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Bizutage. Tout le monde a ce mot à la bouche. Et ça se voit que c’est le moment. Moi-même je dois faire mes preuves pour entrer dans la « Cabot House » mais je dois dire que les filles ont l’air sympa et elles n’ont pas l’air du genre à faire des défis foireux comme cela se passe – apparemment – dans d’autres maisons. J’ai eu le droit à quelques surprises de la part d’autres personnes de sororité différentes, mais rien de méchant et j’en suis soulagée. Evidemment, je n’avais en aucun cas parlé de tout cela à mes parents. Ils me pensaient calmement en cours ou au travail, à être la petite fille rangée qu’ils aiment tant. Je préfère qu’ils aient cette image de moi car la vérité les rendrait dingue. Ça ajouté à la bombe du début d’année, ils viendraient me chercher personnellement pour me ramener à Cleveland. Ce qui était hors de questions. Trop de souvenirs là-bas. Des bons comme des mauvais, mais les derniers que j’avais, je voulais les effacer et retourner là-bas les ferait revenir et être encore plus douloureux qu’ils ne le sont déjà. Passons. L’automne pointait le bout de son nez et j’avais du sortir un manteau pour ne pas tomber malade, ce matin. Emmitouflée, je me sentais largement mieux. Une fois partie de mon appartement, je m’engouffrais dans la longue avenue qui débouchait sur l’université d’Harvard. Rien de très pratique que de ne pas vivre sur le lieu de mes études, mais d’ici peu, je comptais aller dans le dortoir des Cabot. Plus simple, plus pratique, plus rassurant. Bien que je ne savais pas si mes horaires de travail pourraient convenir au couvre feu de la maison. Je verrais bien, après tout.
Marchant tranquillement, mes pas m’amenèrent rapidement jusqu’au Memorial Hall, lequel j’entrais rapidement. Il ne faisait pas bien plus chaud là-dedans, mais je m’en contenterais pour le moment. Une foule d’étudiants s’y pressait déjà. Je ne connaissais personne, mais ça n’avait pas d’importance. De plus, je n’étais pas du matin, alors c’était mieux ainsi. Me faisant un peu bousculer, comme tout le monde ici, la cohue se dissipa un peu et me laissa accéder aux couloirs. Cela pourrait paraître surprenant, mais je n’étais pas venue pour aller en cours, mais plutôt pour aller travailler sur une dissertation de philosophie. Après deux heures de travail, une pause s’imposait et tous les étudiants l’avaient en même temps. Sortant de la salle de travail, les couloirs se trouvaient – à l’inverse de d’habitude – bien déserts. Sûrement étais-ce du au soleil qui avait pointé son nez dehors. Marchant tranquillement, un peu rêveuse, mon regard se porta sur un garçon qui venait vers moi. Et là … Ce fut le choc le plus total. Je devais bel et bien hallucinée. Il ne pouvait pas être ici, en face de moi, dans cette faculté. C’était un cauchemar.
MADISSON – « Austin … » murmurais-je pour moi-même, ayant du mal avec cette réalité tout ce qu’il y a de plus affreuse.
Mon regard croisa le sien et je vis qu’il était tout aussi surpris que moi de cette rencontre. Si j’avais pu, j’aurais fait en sorte de ne jamais le revoir. Sa douleur qu’il a fait naître en moi s’intensifie rien qu’en plongeant mes yeux dans les siens. C’était une horreur de le revoir. Je ne pensais pas que ça ferait si mal, mais la preuve est là : les blessures infligées en amour ne se referment jamais. Elles restent, subsistes et reviennent encore plus forte. Mais je ne devais pas me laisser démonter. Vraiment pas. Et puis, j’avais pu être courageuse jusqu’à maintenant, alors je continuerais sur cette voie-ci. De plus, je voulais intégrer une maison de filles fortes, charmeuses et déterminées. Mon côté fleur bleu devait partir et ne plus revenir. Il n’avait plus le droit de me manipuler comme lorsque l’on était jeune. Je ferais en sorte que ça n’arrive plus jamais.
Soupirant en rompant le contact visuel, je repris ma marche, droit devant moi. Arrivée à sa hauteur, je ne lui adressais pas un seul regard. Pourquoi, alors que lui m’avait lâché comme la pire des merdes, sans se retourner ? Ce serait trop facile de retomber dans ses bras. Il n’avait jamais eu envie de me reparler et même si c’était le cas, il ne l’avait jamais montré. Alors nous nous ignorions, tout bonnement. Je ne pourrais plus lui faire confiance comme avant, même pas en amitié. Il pourrait toujours courir pour se faire pardonner. Le dépassant, je ressentais autant de fierté à pouvoir être plus forte que lui que de tristesse de l’avoir perdu autrefois. Il m’avait manqué à un tel point. Pas forcément en temps que petit ami, mais surtout en temps qu’ami, que compagnon de conneries, que mon double avec qui j’étais inséparable. Mais le mal est fait, et c’est lui qui en assumera les conséquences désormais. J’avais trop souffert pour que ce soit encore à mon tour de vouloir que les choses changent et s’arrangent.
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