Lost in the mood (libre)

Désemparée. C’est le mot. T’es pas fière de toi, Oz. Tu es si déçue de toi-même, de ne pas être aussi forte que tu le pensais. Tu étais persuadée que tu allais t’en sortir après octobre, tu en étais si sûre. Mais tu n’es pas aussi forte que Adhara, pas aussi entourée que Luna. Tu n’avais pas la force des garçons, tu n’étais que la cadette fragile et ayant besoin désespérément d’autrui. Mais tu n’as pas envie de céder. La soif de te relever par toi-même, te laissant couler davantage par la même occasion. Tu as atteint un point de non retour. Tes examens sont définitivement un échec. Pas besoin de se mentir, tu en es consciente. Cette année scolaire s’annonce être ta défaite la plus humiliante. Parce que tu portes tellement d’espoir sur tes épaules, celle de tes parents. Tes parents qui te reconnaissent plus, qui ne peuvent plus te reconnaitre puisque tu évites les contacts telle la peste. Tu ne sais pas vraiment quoi faire. La danse ne te transcende plus, trop pratiqué jusqu’à l’usure dans cette cage qui était la tienne il y a encore deux mois. Tu erres telle une âme écorchée et tu n’as jamais la paix. Même là maintenant dans ton moment préféré de la journée. Café à la main, sur un banc du campus après avoir dansé. Enfin essayé de danser. Ton café c’était ta pause dans tout, dans ta vie. Mais ça ne t’apportait plus la paix d’autrefois. Tu es en détresse, Ozalee. En profonde détresse, tu as besoin d’aide. Tu dois la prendre, cesser de la refuser. Et dans un élan incontrôlable, tu interpelles la première personne qui passe assez près de ton banc. « Excusez-moi ? » Tu te sens bête, si bête. A deux doigts de demander l’heure pour ne pas t’embarrasser encore plus. Mais ce qui te semble être une bêtise continue. « Hm… est-ce que vous… vous avez déjà eu l’impression de ne plus être bon à rien ? que votre place est nulle part ? » Est-ce que tu dois changer quelque chose dans ta vie ? Est-ce que tu dois prendre une grande décision ? C’est tellement enfantin de poser ces questions à un inconnu. Mais c’est ce que tu es, Ozalee. Une gamine.

Anthony est vraiment loin de se douter que dans quelques heures, il va aller à Las Vegas, invité à l'arraché à un mariage. Non, il est juste pas loin du campus où il est juste passé voir les bâtiments, en repérage pour pouvoir dessiner. Il en a besoin pour sa prochaine bande dessinée, enfin, s'il trouve le temps de la terminer, ce serait excellent. Il ne fait que courir partout, à être tout le temps occupé, à ne pas avoir le temps à quoi ce que ce soit. C'est une belle manière de se garder occupé, de ne pas penser au sens de la vie, à sa complexité et surtout à son côté dangereux... Il devrait vite reprendre le travail en plus, mais comme ce sont les vacances de fin d'années, même au sein de son bureau, il n'y a plus personne. Il y a juste lui quasiment... Tony n'est pas ce genre à prendre des vacances tout simplement. Il plonge la moitié de son visage dans l'écharpe, il se fait frapper un peu par le vent glacial, mais ce n'est qu'une question de temps... Jusqu'à que quelqu'un lui parle. Il s'arrête d'un coup, dans sa marche pour se retourner un peu trop vivement vers la personne qui vient de l'interpeller. Une jeune femme, assez jeune qu'il pourrait sans mal deviner qu'elle est une étudiante. "Oui ?" demande-t-il, elle semble avoir besoin d'aide, peut-être lui demander du feu pour la cigarette ? Sauf que Tony ne fume pas mais elle n'a pas l'air de fumer non plus. Il plisse les yeux se demandant ce qu'elle peut bien lui demander, en attendant il la détaille assez rapidement. est-ce que vous… vous avez déjà eu l’impression de ne plus être bon à rien ? que votre place est nulle part ? "Ah. Je ne m'attendais pas à cette question." réplique-t-il assez étonné. Il se met à réfléchir un peu, en levant les yeux au ciel avant de pencher la tête sur le côté. "Mais oui, j'ai déjà eu cette impression, pas qu'une fois... Ce n'était pas du tout agréable que je devais vite trouver des obsessions pour tenir le coup." explique-t-il en se rapprochant du banc. "Tout va bien ?"

Demander des conseils à un inconnu, quelque chose que tu n’aurais jamais pensé faire. Tu es la Oz timide, qui n’ose pas réellement aborder des gens qu’elle ne connait pas. Certainement pas pour leur poser une question existentielle dont ils ont sûrement que peu de chose à faire. Tu es énervée par ton désespoir évident mais il est temps de le laisser s’échapper. Il est temps d’essayer de trouver des réponses. Des mois, des semaines que tu ne sais plus vraiment où tu veux, Ozalee. Depuis ton kidnapping tout est devenu une plaie à vivre, une épreuve à surmonter. Juste le réveil devient compliqué, trouver le sommeil une torture. Tu es en chute libre et tu as besoin qu’on te rattrape. Même si c’est un inconnu. Tu serres ton café dans ta main, incertaine et intimidée par ta propre action. L’homme se retourne brusquement, ça te fait perdre un peu de détermination et pourtant tu ne te démontes pas. T’es têtue quand tu t’y mets. Enchainant par la question honteuse, persuadée qu’il penserait que tu lui ferais perdre son temps. La surprise est évidente de son côté mais étonnamment il te répond. Il te parle très brièvement des obsessions qu’il a dû trouver pour surmonter ce sentiment que tu ressens dans tes tripes en ce moment-même. Ton cœur se gonfle soudainement, tu trouves quelqu’un qui te comprend et qui ne te connait pas, ne peut te juger. Il s’approche de toi, tu lui fais une place sur ton banc s’il veut s’asseoir. Comment tu vas. Bonne question. « Hm… pas trop ? » Tu souffles un gros coup parce que tu ne sais pas comment amener la chose. « Quelque chose m’est arrivée il y a quelques mois… et depuis je suis bonne à rien. Ni dans ce que mes parents veulent que je fasse, ni dans ma passion. » Ta gorge se noue, petite chose fragile. « Je peux pas perdre les deux. Je ne sais déjà pas si je peux perdre un des deux. Mais je ne peux pas abandonner mes parents ni ma passion et je suis incapable de juste me lever du lit. » Tu lui lances un petit sourire, consciente que tu es bien impolie. « Je m’appelle Ozalee. Vous êtes peut-être pressé mais si vous voulez, je peux vous offrir un café. Je dois vous faire perdre votre temps c’est juste que… j’ai besoin de savoir comment on sort de là. » Tu essayais clairement de le prendre innocemment en otage pour qu’il reste, qu’il te guide. Comme une étoile tombée sur ton chemin, comme si les miracles existaient.

L’inquiétude l’envahit naturellement.
Si cette personne lui pose cette question comme ça, c’est que ça ne va pas du tout et qu’il se passe quelque chose dans sa vie, qu’elle se questionne réellement sur sa place dans le monde. Il se permet de s’asseoir à côté d’elle, voyant une sorte d’autorisation de sa part. Dans tous les cas, elle lui répond, que ça ne va pas. Anthony ne dit rien, il la laisse s’exprimer et surtout vider son sac, elle en a l’air d’avoir vraiment gros sur la patate la pauvre jeune femme. Pourtant elle semble avoir toute une vie devant elle pour se torturer l’esprit comme ça. Ozalee, c’est la première fois qu’il entend ce prénom. Elle a vraiment quelque chose de lourd à son coeur, qui la fait paniquer un peu, un peu trop même. « Non ne vous inquiétez pas, je ne suis pas pressé, je venais juste pour dessiner un peu les bâtiments autour. Je suis Anthony.» dit-il avec un sourire amical, qui se veut surtout rassurant et qui cherche à mettre à l’aise la jeune femme qui semble être embêtée de lui faire perdre du temps. Sauf que pour lui, ce n’est pas une perte de temps, pour une discussion à venir. « Je suis désolé pour ce qui vous est arrivé il y a quelques mois, je vois que ça a dû vous ébranler à un point que vous n’arrivez plus à vous lever de votre lit. » Une pause, il bouge un peu et sort la moitié de son visage de l’écharpe. « Mais il ne faut pas laisser cette peur vous paralyser et surtout… Se mettre la pression que vous devriez faire des choses comme avant. On dirait que cela vous a changé. » Il penche la tête sur le côté pour capter son regard, avant de hausser les épaules. « Il vous faut prendre le temps de faire les choses petit à petit et ne pas être trop exigeante envers vous-même. D’abord, la première étape peut sembler stupide mais, elle est importante: lever du lit, s’accorder aux petits plaisirs de la vie, comme boire du café, manger le repas que vous adorez, visiter un musée, aller au cinéma… Il est important de vider la tête en premier dans ces petites obsessions… Avant de pouvoir se focaliser sur votre passion et sur ce que vos parents veulent que vous fassiez. » dit-il comme pour essayer de donner un conseil, en espérant que cela peut aider la jeune femme. Il va tenter de faire quelque chose sur ce coup-là. « Ozalee ? Et si vous m’offriez un café ? » On dirait qu’il a une idée derrière la tête par rapport à ça et il fait un sourire encourageant.