CALEB LEFEBVRE ► matthew healy

t’es né au Québec en 1996, dans un petit village d’à peine 1000 habitants. ton père québécois et ta mère ontarienne ont aussi eu ta soeur, presque deux ans plus tard. tu peux pas dire que t’as eu une enfance difficile, mais ton paternel était l’homme de plusieurs femmes, te forgeant une pensée qu’il était normal de le voir une fois aux quelques mois. disons que t’as connu assez tôt l’amour toxique, le narcissisme, puisque même si ta mère a très bien pris soin de toi, les visites de ton père n'étaient que parce que cette dernière cédait par ennuis et fausses promesses. t’as compris des choses probablement un peu trop jeune, ce qui a sans doute alimenté ton indifférence à l’idée d’être en couple, un besoin naturel que tu sens effacé de ta personne.  

t’as commencé à jouer très tôt au hockey, malgré que t’étais loin d’avoir le gabarit qui ferait de toi un futur joueur professionnel; tu savais tout de même te démarquer par ta vitesse. après huit bonnes années à jouer, c’est là que la vie a décidé de t’offrir un traumatisme qui te hantera toujours. t’avais seize ans, t’étais avec quelques amis sur la patinoire d’un village à côté, plusieurs bières en votre possession grâce à celui qui était majeur. pendant un certain temps, t’as eu de la difficulté à vraiment te rappeler comment ce seul mouvement de patin à tuer ton ami d’enfance. vous aviez tous pris quelques bières, pas question de jouer avec de l’équipement, c’était juste pour profiter de quelques lancers, donc patins et bâtons étaient seulement utilisés. tu te souviens à peine de t’être rendu auprès de tes deux amis qui se ravageaient de coups de poings maladroits causés par leur état d’ivresse. t’as réussi à les séparer l’instant d’une seconde avant de te ramasser à plat ventre. un autre coup de poing, t’as donné un coup sur ton pied pour te relever et t’as senti une pression derrière ton patin. un des deux venait de tomber directement sur ta lame de patin, et en reculant ton pied, c’est le cou de ce dernier qui a reçu ton essaie à te relever. tu te souviens de la mare de sang qui s’est accumulée en l’espace de quelques secondes, de tes mains qui essayaient de couvrir tant bien que mal l’ouverture à son cou; les ambulanciers ne sont pas arrivés à temps. la tragédie de vivre dans un village éloigné et d’être jeune et insouciant à ce genre de danger.

passer par une enquête pour avoir tué quelqu’un accidentellement, son ami en plus, c’est suffisant pour te détruire mentalement à long terme. tu n’as pas eu la moindre charge criminelle à la fin de toute cette histoire, c’est plutôt ton ami majeur qui a été inculpé pour négligence par rapport à l’alcool. ça n’a tout de même jamais empêché à ton âme de se sentir coupable. bien évidemment, malgré que tout ait été accidentel, tu n’as jamais remis les pieds sur la glace. t’as été traité comme le jeune tueur du village alcoolique, c’est là aussi que t’as dû graduellement apprendre à arrêter d’écouter l’opinion des gens, car souvent ils se basent sur leur propre vécu pour juger. ta soeur se faisait intimider par rapport à ton erreur, ta mère a presque sombré dans une dépression par peur que ton futur soit brisé. tu t’es ramassé en psychiatrie après avoir abusé d’amphétamines; t’essayais de performer à l’école -tdah diagnostiqué trop tard-, tu dormais plus et t’as connu ce qu’est une psychose. tu te sentais totalement aliéner des autres, t’avais des idées un peu trop spirituelles, t’étais totalement déconnecté, t’en es même venu à te blesser avec des lames par impression que tu ne ressentais plus la douleur. t’as fini par prendre une médication pour ton trouble d’attention et t’as cessé la drogue de rue. ton choix de partir quelques semaines avant tes dix-neuf ans a été encouragé par ces événements. malgré que tu sois parti à Boston, tu retournes à chaque année pour les fêtes auprès de ta famille.


ça t’a pris un bon moment avant de trouver ta place quand t’as décidé de faire le grand pas. t’as travaillé deux ans pour un marché à un salaire minable, à te faire des copines pour quelques jours pour finalement t'en lasser à chaque fois, et puis t’as commencé à vingt-deux ans à te tatouer. t’avais pas l’argent pour t’en payer, mais t’as toujours aimé dessiner et t’as traversé une phase dissociative, t’avais un besoin de nouveau avant de sombrer, ça t’as pris peu de temps pour t’équiper. t’as enfin eu droit à un miracle, c’est ce que t’en penses du moins, quand un client du supermarché t’a approché pour te demander qui t’avais tatoué. c’était un propriétaire dans le domaine, la semaine suivante t’es devenu un apprenti/observateur pour quelques mois, le temps que tu sois en règle avec tous les cours nécessaires.  ça fera bientôt trois ans que t’es officiellement tatoueur.

ton père est décédé à a fin de l’année 2021, problèmes cardiaques. depuis ton départ du Canada, il a souvent essayé de reprendre contact, mais t’en as jamais ressenti le besoin. c’était lui l’homme malheureux qui n’a pas été là pour te voir grandir, c’est pourquoi ton deuil fut très éphémère. t'es probablement un peu plus renfermé sur toi-même depuis, mais t'es un bon ami du déni.