Our evil friday, the fourteenth ft [Cleo] (14.10)

Ji-hun avait entendu parler du labyrinthe de l’effroi aménagé tout au long du mois d'octobre, et il n’en avait pas fallu plus pour titiller sa curiosité. Cette année, le nord-coréen s’était décidé à vivre pleinement les coutumes et traditions de ce continent qui l’avait accueilli. Dans son pays natal, pas de Saint Valentin le quatorze février, pas de fête nationale le quatre juillet, ni de Thanksgiving le quatrième jeudi de novembre, et encore moins de Noël. Halloween, le trente-et-un octobre non plus. L’occasion était trop belle pour la manquer. Ce fut ainsi qu’il profita de ne plus travailler de nuit pour se rendre aux portes de l’aventure dans laquelle les âmes les plus sensibles devaient s’abstenir d’y mettre un pied ; c’était ce qui était conseillé sur un écriteau.

Mais rien n’était plus amusant que d’ajouter son grain de sel dans l’histoire. Persuadé – peut-être à tort – de ne pas être si facilement effrayé par ce genre d’histoires – parce qu’il en avait vu d’autres, bien plus macabres et réelles au cours de sa vie –, Ji-hun enfila une vieille blouse de chimie ensanglantée ; il y avait ajouté les traces de faux-sang. Pour le biochimiste qu’il était, ça n’avait pas été difficile de trouver du thiocyanate de potassium et du chlorure de fer qui, mélangés ensemble, donnaient ce beau rouge hémoglobine. Il sortit de son sac le masque de Jason Voorhees et un gros couteau en plastique trouvés dans un magasin de déguisement. On était vendredi quatorze, mais tout de même ; il n’y connaissait rien en film d’horreur, de toute façon.

Bagage de nouveau sur le dos, il commença à s’avancer – et à s’égarer – entre les divers murs. La nuit avait pris la place du jour depuis un moment, et une musique affolante résonnait dans toutes les allées. Les cris des personnes coincées dans le labyrinthe étaient bien plus angoissants que la possibilité même de croiser une âme damnée. Soudain, il entendit des pas fouler le gravier non loin de l’endroit où il se trouvait. La personne s’éloignait, il prit la décision de la suivre. Doucement. Lentement. Jusqu’à se rapprocher de cette silhouette, mètre après mètre. Bientôt ce ne fut plus que l’équivalent de quelques centimètres et l’asiatique – affublé de son déguisement – osa poser une main ferme sur l’épaule de sa « victime ».

#rplibre

Cleo voulait voir ce qui avait été réservée pour ce halloween, trop curieuse pour ne pas y aller, trop bout-en-train pour rester tranquillement dans sa chambre. Robe noire avec détails en broderie anglaise, rouge à lèvre rouge sang, longs ongles peints d'une couleur assortie, on ne pouvait pas vraiment dire qu'elle s'était foulée pour un déguisement d"Halloween mais elle s'en fichait un peu. Rajoutant une cape noire à l'intérieur en velours rouge, elle avançait d'un pas décidé vers ce labyrinthe duquel s'élevait déjà quelques voix apeurées. Mais ce n'était pas son genre de frissonner pour ce genre de choses, elle était plus forte que ça... enfin c'est surtout ce qu'elle croyait, jusqu'au jour où elle avait frappé un malheureux inconnu dans la rue, qui avait osé la rattraper pour lui rendre son portefeuille. Elle devait se montrer plus méfiante ce soir, et ne pas surréagir, pour ne pas briser un nez ou une arcade.
Le dédale de couloir gravillonné produisait un drôle de bruit sous le poids de ses pieds, alourdis de talons presque vertigineux, à plateforme. Et elle ignorait réellement où elle allait à vrai dire, ni depuis combien de temps elle divaguait ainsi. Mais elle le faisait, doucement et progressivement, à la recherche d'une quelconque issue. Et ce n'était sans compter cette main se posant sur son épaule, la faisant sursauter et accélérer les battements de son coeur. Elle se retournait brusquement au passage, attrapant le poignet de l'inconnu pour le retirer vivement de son épaule. "Bordel, faut pas faire peur comme ça ! J'aurais pu vous frapper !!" Et ce n'était pas un mensonge dans son cas, elle s'était d'ailleurs retenu de lancer un quelconque geste ampli de peur.

@Ji-hun Hwang

Victime à portée de vue, elle fut bientôt à portée de main. Vêtu de son costume macabre, Ji-hun avança à pas de loups vers la silhouette qu’il avait prise pour cible et leva une main jusqu’à plaquer fermement cette dernière sur son épaule. Palme qui faillit perdre son poignet, puisqu’aussitôt posée, la jeune femme l’agrippa de toutes ses forces pour se défaire de l’imposteur. Le nord-coréen eut le réflexe de protéger ses organes vitaux en braquant un membre devant, histoire de ne pas faire éclater, dans un geste maladroit, le seul rein fragile qui lui restait. Heureusement, sa victime ne réagit pas aussi brutalement que supposé. Il put détendre son bras, et rire face à l’alerte qu’avait provoqué son coup bas ; c’était amusant, Halloween, finalement !

Si ta tête tu avais vu, s’exclama-t-il dans un langage bien plus familier que celui utilisé par sa vis-à-vis. Il baissa l’arme et, de la main qu’il avait réussi à récupérer, souleva son masque de Jason pour dévoiler son identité. En natation chez les Crimson tu es, non, demanda-t-il confirmation. Bien qu’ils formaient une équipe, la swimming and diving team d’Harvard s’entraînait individuellement pour atteindre chacun leur propre objectif. Le coach les convoquait aux mêmes horaires, mais ils n’étaient ni plus ni moins des sportifs qui passaient à tour de rôle. Ils pouvaient ainsi mettre de côté les formalités, et le « vous ». Il observa le déguisement et inspira entre ses lèvres, sceptique. En sorcière tu es, posa-t-il. Mais elle semblait avoir oublié son balai.

Alors peut-être en vampire ? Rappelons-le, il n’avait que très peu visionné de films d’horreur – de films tout court d’ailleurs. Il attendait encore que vienne s’ajouter dans sa liste de contacts un(e) féru(e) des séries télévisées.

@Cleo Salazar

Une réaction rapide, mais contenue, face à la surprise causée par l’inconnu. Sans plus attendre, il éclate de rire et Cleo reste stoïque face à lui, et sa réaction. Et pourtant, malgré son déguisement, la voix qui lui parvient ne lui est pas inconnue, ni même sa façon de parler, notée d’un accent qu’elle devine coréen et pourtant qu’elle a assez peu entendu. Son visage s’illumine cependant à la vue du garçon, qui retire son masque. “Oui, Jin-hun c’est ça ?” Évidemment, la natation, mais vu qu’elle courait généralement un peu partout pour respecter son emploi du temps très chargé, elle n’avait jamais pris vraiment le temps de discuter avec lui. Je hochais la tête. “Sorcière low cost, avec les fonds de placard !” Elle marque une pause et détaille sa tenue. “Je vois que tu as fait des recherches pour ton déguisement !” Même s’ils n’avaient jamais trop parlé, elle savait que la culture américaine lui était bien inconnue, et le monde des films d’horreur est vaste, qui plus est. “Par contre, la prochaine fois, évite de faire peur comme ça, même si c’est le jeu… Des gens peuvent réagir plus brutalement. ” Et elle en faisait partie.

Ji-hun acquiesça de la tête lorsqu’elle prononça son prénom, et dans un accent aussi parfait qu’une native qui le surprit. Quelques secondes s’écoulèrent avant qu’il ne fasse la remarque sur son déguisement. Oh… pour les sorcières aussi, durs peuvent être les temps, plissa-t-il les paupières, plaisantin, plutôt réussi, je le trouve. Il aimait beaucoup sa robe, raffinée avec des broderies qu’il n’avait vu qu’ici, plus particulièrement sur de la lingerie. Moi, s’exclama-t-il avant de rire et secouer la tête, dans le premier rayon je suis resté, pour trouver tout ça. Petit mixte général d’un masque et d’une fausse arme meurtrière. La blouse, tachée elle était, alors encore plus j’ai ajouté , avoua-t-il ne pas en avoir eu pour grand-chose, du coup. Pourtant, ça semblait avoir fonctionné sur elle.

Plus brutalement, demanda-t-il avant de laisser aller son regard un peu partout, à la recherche d’une idée sur la question, donner un coup, tu veux dire ? Est-ce qu’elle avait assez de réflexes pour envoyer un pied bien placé ? Un service militaire, tu as fait, questionna-t-il sa vis-à-vis. Il ne savait pas comment ça se passait aux États-Unis, mais chez lui, les femmes servaient aussi l’armée durant de nombreuses années. Mais ils n’ont pas le temps de converser plus longtemps qu'un monstre enveloppé de morceaux de draps blancs apparaît au bout de l'allée, à une cinquantaine de mètres derrière la jeune femme. Ne pas se faire attrapés, le but du jeu c'est, pas vrai, demanda-t-il confirmation en voyant les pas de la momie, plus vraie que nature, accélérer dans leur direction.

@Cleo Salazar

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'Labyrinthe effrayant' :

Cleo ne s’attendait pas vraiment à croiser son coéquipier des Crimson’s ici, mais ça lui faisait tout de même plaisir. “Très même, et je ne te parle même pas des galères pour trouver les ingrédients nécessaires aux potions magiques ! Les griffes de dragon ça coûte une fortune !” Elle éclate de rire. Elle inventait au fur et à mesure, mais ça la faisait rire. Elle s’arrête et lui sourit. “Tu as bien fait ! De toute façon une blouse propre, ça n’existe pas !” En tout cas, il avait la fibre du film d’horreur en lui, c’était sûr pour quelqu’un qui avait choisi “au petit bonheur la chance”.

Ji-hun semblait surpris et Cleo hoche la tête. “Exactement, donner un coup, par peur !” Je secouais un tête à sa question, c’est vrai que ce n’est pas le cas pour tout le monde mais aux Etats-Unis, le service militaire n’existait plus. “Je fais de la boxe depuis un an et demi !” Ceci devrait répondre à sa question, de fait. Mais quasiment aussitôt, le regard de l’homme se tournait vers le couloir derrière elle, et elle jetait un regard furtif par-dessus son épaule. “Oui ! Donc cours !!!” cria-t-elle en coréen. Elle lui saisit le poignet au passage et l'entraîne à sa suite, heureuse d’avoir mis ses Doc Martens plutôt que des chaussures à talons, pour faire preuve d’endurance.

Le poul qui bat à cent à l’heure, elle s’arrête après plusieurs détours, les mains sur les genoux. “Tu penses que c’est bon ?” murmure-t-elle.

Cleo avoua ne pas avoir effectué un quelconque service militaire, mais qu’elle pratiquait la boxe depuis un moment, ce qui lui avait permis d’acquérir des réflexes qu’on ne pouvait soupçonner. C’était drôle, parce qu’ils n’avaient jamais pu parler assez pour se rendre compte des petites similitudes qui auraient pu les rapprocher. En-dehors de la natation, le nord-coréen se renforçait physiquement par du cardio en extérieur et en salle, et pratiquait également le combat pour faire grimper en flèche son esprit de compétiteur. Même si c’était sa première année parmi les Crimson, il avait eu de quoi prouver sa valeur sportive dans son pays natal, et cette activité de contact l’avait beaucoup aidé à monter les marches des divers podiums.

Ils ne purent toutefois aller plus loin dans la conversation, puisqu’une momie apparut soudainement dans l’allée, à quelques centaines de mètres derrière la jeune femme. Il l’interpella, pour lui signaler, ce qui sonna l’alarme et le départ vers une course folle. Agrippé par le poignet, Ji-hun se laissa trainer par sa comparse, amusé par la situation plus qu’apeuré. Il en vint même à rire durant leur fuite ; parce qu’elle était tout de même plus amusante que celle qu’il avait connu précédemment. Ils firent des détours à un bon rythme jusqu’à ce que la demoiselle ne vienne à la conclusion qu’ils en avaient assez fait. Le palpitant tambourinait dans le torse du brun qui, lui-même, se soulevait en réponse à l’exercice. Trop cool, c’était, s’exclama-t-il.

Il posa son dos contre le mur et éclata de rire, sans vraiment pouvoir se retenir, perçant les cris des autres voyageurs que l’on entendait plus loin. Dis-moi que … les chemins qu’on a pris, tu as repéré , demanda-t-il à la nageuse. Ça pourrait leur éviter de repasser par les mêmes endroits – ou se rendre compte plus rapidement qu’ils s’étaient paumés. On recommence, proposa-t-il à sa vis-à-vis de se remettre en marche ; quitte à rencontrer d’autres créatures tout droit sorties de films d’horreur.

@Cleo Salazar