emrys par l'épaule, ta maman avec Thalya dans ses bras et Priape et toi devant eux. Cela aurait fait une photographie de famille parfaite, tu l'aurais gardé sous ton oreiller en cachette. Mais Thalya n'était plus là et Emrys manquait souvent à l'appel. La possibilité d'acquérir une telle photo se réduisait à peau de chagrin. Pourtant, tu ne désespérais pas. Emrys allait s'en remettre un jour ou l'autre. Tu croyais que la mort de ta petite sœur l'avait brisé et que c'est la cause de ses absences. Aussi, une fois ses blessures refermer, il reviendra et vous jouerez tous les trois sous le soleil ardent d'Athènes. Pour l'instant, il fallait le laisser à lui-même et attendre son retour à la maison.
(...)
Emrys part. Tu as frémis en entendant la nouvelle ce midi. La journée s'était pourtant bien passée. Ton plus grand frère était à la maison depuis plusieurs heures et ça te faisait plaisir de le voir assis à la même table que tout le reste de la famille. Tu n'avais pas arrêté de parler et de débiter des blagues débiles pour détendre Emrys. Ce dernier n'était pas très loquace. Tu avais vu son regard s'assombrir plus d'une fois et tu te demandais d'où venait ses soucis. Depuis le temps, il avait du accepter la mort de ta soeur. Quelque chose d'autre lui posait-il problème ? Mais quoi ? Qu'est-ce qui pourrait bien ternir son humeur ? Nous étions tous réunis, un moment heureux que tu n'oublieras pas, un dernier repas avec Emrys à Athènes. Plein d'enthousiasme, tu cache ta tristesse de le quitter. Tu veux juste qu'il garde un bon souvenir d'Athènes. Harvard c'est loin et le billet d'avion coûte une fortune, il ne reviendra pas de sitôt. «
J'ai une nouvelle les enfants. » Ton père a prit la parole, ce qui accentue ta curiosité. que va-t-il encore dire ? Que Priape part aussi en fin de compte ? «
Nous allons vivre à Atlanta, aux Etats-Unis. » Tu pose tes couverts. Les Etats-Unis ?! Whaaaa ! L'Amérique, le rêve américain, les Riders, ça te saute aux yeux. Atlanta... tu te demande déjà comment c'est là-bas. Tu as toujours rêvé de voyager au fin fond du monde, maintenant tes songes deviennent réalité. Et puis, on seras prêt d'Emrys. tu vois Priape froncer les sourcils, ça n'a pas l'air de le botter. C'est sûr que la Grèce te manquera, mais tu pourras y revenir un jour. Pour l'instant, tu essaye de profiter de l'instant présent, de l'excitation d'emménager dans cet immense pays.
"CHAP. 2"
Atlanta c'est super, comme tu l'avais espéré. Au bout d'une semaine, la mer d'un bleu azure et les cases à la chaux blanche t'ont manqué, mais ici tu ne t'ennuies jamais! C'est comme si les attractions n'en finissaient pas. Il y a toujours un truc à faire, à visiter, à expérimenter. Maintenant, avec l'école, tu n'as plus de temps à t'accorder. Combien de jours n'as-tu pas ouvert de livres pour ton propre plaisir, combien de minutes es-tu resté sur ton matelas, à méditer ? Le temps passe et tu es entrainé par le dynamisme de la ville et celui de tes amis. Au début, t'as eu peur de ta nouvelle classe. Comme partout, on se fait rapidement des potes, mais toi t'avais cet accent grec si particulier et tu craignais les moqueries et le rejet total à ce sujet. Pourtant, on est venu vers toi, on t'a tendu nombres de mains. Les rires et les moqueries ont fusé, mais tes nouvelles rencontres les a soufflé du plat de la main. «
By the way denys, faut que j'te présente ma soeur jumelle, Giulia. » Tu regardas ton pote, le sourire au coin des lèvres. A peine tu arrivais qu'on te présentait à la gente féminine, c'était excitant tout ça. Une brune aux yeux noisettes se retourna en entendant son prénom. Elle était belle. Elle avait du sang italien dans les veine, pour sûr, et elle ressemblait à son frère comme un pois chiche avec son voisin. T'étais sous le charme, directement. «
Salut. denys c'est ça ? Antonio m'a beaucoup parlé de toi. » Elle n'avait pas la langue dans sa poche, un truc qui l'embellissait encore plus. De jour en jour, tu lui trouvais des qualités. De jour en jour, tu tombais amoureux de la belle aux yeux noisettes.
(...)
Tu sentais que quelque chose n'allait pas. Depuis Athènes, tu avais soupçonné qu'Emrys n'était pas celui qu'il prétendait être. Il cachait un truc, c'était certain maintenant. Au début, tu te disais que ce n'était que la phase post-mortem de ta petite soeur, Thalya. Mais à mesure que les années passaient, tu voyais son humeur se détériorer, son sourire partir dans une brise. Ça ne pouvait plus être une question de deuil. Chaque fois que ton frère ainé revenait à la maison, sa joie paraissait disparaitre. Qu'est-ce qui pouvait bien l'influencer ? Un mauvaise souvenirs ? Des secrets que lui seul avait à faire face ? Tout le monde a des secrets de famille. Et s'il en avait un avec papa ou maman, ou les deux ? Tu voulais savoir, parce que tu ne supportais pas de le voir aussi distant et froid à la maison. Tu étais déterminé. Finalement, tu as découvert quelque chose. Le regard d'Emrys sur papa. Un regard noir, aussi vif que celui d'un aigle en quête d'une proie. Ce regard était-il la réponse à ta question ? Que c'était-il passé entre eux ? Un truc grave en tout cas parce que tu avais la mauvaise impression que cela ne datait pas d'il y a seulement quatre ans. Ça t'énervais de ne pas avoir la réponse, alors tu es allé demandé à Emrys, face à face. «
Emrys, je peux te parler ? » Il avait hoché la tête, surpris par la gravité de ta voix. «
Emrys... qu'est-ce qu'il se passe entre toi et papa ? » La question à ne pas poser. T'as eu ta réponse, mais dans un tremblement de colère. Il t'a chassé de sa chambre. Tu savais tout et tu te demandas si tu n'avais pas mieux fait de rester ignorant. Savoir que ton père avait une quelconque emprise sur Emrys te mettait mal à l'aise. Ton désir d'une famille unie tombait à l'eau.
(...)
«
T'es pas sérieuse là ? J'espère que t'es pas sérieuse... » Tu bouillonnais de rage. Elle et... un autre mec. Sérieux, elle s'était complètement foutu de ta gueule. Tu n'avais été qu'un petit couillon pour elle, une petite excuse pour qu'elle aille de planter un mec plus vieux en cachette. D'habitude, tu ne jurais pas, mais là... putain la salope. Tu lui avais tout offert, tu avais été super attentionné envers elle, t'avais fais l'amour avec elle pour la première fois, tu l'avais aimé merde et voilà ce qu'elle te rendait. «
Denys, j'suis désolée, j'suis super désolée. Je sais... que tu pourras jamais me pardonner, mais m'envoie pas balader. On peut rester pote ? » Ça c'était la cerise sur le gâteau. «
Non, on peut pas Giulia. On peut pas parce que je t'aimais toi, seulement toi, mais maintenant tu me dégoûtes. » C'est assez directe, mais c'est ce que tu ressens et comme tu fais pas l'hypocrite comme tout le monde, tu le lui dis. Tu l'aimais, c'est fini à présent, à cause d'elle. Toi, tu l'aime toujours. En plus de te trahir, elle t'oblige à nier ton affection pour elle. Jamais t'aurais pensé que casser pourrait faire si mal, jamais t'aurais penser casser tout cours d'ailleurs. «
J'veux plus te voir Giulia, sinon tu vas encore me briser et j'pense que j'ai assez souffert. »
"CHAP. 3"
Harvard. Tu suis les traces de tes grands frères. Emrys, Priape. Ils sont dans la même école que toi maintenant. Tu doute si c'est une bonne ou mauvaise situation. Priape ne sait toujours pas qu'il se trame quelque chose entre Emrys et ton père. Tu aimerai tant le lui révéler, lui dire qu'Em a toujours été là pour la famille, mais tu dois rester silencieux, car c'est ce que l'ainé t'a ordonné de faire. Rester silencieux, jusqu'à ce qu'il règle ou pas ses affaires avec Priape. Oh tu vas obéir, sinon tu sais qu'Em ne te pardonnera jamais et puis tu ne sais pas tout de l'histoire. Autant se taire et laisser les grands se réconcilier à leur manière. Pour l'instant, tu planifies quelque chose d'autre, comme par exemple finir ton devoir sur la psycholinguistique ou bien aller t'assoir à la table de la cafétéria, celle occupée par une belle jeune fille que tu ne connais pas encore. «
Salut, ça te dérange si je m'assied là ? il n'y a pas d'autre place. » Un sourire, un regard circulaire autour des tables vides, un autre sourire malicieux. «
J'en vois plein des tables vides moi. » Te dit-elle sur un ton taquin. «
Oui, mais je ne pourrais pas contempler tes beaux yeux de si loin. »
(...)
J'étais tranquillement installé à mon bureau lorsqu'on toqua à la porte de la chambre. Je grommelais et me tirais malgré moi de mes révisions pour aller ouvrir à l'inconnu. Ca ne pouvait pas être urgent sinon j'aurais reçu un sms depuis bien des minutes. Je n'avais qu'à prétexter quelque chose pour continuer à travailler une des matières les plus importantes en psychologie. J'ouvris avec une moue gênée et... je me retrouvai face à face à Priape. Oui ? Il voulait voir Emrys. Oook... je ne savais pas si je devais m'y réjouir ou en pleurer d'avance. Je levais donc un sourcil en signe d'interrogation. que valait cette visite pressée de mon frère pour l'ainé ? «
Il est allé faire du sport, pourquoi ? » Je n'eus cependant pas de réponses, car à peine arrivé, priape me demanda de la suivre, enfin demander est un grand mot, plutôt ordonner. Ca aiguisait certainement encore plus ma curiosité, mais ça m'éveillait aussi un doute. Qu'espérait priape recevoir d'Emrys ? Toutes ces questions chahutaient mon esprit et je ne pus que suivre mon grand frère. «
Ok, j'arrive. » Ca ne servait à rien de le questionner, car Priape avait l'air déterminé à ne pas cracher le morceau et surtout à voir Emrys au plus vite. Je montai dans sa voiture, une vieille caisse, mais qui rendait de précieux services. Je continuai de le regarder et il ne voulait pas en démordre. Bon, ok, là je commençais à m'inquiéter. Que planifiait-il ? On descendit de la voiture et on entra dans le complexe sportif, là où s'étreignait des corps à la fatigue, d'où la sueur perlait à flot sur les fronts. J'en profitais pour mater certains abdominaux, mais mon regard fut rapidement sapé par le retour à la réalité. Emrys était en face de nous «
Salut Em'. » Et... il me regardait avec méfiance du genre "t'aurais pas tout balancé petit frère". Je fronçais les sourcils. Attend... attend... Priape ne savait rien. «
Je sais tout Emrys. Denys m’a tout raconté. » J'ouvris la bouche de stupeur, mais aucun son n'y sortit. Putain, il était sérieux Priape ? Même si je rêvais de rallier mes frères comme au bon temps, Emrys m'avait donné sa confiance et moi je lui avais donné ma parole. Une fois celle-ci trahi, je savais qu'il ne me le pardonnerai jamais, c'est pour ça que j'avais tenu ma langue. Voire mon grand frère et moi séparer par la médisance, c'était horrible à concevoir. Pourtant, le mal était fait. Autant voir Emrys et Priape se réconcilier pour de bon et essayer par la suite de me faire pardonner. Je baissais la tête. «
Je... j'suis désolé emrys. » En bon comédien, je signai mon arrêt de mort... trêve de plaisanterie. Priape et Emrys ont intérêt à se botter le cul pour mettre les choses à plat. j'en avais marre de faire partie d'une fratrie qui tombait en ruine.
(...)
Emrys,
je suis désolée de ne pas être là, devant toi, pour te dire ce que j'ai sur le coeur. Je pense que j'ai pas le courage de te dire au revoir, je ne peux pas non plus partir sans te l'avoir dit, alors voilà je l'écris. C'est beaucoup plus simple. Je ne sais pas quand est-ce que je rentrerai à Harvard ou à Atlanta. J'ai décidé de partir, loin d'ici, de ces plages colorées, de ce soleil rayonnant, de ce soit-disant paradis. J'espère que tu t'amuseras d'ailleurs, que tu retrouveras un brin de liberté pendant ces vacances. Moi aussi, je m'en vais me reposer. Ici n'est pas le lieu qu'il me faut. J'ai besoin de respirer, de réfléchir à mon avenir, à la signification de la vie. J'ai besoin de comprendre pourquoi je suis là. C'est un peu égoïste, je sais, mais j'en ai besoin parce que sinon je frôle le nervous breakdown. Tout va de travers, mes amis, mes sentiments envers quelqu'un... Je m'en vais faire de l'aide humanitaire en Afrique. Je pense que ça me remettra les idées en place.
A bientôt frérot,
Denys.
PS : si tu pourrais prévenir Priape s'il te plait ? On s'est pas quitté dans les meilleurs termes. Une partie de moi lui en veut encore, inconsciemment, mais je sais qu'il ne voulait pas me blesser. Dis-lui que je l'aime aussi très fort.