Samedi 4 mai. Soir.

Retour silencieux. Ambiance pourtant bruyante autour de l'être. Après de longues heures de vol, mon corps s'était échoué au Nephilim. Ange de retour à Boston. Ange déjà fourré dans le monde nocturne d'autrefois. Autrefois... C'était exagéré sans le moindre doute. Ça ne faisait pas si longtemps. J'avais même l'impression que ça ne faisait guère assez longtemps. Cependant, les événements à Belfast m'avaient poussé à revenir ici dans l'espoir de ne pas me retrouver tout seul dans un coin. J'avais besoin d'un entourage à mes côtés pour m'empêcher de glisser le long de la pente si entraînante. Cette pente sur laquelle je m'aventurais comme un idiot. En quittant l'aéroport, mes pas m'avaient guidé jusque là. Jusque dans ce monde nocturne qui avait tant été le mien. Et, incapable de résister au bruit de la musique, je m'étais faufilé dans le bar-boîte de nuit. Perché sur un tabouret, mon sac de voyage était posé à mes pieds. Ange qui n'avait nulle part où aller. Ange qui allait sans doute finir sa nuit à l'hôtel. Mon attention se portait sur le barman lorsqu'il s'approchait de moi. J'étais prêt à demander de l'eau ou un simple jus de fruit. Cependant, un verre était déposé devant moi sans même que je ne demande quoi que ce soit. L'être se tendait aussitôt. Le barman disparaissait. Je ramenais mes doigts vers moi venant coincer mes mains entre mes cuisses. Mes prunelles claires fixaient le verre posé devant moi. Tentation de l'extrême. Tout l'était ici de toute manière. L'alcool, la drogue, le sexe... Tout était présent en ces lieux pour me tenter. Tout pouvait me faire basculer. Pourtant, la volonté était là. Celle de ne pas céder. Celle de ne pas basculer de nouveau. Déglutissant difficilement, je ne bougeais pas pour autant. Je restais comme une statue figée face au verre alcoolisé qui se trouvait devant moi.

Cœur affolé. Corps immobile. L'alcool était à proximité de moi. Bien trop proche. Bien trop réel. C'était la première fois depuis un mois que je me retrouvais aussi poussé à céder à la tentation. Ça me figeait. L'envie cognait. Je la sentais dans mon être. Un verre ne pouvait pas faire de mal... Connerie. Bien sûr que si. Un verre revenait à rompre la cure. Un verre me pousserait à replonger parce que moi je ne savais pas m'arrêter. Alors, mains coincées entre mes cuisses, je ne cédais pas à l'appel de la substance tentatrice. J'aurai dû ramasser mon sac et quitter les lieux sans attendre. Mais, je ne parvenais pas à m'éloigner. Ange bien trop figé. Ange en attente d'une issue qui viendrait le secourir. Une issue qui portait peut-être le nom de Livio lorsque la connaissance des alcooliques anonymes se pointait à mes côtés. Je ne réagissais pas à sa voix. Je restais fixé sur ce verre qui ressemblait à un chant de sirène. Ce ne fut que lorsque Livio s'installait à mes côtés que mes prunelles bougeaient. Elles se posaient sur lui. Et, lentement, le cerveau se reconnectait à la réalité. Les mots du jeune homme étaient enfin perçus et je m'empressais de murmurer « Je... Je... Je ne peux pas boire ça... » Un bref regard était lancé sur le liquide alcoolisé avant que je ne ferme les yeux comme pour oublier cette tentation qui se trouvait si proche de moi. Il me suffisait de bouger légèrement. Il me suffisait de tendre les doigts pour me saisir du verre. F*ck it. C'était une mauvaise idée de venir là. Je bougeais lentement tirant de ma poche la pièce indiquant mon succès : sobre et clean depuis un mois. Je posais la pièce sur le comptoir la faisant glisser vers Livio pour toute explication à mon incapacité à boire le verre qui était là. Ce verre qui continuait à m'appeler malgré mes yeux clos.