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Insane Get along with the voices inside of my head. You're tryin' to save me, stop holdin' your breath. And you think I'm crazy, yeah, you think I'm crazy. Well, that's nothin'. |
Fascinent objet d’étude que le genre humain, n’est-il pas ? Enfin, "fascinent" … . Quand on sait un peu les atrocités qu’est capable de commettre ce mammifère vertébré, tant sur ses congénères que sur les autres espèces du monde animal et végétal ; l’emploi de guillemets – de la taille d’un sous-continent – et de précautions oratoires, semble dès lors tout indiqué. Les perplexes, bonnes âmes convaincues et autres incorrigibles philanthropes de tout poil, n’auront qu’à ouvrir un de ces vieux grimoires poussiéreux, répondant plus communément au nom de manuel d’Histoire. Un simple survol de ces épais volumes, aux allures de compilation des horreurs, suffirait pour leur offrir un petit aperçu du florilège non-exhaustif, des abominations dont se sont rendus coupables celles et ceux les ayant précédé au cours des âges. Et ainsi leur permettre de quelque peu réviser leur jugement, ou revenir de leurs illusions.
Nonobstant, rendons à César ce qui est à César. L’Homme avec un H majuscule, demeure quoi qu’on en dise … une source de surprises et d’étonnements sans cesse renouvelée. Mescluns de complexité à lui tout seul. Enrobé de contradictions. Tout le jour ; et son contraire le soir. Une déroutante curiosité, qu’il faudrait sans nul doute inventer, si d’aventure "le Grand Patron" avait eu la flemme d’aller au turbin le septième jour. Après tout le Dimanche c’est … oui, le jour du mariage – et pas qu’à Bamako - certes. Non, c’est également le jour du repos. Comme quoi la condition humaine ; cela tient quand même à peu de chose. Si le barbu - fort du devoir accompli les six jours précédents – s’était accordé un peu de relâche, et aurait brandi le majeur pour faire un fuck à la face du monde, en beuglant "Allez tous vous faire mettre !" : nous ne serions pas là aujourd’hui. A méditer. A bon entendeur, salut !
Intéressant … . Intéressant de constater que le paria semble – pour Dieu sait quelle tortueuse raison - perdre subitement toute vague notion du "ne fais pas à autrui, ce que tu n’aimerais pas qu’on te fît". Credo lui étant pourtant cher, et qu’il s’escrime à mettre en application chaque jour que Dieu fait – encore et toujours lui, c’t’espèce de vantard omnipotent, qui se la pète et excelle en toute chose. Compassion, pitié, sympathie. Trois sentiments que le freluquet a longtemps abhorrés inspirer auprès des autres. Remercions pour cela Papa et ses préceptes éducatifs antédiluviens – euphémisme pour débiles. Des absurdités archaïques qui ont bien failli métamorphoser le bénéficiaire, en bloc de granite socialement inadapté. Est-ce trop tard ? Le mal est-il fait ? Allez savoir … . Néanmoins, un rapide constat permet de mettre en évidence la relative inefficience du … programme de désintoxication et de la reprogrammation caractérielle auxquels il s’astreint depuis quelques années.
La géhenne est toujours là. Se manifestant extérieurement, par un refus catégorique de tout ce qui peut venir d’un tiers. Sérieux ou anodin. D’un peu d’argent gentiment prêté – et qui serait pourtant souvent bien appréciable pour sortir de l’ornière – à un modeste café offert aimablement et spontanément. Refus découlant lui-même, d’une sainte horreur de se retrouver en dette et redevable envers quelqu’un. Accepter, c’est avouer sa faiblesse. Accepter, c’est déjà mettre un genou à terre. D’aberrants leitmotivs serinés, rabâchés, matraqués et aujourd’hui encore gravés au fer rouge dans son esprit. Conclusion : qu’ils le veuillent ou non, les parents finissent tôt ou tard par bousiller leurs enfants d’une manière ou d’une autre. Alors … pourquoi ? Pourquoi le lionceau revêche inflige-t-il à la jolie môme, ce qu’il verrait comme le dernier cercle de l’Enfer de Dante ? Ni nombriliste autocentré, ni personnification de l’altruisme ; le fils à maman se serait en temps normal excusé, avec probablement un peu d’insistance et d’excès de zèle, avant de s’en retourner à ses travaux sportifs forcés. Se pourrait-il que … . Non, impossible. Pas déjà. Et pourtant … . Un rire cristallin enfantin, des mains graciles levées pour habiller une réaction un rien ingénue et quelques mots prononcés plus tard ... le grenat rythmique emprisonné dans la poitrine du galérien s’amollit.
"Nos vieux auraient tout pour s’entendre, alors ! J’imagine à quel point cela doit être gonflant. De toujours être ramené, voire comparé, à quelqu’un d’autre. Alors que tu voudrais sans doute que les gens te voient toi avant tout. Celle que tu es. Simplement Charlize.", rétorque-t-il d’une voix de basse et sur un ton guilleret, devenant de plus en plus navré, à mesure que le propos arrive à sa fin. Même acabit pour le sourire. D’abord franc et massif ; puis pincé et contrit.
Gêné d’avoir potentiellement et malencontreusement réveillé le désarroi de l’homonyme de la célèbre actrice ; un élan de nervosité irrigue les veines du besogneux oiseau de nuit. Un élan dont le trop-plein rejaillit et se manifeste, par un frottement hâtif des narines à l’aide du dos des phalanges. La langue échaudée par une nouvelle lichette de caféine brûlante. Comme une autoflagellation pour se châtier d’avoir manqué de tact et de finesse. Ainsi qu’un grossier subterfuge, visant à grimer l’embarras avant qu’il ne devienne – une fois de plus – ostensible. Une entreprise qui se voit couronnée de succès, grâce au concours de la présentation de sa modeste personne – aussi informelle que placée sous le signe de l’autodérision. Petit trait d’esprit, qui n’est pas sans susciter chez la badaude, une risette mêlant amusement et indulgence. "Hmm", ânonne inintelligiblement l’Astrophysicien en herbe. Version minimaliste et baragouinée d’un "c’est pas faux". Les orbes d’onyx perdus un instant dans le bleu des cieux, pour prendre en considération le point de vue de la damoiselle. Avant de replonger dans les étangs chocolatés, lui servant d’yeux. Le chef dodelinant d’une épaule à l’autre pour illustrer son accord. Tandis que ses pulpeuses s’animent en un sourire presque mièvre. Sourire qui se fige tel un vieux fond de sauce et décrépit, sitôt que la poupée mélancolique vient puiser un complément d’information, par le biais d’une nouvelle question.
"Aucune idée, j’n’y ai jamais mis les pieds. J’suis né et ai toujours vécu ici à Boston. Peut-être comme toi, d’ailleurs ? Même si … j’crois deviner une légère et subtile pointe d’accent Yankee dans ta voix.", déclare-t-il en décrivant un haussement de ses trapèzes menus, mêlant impuissance et ignorance. Le timbre davantage sourd et rauque. Le corps tendu comme un arc. Avant qu’un retour à la normale ne s’opère, sitôt que la discussion s’oriente sur un autre sujet.
Gorge nouée et déglutition âcre. La bouille ocrée qui blêmit et tire sur l’olivâtre. Poings fermés et malmenant l’étoffe grise du short moite. Les molaires serrées et crispant les traits d’un visage, devenant aussi expressif qu’un masque mortuaire. Autant de flagrants signaux non-verbaux, qui liés à cette habile tentative pour noyer le poisson et s’esquiver, laissent à penser que l’interrogatrice amène le binational à l’orée d’un terrain mouvant. "Comment c’est là-bas ?". Une question que s’est maintes fois risqué à poser le gamin aux racines délitées. Et à laquelle maman et papa ont toujours répondu de manière élusive, sommaire et expéditive. Avant de vite refermer ce chapitre en le priant de terminer ses devoirs ou d’aller jouer dans sa chambre. Déjà haut comme trois pommes, Darko avait compris que ce sujet sensible remuait et bouleversait profondément ses géniteurs. Causer de la peine à maman, voir ses grands yeux d’ébène s’embuer de tristesse et son visage se déchirer de douleur … inconcevable. Non, pas ça ! Tout, mais pas ça. Alors après moult tentatives infructueuses, le dernier né de la famille exilée s’est résigné et fait l’idée de ne pas savoir. Préférant ignorer que de faire souffrir les siens. Ignorer d’où il vient. Rien d’étonnant donc à ce qu’aujourd’hui encore, le lunatique ne saurait dire où il va. Voilà ce que l’on gagne à grandir de guingois … . Un moment de flottement, un tantinet pesant, tend à s’ancrer. Ne goûtant guère ce malaise bourgeonnant - et aspirant à ramener cette exquise atmosphère puérile qui planait sur eux - l’orthorexique à la dégaine d’homme-enfant ne trouve rien de mieux, que de proposer à son interlocutrice une pérégrination en tandem. Deuxième entorse à sa devise en moins de dix minutes - record battu sans conteste. De quoi rajouter une strate de gêne, à ce marigot de confusion. Et pourtant … . C’est avec un entrain non dissimulé – le surprenant au premier chef – que la belle honore affirmativement la prosaïque requête. Oui. Trois petites lettres qui suffisent pour faire éclore sur les babines du manant, un extatique sourire de gosse à qui l’on promet le bout du monde. La bobine opine pour sceller l’accord. Heureux que cette plaisante et inattendue parenthèse joue les prolongations, le méridional renfile sa peau de gentleman à la manque, en réalisant quelques enjambées latérales afin de libérer le passage. Tandis que la cheffe des opérations lui donne quelques informations au sujet de leur destination.
"Moi aussi. J’en déduis que t’es sans doute étudiante, non ?", demande-t-il en tournant la tête vers la donzelle. Les yeux pétillant et un sourire un peu bébête – probablement dû à la joie niaise que lui inspire cette similitude – peint sur les charnues. L’étonnement se joignant à une nouvelle goulée de décaféiné. L’amertume lui coûtant un rictus grimaçant ... ne le mettant pas spécialement à son avantage.
Etonnant. De n’avoir encore jamais croisé cette languide sylphide sur le campus auparavant. D’un autre côté, Harvard est vaste. Pour peu que la douce étudie les Sciences Humaines, ou les Arts, et qu’elle ne soit donc pas amenée à fréquenter les bâtiments alloués aux Sciences dites Dures … l’étonnant devient tout de suite beaucoup plus logique. Pas prestement emboîté, le kosovar calque sa foulée sur celle imprimée par l’initiatrice de la marche. Deux silhouettes défiant l’écrasant soleil de midi, et foulant côte à côte le bitume. Un no man’s land creusé par leurs gabarits légèrement contrastés, se tenant de part et d’autre du trottoir. Deux corps affrontant les affables gifles infligées par la brise aoûtienne. Cils tressés, l’homme au quart de siècle se délecte de ce petit soupir d’Éole, plus que bienvenu. L’abdomen se gonflant sous l’œuvre d’une profonde inspiration. Les secondes s’effeuillent, les minutes se dérident.
Un assourdissant silence plombe l’itinéraire parcouru en binôme. Seul le martellement cadencé de leurs pas, battant la mesure sur l’asphalte, enjolive la vacuité sonore. Des miaulements de félins vagabonds, squattant les poubelles s’entassant dans les ruelles, éclatent ici et là. Quelques hectomètres avalés, et la quiétude des rives placides du fleuve n’est bientôt plus qu’un lointain souvenir. Asphyxié sous les gaz d’échappement, d’un trafic automobile gagnant en densité. Le décor mue inexorablement. Petites boutiques coquettes et bien achalandées, cèdent leur place à des enseignes ayant périclité et mis la clef sous la porte depuis belle lurette. Les habitations douillettes et chaleureuses, se changent en barres d’immeuble aux façades crasseuses et partant en capilotade. Impression de déjà vu. Et de trop bien connu.
"Hmm, j’suis un peu perdu là. Rappelle-moi lequel de nous deux raccompagne l’autre déjà ?", demande-t-il d’une voix gutturale, appuyant plus qu’il ne faut l’intonation interrogative. Preuve attestant d’une amplification du stress, zigzagant tel un reptile le long de son épine dorsale. Le chef pivotant sur la droite, et les prunelles enchâssées sur la tempe de sa compagne de route. Un ténu reniflement, guère distingué, suivi d’un laconique éclat de rire empestant la nervosité, pour ponctuer la brève prise de parole.
Manière détournée pour le jouvenceau de confesser à la frêle riveraine, qu’il ne connaît que trop bien ces quartiers aux parfums de bas-fond. Car ce ne sont autres que les siens. Ceux où il crèche. Les seuls voulant bien de lui, financièrement parlant. De quoi démystifier et casser la plausible image méliorative, que sa conscrite s’est peut-être déjà hasardée à se faire de lui. Pour quelqu’un qui aspirait à paraître sous son meilleur jour … c’est un fiasco sonnant et un désastre trébuchant ! Pourtant, rien n’obligeait Darko à se torpiller et se saborder de la sorte. Il aurait été aisé de garder cela pour soi. Certes. Seulement … mentir, cacher ou taire à cette plantureuse brune la vérité, semble être une gageure au-dessus de ses forces. Dernier basculement de la tête en arrière, pour engloutir le fond – désormais froid – de café. La dextre qui broie le contenant en plastique, avant de le jeter dans le première poubelle égayant leur chemin. En équilibre précaire dans le rebut dégueulant de détritus. Bien conscient que le terminus, et l’évaporation de ce morceau d’éden volé se profilent à l’horizon. Le palpitant gros et lourd de tristesse, devant cette nouvelle similitude que l’enfant des fanges aurait préféré ne pas partager avec Charlize. Et qui explique soudain bien des choses, quant à ce spleen et ce vague à l’âme qui la suivent comme son ombre.
Nonobstant, rendons à César ce qui est à César. L’Homme avec un H majuscule, demeure quoi qu’on en dise … une source de surprises et d’étonnements sans cesse renouvelée. Mescluns de complexité à lui tout seul. Enrobé de contradictions. Tout le jour ; et son contraire le soir. Une déroutante curiosité, qu’il faudrait sans nul doute inventer, si d’aventure "le Grand Patron" avait eu la flemme d’aller au turbin le septième jour. Après tout le Dimanche c’est … oui, le jour du mariage – et pas qu’à Bamako - certes. Non, c’est également le jour du repos. Comme quoi la condition humaine ; cela tient quand même à peu de chose. Si le barbu - fort du devoir accompli les six jours précédents – s’était accordé un peu de relâche, et aurait brandi le majeur pour faire un fuck à la face du monde, en beuglant "Allez tous vous faire mettre !" : nous ne serions pas là aujourd’hui. A méditer. A bon entendeur, salut !
Intéressant … . Intéressant de constater que le paria semble – pour Dieu sait quelle tortueuse raison - perdre subitement toute vague notion du "ne fais pas à autrui, ce que tu n’aimerais pas qu’on te fît". Credo lui étant pourtant cher, et qu’il s’escrime à mettre en application chaque jour que Dieu fait – encore et toujours lui, c’t’espèce de vantard omnipotent, qui se la pète et excelle en toute chose. Compassion, pitié, sympathie. Trois sentiments que le freluquet a longtemps abhorrés inspirer auprès des autres. Remercions pour cela Papa et ses préceptes éducatifs antédiluviens – euphémisme pour débiles. Des absurdités archaïques qui ont bien failli métamorphoser le bénéficiaire, en bloc de granite socialement inadapté. Est-ce trop tard ? Le mal est-il fait ? Allez savoir … . Néanmoins, un rapide constat permet de mettre en évidence la relative inefficience du … programme de désintoxication et de la reprogrammation caractérielle auxquels il s’astreint depuis quelques années.
La géhenne est toujours là. Se manifestant extérieurement, par un refus catégorique de tout ce qui peut venir d’un tiers. Sérieux ou anodin. D’un peu d’argent gentiment prêté – et qui serait pourtant souvent bien appréciable pour sortir de l’ornière – à un modeste café offert aimablement et spontanément. Refus découlant lui-même, d’une sainte horreur de se retrouver en dette et redevable envers quelqu’un. Accepter, c’est avouer sa faiblesse. Accepter, c’est déjà mettre un genou à terre. D’aberrants leitmotivs serinés, rabâchés, matraqués et aujourd’hui encore gravés au fer rouge dans son esprit. Conclusion : qu’ils le veuillent ou non, les parents finissent tôt ou tard par bousiller leurs enfants d’une manière ou d’une autre. Alors … pourquoi ? Pourquoi le lionceau revêche inflige-t-il à la jolie môme, ce qu’il verrait comme le dernier cercle de l’Enfer de Dante ? Ni nombriliste autocentré, ni personnification de l’altruisme ; le fils à maman se serait en temps normal excusé, avec probablement un peu d’insistance et d’excès de zèle, avant de s’en retourner à ses travaux sportifs forcés. Se pourrait-il que … . Non, impossible. Pas déjà. Et pourtant … . Un rire cristallin enfantin, des mains graciles levées pour habiller une réaction un rien ingénue et quelques mots prononcés plus tard ... le grenat rythmique emprisonné dans la poitrine du galérien s’amollit.
"Nos vieux auraient tout pour s’entendre, alors ! J’imagine à quel point cela doit être gonflant. De toujours être ramené, voire comparé, à quelqu’un d’autre. Alors que tu voudrais sans doute que les gens te voient toi avant tout. Celle que tu es. Simplement Charlize.", rétorque-t-il d’une voix de basse et sur un ton guilleret, devenant de plus en plus navré, à mesure que le propos arrive à sa fin. Même acabit pour le sourire. D’abord franc et massif ; puis pincé et contrit.
Gêné d’avoir potentiellement et malencontreusement réveillé le désarroi de l’homonyme de la célèbre actrice ; un élan de nervosité irrigue les veines du besogneux oiseau de nuit. Un élan dont le trop-plein rejaillit et se manifeste, par un frottement hâtif des narines à l’aide du dos des phalanges. La langue échaudée par une nouvelle lichette de caféine brûlante. Comme une autoflagellation pour se châtier d’avoir manqué de tact et de finesse. Ainsi qu’un grossier subterfuge, visant à grimer l’embarras avant qu’il ne devienne – une fois de plus – ostensible. Une entreprise qui se voit couronnée de succès, grâce au concours de la présentation de sa modeste personne – aussi informelle que placée sous le signe de l’autodérision. Petit trait d’esprit, qui n’est pas sans susciter chez la badaude, une risette mêlant amusement et indulgence. "Hmm", ânonne inintelligiblement l’Astrophysicien en herbe. Version minimaliste et baragouinée d’un "c’est pas faux". Les orbes d’onyx perdus un instant dans le bleu des cieux, pour prendre en considération le point de vue de la damoiselle. Avant de replonger dans les étangs chocolatés, lui servant d’yeux. Le chef dodelinant d’une épaule à l’autre pour illustrer son accord. Tandis que ses pulpeuses s’animent en un sourire presque mièvre. Sourire qui se fige tel un vieux fond de sauce et décrépit, sitôt que la poupée mélancolique vient puiser un complément d’information, par le biais d’une nouvelle question.
"Aucune idée, j’n’y ai jamais mis les pieds. J’suis né et ai toujours vécu ici à Boston. Peut-être comme toi, d’ailleurs ? Même si … j’crois deviner une légère et subtile pointe d’accent Yankee dans ta voix.", déclare-t-il en décrivant un haussement de ses trapèzes menus, mêlant impuissance et ignorance. Le timbre davantage sourd et rauque. Le corps tendu comme un arc. Avant qu’un retour à la normale ne s’opère, sitôt que la discussion s’oriente sur un autre sujet.
Gorge nouée et déglutition âcre. La bouille ocrée qui blêmit et tire sur l’olivâtre. Poings fermés et malmenant l’étoffe grise du short moite. Les molaires serrées et crispant les traits d’un visage, devenant aussi expressif qu’un masque mortuaire. Autant de flagrants signaux non-verbaux, qui liés à cette habile tentative pour noyer le poisson et s’esquiver, laissent à penser que l’interrogatrice amène le binational à l’orée d’un terrain mouvant. "Comment c’est là-bas ?". Une question que s’est maintes fois risqué à poser le gamin aux racines délitées. Et à laquelle maman et papa ont toujours répondu de manière élusive, sommaire et expéditive. Avant de vite refermer ce chapitre en le priant de terminer ses devoirs ou d’aller jouer dans sa chambre. Déjà haut comme trois pommes, Darko avait compris que ce sujet sensible remuait et bouleversait profondément ses géniteurs. Causer de la peine à maman, voir ses grands yeux d’ébène s’embuer de tristesse et son visage se déchirer de douleur … inconcevable. Non, pas ça ! Tout, mais pas ça. Alors après moult tentatives infructueuses, le dernier né de la famille exilée s’est résigné et fait l’idée de ne pas savoir. Préférant ignorer que de faire souffrir les siens. Ignorer d’où il vient. Rien d’étonnant donc à ce qu’aujourd’hui encore, le lunatique ne saurait dire où il va. Voilà ce que l’on gagne à grandir de guingois … . Un moment de flottement, un tantinet pesant, tend à s’ancrer. Ne goûtant guère ce malaise bourgeonnant - et aspirant à ramener cette exquise atmosphère puérile qui planait sur eux - l’orthorexique à la dégaine d’homme-enfant ne trouve rien de mieux, que de proposer à son interlocutrice une pérégrination en tandem. Deuxième entorse à sa devise en moins de dix minutes - record battu sans conteste. De quoi rajouter une strate de gêne, à ce marigot de confusion. Et pourtant … . C’est avec un entrain non dissimulé – le surprenant au premier chef – que la belle honore affirmativement la prosaïque requête. Oui. Trois petites lettres qui suffisent pour faire éclore sur les babines du manant, un extatique sourire de gosse à qui l’on promet le bout du monde. La bobine opine pour sceller l’accord. Heureux que cette plaisante et inattendue parenthèse joue les prolongations, le méridional renfile sa peau de gentleman à la manque, en réalisant quelques enjambées latérales afin de libérer le passage. Tandis que la cheffe des opérations lui donne quelques informations au sujet de leur destination.
"Moi aussi. J’en déduis que t’es sans doute étudiante, non ?", demande-t-il en tournant la tête vers la donzelle. Les yeux pétillant et un sourire un peu bébête – probablement dû à la joie niaise que lui inspire cette similitude – peint sur les charnues. L’étonnement se joignant à une nouvelle goulée de décaféiné. L’amertume lui coûtant un rictus grimaçant ... ne le mettant pas spécialement à son avantage.
Etonnant. De n’avoir encore jamais croisé cette languide sylphide sur le campus auparavant. D’un autre côté, Harvard est vaste. Pour peu que la douce étudie les Sciences Humaines, ou les Arts, et qu’elle ne soit donc pas amenée à fréquenter les bâtiments alloués aux Sciences dites Dures … l’étonnant devient tout de suite beaucoup plus logique. Pas prestement emboîté, le kosovar calque sa foulée sur celle imprimée par l’initiatrice de la marche. Deux silhouettes défiant l’écrasant soleil de midi, et foulant côte à côte le bitume. Un no man’s land creusé par leurs gabarits légèrement contrastés, se tenant de part et d’autre du trottoir. Deux corps affrontant les affables gifles infligées par la brise aoûtienne. Cils tressés, l’homme au quart de siècle se délecte de ce petit soupir d’Éole, plus que bienvenu. L’abdomen se gonflant sous l’œuvre d’une profonde inspiration. Les secondes s’effeuillent, les minutes se dérident.
Un assourdissant silence plombe l’itinéraire parcouru en binôme. Seul le martellement cadencé de leurs pas, battant la mesure sur l’asphalte, enjolive la vacuité sonore. Des miaulements de félins vagabonds, squattant les poubelles s’entassant dans les ruelles, éclatent ici et là. Quelques hectomètres avalés, et la quiétude des rives placides du fleuve n’est bientôt plus qu’un lointain souvenir. Asphyxié sous les gaz d’échappement, d’un trafic automobile gagnant en densité. Le décor mue inexorablement. Petites boutiques coquettes et bien achalandées, cèdent leur place à des enseignes ayant périclité et mis la clef sous la porte depuis belle lurette. Les habitations douillettes et chaleureuses, se changent en barres d’immeuble aux façades crasseuses et partant en capilotade. Impression de déjà vu. Et de trop bien connu.
"Hmm, j’suis un peu perdu là. Rappelle-moi lequel de nous deux raccompagne l’autre déjà ?", demande-t-il d’une voix gutturale, appuyant plus qu’il ne faut l’intonation interrogative. Preuve attestant d’une amplification du stress, zigzagant tel un reptile le long de son épine dorsale. Le chef pivotant sur la droite, et les prunelles enchâssées sur la tempe de sa compagne de route. Un ténu reniflement, guère distingué, suivi d’un laconique éclat de rire empestant la nervosité, pour ponctuer la brève prise de parole.
Manière détournée pour le jouvenceau de confesser à la frêle riveraine, qu’il ne connaît que trop bien ces quartiers aux parfums de bas-fond. Car ce ne sont autres que les siens. Ceux où il crèche. Les seuls voulant bien de lui, financièrement parlant. De quoi démystifier et casser la plausible image méliorative, que sa conscrite s’est peut-être déjà hasardée à se faire de lui. Pour quelqu’un qui aspirait à paraître sous son meilleur jour … c’est un fiasco sonnant et un désastre trébuchant ! Pourtant, rien n’obligeait Darko à se torpiller et se saborder de la sorte. Il aurait été aisé de garder cela pour soi. Certes. Seulement … mentir, cacher ou taire à cette plantureuse brune la vérité, semble être une gageure au-dessus de ses forces. Dernier basculement de la tête en arrière, pour engloutir le fond – désormais froid – de café. La dextre qui broie le contenant en plastique, avant de le jeter dans le première poubelle égayant leur chemin. En équilibre précaire dans le rebut dégueulant de détritus. Bien conscient que le terminus, et l’évaporation de ce morceau d’éden volé se profilent à l’horizon. Le palpitant gros et lourd de tristesse, devant cette nouvelle similitude que l’enfant des fanges aurait préféré ne pas partager avec Charlize. Et qui explique soudain bien des choses, quant à ce spleen et ce vague à l’âme qui la suivent comme son ombre.
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