MILES HOHENSTAUFEN ► MATTHEW DADDARIO

BEFORE 2018; all the good guys go to hell

Miles déteste son patronyme, dans son intégralité. Levy-Hohenstaufen, issu d’une alliance franco-allemande, un père allemand et une mère franco-américano-portugaiso-turcano-machino-truc – une pétasse quel qu’il en soit – son nom de famille représente à ses yeux l’arnaque suprême de sa vie. Il n’y a rien de plus dissonant que ‘Levy-Hohenstaufen’ selon lui. Le mélange des cultures ne s’avèrent pas toujours être la meilleure des solutions. « La merde, ils auraient pu m’appeler Pierre-Stewart en prénom pendant qu’ils y étaient. » Encore heureux, ils ne l’ont pas fait. Car, à contrario, son prénom est sa fierté. Il ne manque aucune occasion de rappeler au monde qu’il s’appelle Miles. Prétentieux ? Légèrement. Mais avouez, Miles, c’est un beau prénom, un prénom mélodieux, agréable à l’oreille, doux. Miles Sansnomdefamille, Miles Toutcourt, comme il aime se présenter au monde. Néanmoins, quoi qu’il en dise, son patronyme annonce parfaitement la couleur du personnage porteur du nom. Hohenstaufen. Allemand. Froid, dur. Et.. élégant. Oui, les allemands sont élégants, merci de ne pas contredire. Car Monsieur est la définition même de l’élégance, à l’image de Barney Sitnson ou Harvey Specter, il ne vit que pour être habillé d’un costume à minimum mille dollars la pièce. Miles est coquet ainsi, Miles aime plaire, Miles ne sort jamais décoiffé ou dans un quelque piteux état de son loft bostonien. Miles est charmant, irrésistible. Ce qui explique son tableau de chasse féminin impressionnant. Oubliez Casanova, Miles Hohenstaufen a pris la relève. Les femmes ? Sans vouloir paraître trop prétentieux, bien qu’il le soit sans aucun doute, Miles a arrêté depuis belle lurette de leur courir après. Elles viennent après lui, non l’inverse. L’exception à la règle, car il y a toujours une exception, fut cette traînée de lycéenne blondasse qu’il avait osé aborder sept ans plus tôt. Un an plus tard, elle lui a pondu un gosse. Ou plutôt une gosse. Caprice. Qui, sans aucun doute, portait on ne peut mieux son prénom. Caprice dont il avait la garde aujourd’hui. Miles est un père célibataire, un très bon père, malgré les dires et les rumeurs – des jaloux. Miles représente tout ce que ses parents n’ont jamais représenté à ses yeux : un parent modèle. Un parent modèle possédant une manière bien propre à lui-même d’éduquer cette gamine. Peu importe les manières utilisées, les résultats comptent, et les résultats le disent, Miles est un bon père. Tout comme il est bon élève à Harvard. Tout comme il était un bon dealeur avant Harvard. C’est un fait, Miles Hohenstaufen est bon dans tout ce qu’il entreprend. L’homme parfait ? Il l’aurait été, s’il n’avait pas une aberration inexpliquée envers le sport, sous n’importe quelle forme : télé, radio, sur le terrain, tennis, football, rugby etc. A l’inverse de tout homme normalement constitué, Miles déteste le sport, déteste pratiquer le sport, déteste regarder un match de sport, déteste jouer les supporters d’un match de sport, déteste ceux qui ne détestent pas le sport. Miles est un artiste dans l'âme. Un mec posé, préférant se munir de son pinceau et d'une toile vierge un après-midi libre que de courir après un ballon. Dans la continuité des défauts qui l’empêchent d’obtenir l’award de l’homme parfait, on peut également ajouter ses nombreuses allergies exubérantes et ses phobies monstres qui peuvent faire toute crédibilité à son statut d’homme : parmi elles, la phobie du vomi, la phobie des insectes à quatre pattes – coccinelles y compris, allergie au lactose, aux noisettes, à la glue, à l’odeur de de la glue forte et de l’essence qui lui procure des picotements sur tout le corps, phobie des lapins, allergie aux poils de chiens, chats et hamsters etc. Sans compter ses tics et tocs et manies qui l’empêchent souvent de vivre une vie on ne peut plus normal, si on escompte le fait qu’il ne vit déjà pas une vie normale à la base. Miles est étrange, fascinant pour le monde. Tout comme le caviar et le foie gras sont fascinants à ses yeux. Miles pourrait mourir pour de la bonne nourriture, pas ces cochonneries qu’on prépare négligemment et qu’on vend en grande surface à deux dollars non, la gastronomie –végétarienne - française, il en est fada. Miles déteste les tatouages et piercings. Miles aime fumer de temps en temps des substances illégales. Miles est fan, de Queen, de Velvet Underground, de ACDC, des Jackson Five et de toute la bonne vieille musique des années 70’s, 80’s et 90’s. Comme tout homme intégré à son époque, Miles ne lâche jamais son téléphone. Miles mange de la main gauche, en étant droitier. Miles se balade constamment avec un stabylo dans ses poches et un paquet de Galettes Bretonnes dans sa voiture. Miles est végétarien, et ne carbure qu’aux bagels le matin. Miles est loin d'être l'image de l'artiste peintre incompris, et c'est ce qu'il cherche à tout prix à défendre - les peintres. Miles semble heureux. Miles est heureux. Après tout, il est Miles Hohenstaufen, l'étudiant brillant en droit, en 3e année, futur dirigeant de l'entreprise Hohenstaufen & associés.

AFTER 2019; when the party's over

Haine plus intensifiée envers son patronyme qu'il n'associe qu'à des mensonges dorénavant. A à la longue liste des progénitures Hohenstaufen, au fils bâtard, Blaise, délicatement balayé sous le tapis et aux jumelles, Lola, Nina, expédiées puis retrouvées, messieurs, je voudrais un jumeau. Du moins, enlevons Miles, ironiquement l'unique fils légitime annoncé dès la préambule se révélant être l'unique et réel écart du père. Une histoire de kidnapping, de trafics infantiles, conte peu joyeux ni plaisant mais ô grand divertissant lâchée par cette tante ivre, épouvantable dans ce repas de famille tout aussi méprisable. Haine instantanée. Fureur à peine maîtrisée. A peine sorti du gouffre de santé de Caprice que le voici entraîné dans les conséquences d'une énième fabulation signée Hohenstaufen Sr.  Il le méprisait, le détestait, le haïssait - mais en était toujours dépendant. Miles n'était rien sans son père, sans son nom, ou plutôt Caprice ne serait rien, et c'était tout bonnement impensable d'imaginer son chair et son sang vivre d'amour et d'eau fraîche. Peu importe les dictons, l'argent faisait le bonheur, l'argent ouvrait des portes. Tous ceux qui s'en persuadent le contraire ne sont que pauvres et envieux. Personne ne lui persuaderait du contraire. Miles s'était alors tu, avait rangé sa fureur dans un tiroir, assidu dans son rôle de père qu'il s'est promis d'honorer coûte que coûte pour contrer l'incapable qu'était son "père". Rancœur publiquement rangée mais bien présente en privée. Il traqua sa vraie famille biologique pour répondre à ses propres questions, pour accorder à Caprice une vraie famille digne de ce nom. Parce que tout tourne autour de Caprice. Le petit ange démoniaque déjà si combative pour un si jeune âge. Du bombardement à Boston en janvier 2019 au retour de sa génitrice la même année, faisant de l'ombre à celle qu'elle avait adopté en mère de remplacement, à sa maladie pour finir par l'accident de son père, provoquant une perte de mémoire partielle : Caprice était et serait le rocher qui le clouait au sol, Miles. Le rocher dont il défendrait contre le monde entier pour lui épargner une seule fissure. Ne laissez pas échapper ce secret à Duncan mais sa fille était sa meilleure amie. Toujours dans l'affût de nouveaux épisodes de Peppa Pig à partager avec son père, de vinyles de Queen ou de Jackson Five dans ce store vintage qu'elle fréquentait quotidiennement avec papa; elle était devenue l'ombre de Miles tout comme lui était devenu le sien. Miles a mûri, Miles a grandi, Miles est devenu ce bon père dont il aimait tant à se vanter - pour autant, Miles reste toujours Miles. Et aussi mature qu'il peut être aujourd'hui, aussi vulnérable qu'il a pu être dans le passé, Miles se reconstruit de ces fragments de mémoires retrouvés; et vindicatif, radical, impitoyable, il ne reculera devant rien pour obtenir ses réponses, son indépendance, sa liberté.