(roxane) be honest with yourself

C'est en quittant mon entrainement de cross fit avec Levi que je me rends compte à quel point je suis crevée. Mon corps va pas le supporter bien longtemps. Je baille à en me casser la mâchoire. Mais que voulez-vous ? On a une compétition dans deux semaines, go go. Faut se préparer, mentalement c'est sur mais surtout physiquement. Y'a eu trop de laissez-allers ces derniers temps. Tout comme les cours omg. Je suis en retard. Je dois rendre trois exposés sur les traditions celtes et j'ai encore rien foutu. Je regarde ma montre - oui car en 2020 je suis encore la seule nana sur terre à lire l'heure sur mon poignet - et je me décide à préparer mes affaires pour m'enfermer en bibliothèque et bosser sérieusement. Je sens que je vais accumuler les conneries, les week-ends déconnades et après, ce sera trop tard pour récupérer tout mon retard. Après avoir pris une douche rapide, je me rends jusqu'à la Widener Library et je me faufile entre les bancs et les étages de livres pour me trouver une place. Mes yeux se posent sur une rouquine qui joue avec son stylo à plumes. Roxane Nesbitt. La queen du campus pour certain, la capitaine des chieuses-leaders pour d'autres. Mais pour moi, c'est celle qui m'a pété le piffe la semaine dernière, et la petite-amie de mon ami proche, Dawie. Je sais qu'elle a un sacré tempérament mais ça ne me fait pas peur. Je repense à ce qu'Aidan m'a dit, que sa soeur avait été agressée et malgré toute la pute-attitude qu'elle a envers moi, je peux pas m'empêcher de ressentir une certaine compassion. Je sais pas, entre gonzesses, on se soutient, c'est la solidarité fémine qui parle. " salut roxanne. " je pose mes bouquins en face de son nez et je m'installe sur le tabouret libre. " tu te souviens de moi ? ou... de mon nez ? " petit sourire sur les lèvres, je me montre détendue. Je veux surtout pas raviver la flamme, mettre du feu sur l'huile surtout dans cet endroit si calme, rempli d'étudiants qui veulent bosser.

elle était sortie de l’hôpital depuis peu et.. très honnêtement, elle n’était pas certaine de savoir comment se sentir. tout lui semblait étrangement différent et sa prestance s’était quelques peu assombrit. sûrement parce qu’elle était dans une optique ou elle avait besoin de faire le vide et qu’elle laissait tomber sa cour suprême pour.. disparaître ? ouais, voilà ce qu’elle faisait. disparaître. gaïa allait probablement la tuer pour rater une nouvelle fois un entraînement des cheers mais elle n’était clairement pas en capacité de faire quoi que ce soit et être spectatrice n’était pas le mode de vie qu’elle avait choisit. elle inspire profondément, se concentrant sur le bouquin en face d’elle. curieusement, la bibliothèque n’avait jamais été le genre d’endroit où elle mettait les pieds quand désormais, il était celui qui lui donnait l’impression d’être le plus en sécurité. pourtant, c’est son esprit qui divague encore et encore, incapable de se concentrer sur la moindre chose, les flashs de cette nuit là ne cessant de lui revenir à l’esprit. jusqu’à ce qu’une voix se fasse entendre. relève les yeux et se pincent les lèvres. erin ou quelque chose dans le genre. proche de dawie, meilleure amie d’aidan et donc par conséquent, cible à éliminer. bref coup d’oeil aux alentours, la regarde à nouveau. y a de la place ailleurs largement assez de place pour ne pas s’installer en face d’elle à vrai dire. et elle n'aime pas ça roxane. qu'on empiète sur son espace vital. signe de la main pour la faire déguerpir avant d'pousser un soupir. qu'est-ce que tu veux ? y avait forcément quelque chose. crache le morceau et dégage, non ?

Je suis peut-être du genre collante comme meuf. Je respire trop l'air des autres, ça plait ou ça ne plait pas. Roxane, je savais qu'elle avait une dent contre moi. Pour je ne sais quelle raison d'ailleurs. D'après Aidan, elle peut s'énerver pour un rien et bousculer quelqu'un juste parce qu'il est dans son chemin ou qu'il marche pas assez vite. C'est son tempérament, et j'ai le mien. Je ne viens pas la voir pour chercher vengeance ou qu'elle s'excuse de m'avoir fait un croche-pattes. Mon nez est quand même solide. Juste un peu se sang, gonflé, et après vingt-quatre heures c'était fini. Non, j'viens la voir car je suis une personne hypersensible, touchée par la moindre injustice qui se trame sur terre et quand mon meilleur ami m'a appris que sa sœur avait été agressée, j'ai ressenti un électro-choc. Peut-être qu'elle va me nier la gueule, prendre son bouquin et foutre le camp. Ou peut-être qu'elle va écouter ce que j'ai à lui dire. Je ne fais pas attention à sa remarque, bien au contraire, j'étale mes affaires comme bon me semble. J'attache mes cheveux en un chignon mal coiffé et je pose mes coudes sur la table. Je jette un œil discret autour de nous pour être sure que cette conversation reste confidentielle et je me lance : " j'ai appris... ce qui t'es arrivé... c'est dégueulasse. ces imbéciles devraient avoir honte. " je vais pas te réciter mot pour mot toute l'histoire. Après tout, Aidan m'a pas donné de détails et je suis pas sûre de vouloir les savoir. Je repose mon regard sur Roxane, l'air totalement compatissant. " je veux que tu saches que je suis là si tu veux de l'aide... pour porter plainte par exemple. tu as porté plainte ? " la plupart des victimes de violence ont souvent bien honte d'en parler et hélas, n'osent pas se rendre au commissariat le plus proche pour demander justice. Mais moi, je peux pas laisser passer ça. Je veux aider Roxane, même si elle ne veut pas de mon aide, même si ce ne sont pas mes affaires. Que voulez-vous ? J'aide mon prochain, même mes ennemis.

froide, comme à son habitude. sûrement encore plus fermée que généralement. les récents évènements ayant un impact bien plus sévère que ce qu’elle aurait pu imaginer en premier lieu. l’agacement certain qui transpire de chaque pore de sa peau quand elle se rend compte que la fille en face d’elle déballe ses affaires quitte à les éparpiller partout, visiblement encline à venir déranger le peu de quiétude qu’elle était venue chercher. et elle soupire fortement roxy, ne tente même pas une seule seconde de cacher l’animosité certaine qu’elle pouvait avoir envers les autres. les sourcils qui se froncent, la moue qui devient plus boudeuse, le visage plus pâle quand erin se décide à dire pourquoi est-ce qu’elle était là. dawie ? aidan ? un des deux était forcément responsable et elle se jurait intérieurement d’en étriper au moins un des deux pour avoir été incapable de tenir sa langue. parce que tout ça, c’était pas le genre de truc qu’elle voulait ébruiter. préférait le passer sous silence comme si ça n’avait jamais existé plutôt que passer aux yeux des autres pour une victime quelconque. ouais. pas certaine que la honte soit dans le mode d’emploi de ceux qui avaient pénétrés chez elle mais la rousse incendiaire préférait ne pas relever, convaincue que son silence serait suffisant pour la faire déguerpir. qu’est-ce qui te fais penser que j’ai besoin d’aide ? est-ce qu’elle en avait réclamé ? non. et curieusement, erin était la première personne à suggérer quelque chose de la sorte. comme si sous la froideur constante de la nesbitch, elle avait été capable de déceler un être humain. non, et je ne le ferais pas. parce qu’il était bien connu que la victime était très souvent tournée en bourreau et qu’avec le palmarès de ses actes, personne ne prendrait la peine de chercher à réellement la défendre. prétends juste qu’il n’est rien arrivé, passe à autre chose et j’en ferais de même parce que c’était la seule réelle solution qu’elle avait réellement, pas vrai ?

J'ai jamais rencontré quelqu'un avec un faciès aussi expressif que Roxane. T'es pas obligé de communiquer avec elle verbalement pour savoir que tu l'emmerdes. Mais moi, je m'en fiche. Je me dis que les grimaces qu'elle fait, c'est pour se protéger. Et moi, j'veux casser ses barrières, je veux la secouer comme une prunier. Certains voudraient lui foutre des claques avec son air hautain, moi, je veux juste qu'elle cesse de renvoyer une image fausse d'elle. Certes, je ne la connais pas, mais j'ai l'impression pourtant. La réponse à la quelle je m'attendais tomba. Roxane fuit, Roxane ne veut pas parler de ces choses-là, surement pour éviter de refaire monter de mauvais souvenirs. Mais c'est en combattant la chose avec ses tripes qu'on arrive à avancer. Pas en l'ignorant et en la mettant de côté, car si la peur n'est pas éliminée, elle te suivra, comme ton ombre, et te hantera toute ta vie. " pourquoi ? " j'ose lui demander. Si ce n'est pas la honte, c'est autre chose. Mais quoi ? Je cligne plusieurs fois des yeux puis je soupire. " parce que tu passes réellement à autre chose ? " je laisse un petit moment de silence puis je reprends, en haussant les épaules. " alors dis-moi ce que roxane nesbitt fait à la bibliothèque ? j'y vais tous les jours depuis trois ans et jamais je n'ai encore vu tes fesses assises à une des tables. " j'ai l’œil, je suis très observatrice. Pour côtoyer pas mal de cheerleaders, je sais qu'elles ont entrainement à cette heure de la journée. Je crois que je viens de marquer un point. Mais cela ne veut pas dire que Roxane baisse les armes pour autant. Je sais que lui tenir tête, c'est déjà compliqué, alors lui tirer les vers du nez, c'est presque perdu d'avance. Sauf que la petite Erin, elle est agaçante certes, mais elle peut se montrer convaincante quand elle veut.

passer à autre chose, oublier. prétendre que tout allait bien et que cette fameuse nuit n’avait jamais existé. c’était comme ça qu’elle choisissait de régler les choses, de passer au dessus de ce qui était trop compliqué. et elle se foutait bien de ce que l’on pourrait en penser. c’était pas son problème, elle avait le droit de gérer les choses comme elle le souhaitait sans que personne n’ait d’avis à donner dessus. parce que. depuis quand avait-elle besoin de se justifier ? à partir du moment que c’était son choix, il devait être respecté. point final. et elle n’allait clairement pas discuter de ça. qu’est-ce que tu veux erin ? passe totalement la question sous silence. du grand roxane, ne jamais répondre quand elle n’en a pas envie. peu importe si elle passait à autre chose ou pas. c’était à elle de décider comment est-ce que ça se passerait.  replonge ses yeux sur son livre, profite du silence qui ne dure pas assez longtemps. putain ce qu’elle pouvait être agaçante. la rousse, elle fait claquer le livre face à elle, relève les yeux sur la fille en face d’elle. qu’est-ce que ça peut te faire ? p’tain, c’était incroyable d’agir de cette façon. à croire que le lieux lui était interdit. j’avais du retard dans un devoir, je suis venue ici, point. elle hausse les épaules, inspire longuement pour garder son calme. je vais parfaitement bien tiens toi en à cette version. parce que roxy, c’est pas le genre de personne qui aime se faire plaindre. elle a pas envie qu’on s’attarde sur elle, pas envie d’être faible.

Je peux comprendre que mon comportement trop intrusif peu l'agacer. Après tout, je suis pas son amie, elle et moi, on se connait ni d'Eve, ni d'Adam. Je sais juste que c'est la copine et la sœur de mes meilleurs potes. Dawie ne me parle pas beaucoup d'elle, préfère garder sa vie privée, mais par contre Aidan, il ne me fait que parler d'elle et forcément, tôt ou tard, à force d'entendre son prénom, je me sens un peu concernée par la chose. J'ai mal au coeur de la voir réagir sur la défensive, alors que je peux voir aux fond de ses yeux qu'elle souffre, la Roxane. " okay, je te casse les pieds, je sais très bien. t'as pas envie qu'une meuf dont tu t'en fiches de son existence vienne empiéter sur ta vie privée. " histoire qu'on soit claire là dessus toutes les deux. " mais je tiens à mes amis, à Aidan, à Dawie... et dans un sens, je tiens aussi à toi, car t'es importante pour eux. " c'est vrai. S'il t'arrive quelque chose, ça joue sur la santé mentale de mes amis et forcément, ça me touche par la même occasion. " parfois, l'aide d'un inconnu vaut mieux que l'aide d'un ami. " que je dis calmement, en soufflant. Car... si je me trompe pas, t'as pas beaucoup d'amis Roxane. Je veux dire, oui, tu es entourée de plein de monde car t'es un peu la reine du Campus, mais de réels amis à qui tu peux te confier, vu de l'extérieur, j'ai l'impression que ça court pas les rues.

ça lui apporterait quoi ? rien. oh tu sais, les faiblesses elle les a laissés une fois transparaître, à glasgow. et c'était sûrement le truc lui ayant le moins rendu service au monde. parce qu'on avait cherché à l'évincer et que les choses, well, avaient bien trop dégénérées. raison pour laquelle elle se trouvait désormais aux états-unis. plutôt mourir que réaffronter ça une nouvelle fois. c'était trop d'émotions, trop de problèmes à gérer et roxy, elle avait plus le temps. t'as tout compris un peu plus et elle l'aurait pu applaudir l'intelligence soudaine dont erin avait fait preuve. roxane était détestable, c'était un fait. pourquoi est-ce que les gens s'entêtaient à vouloir voir autre chose que ça ? elle avait pas envie d'être aimée, ni perdre du temps avec les gens. n'importe quoi roule des yeux devant l'aberration. comment pourrait-elle tenir ne serait-ce qu'un peu à la rousse quand celle-ci lui avait pété le nez juste sous prétexte d'avoir été dans un mauvais jour ? inspire, expire. calme. relève les prunelles noisettes sur la fille, l'air sceptique. j'sais pas si t'es franchement bizarre ou juste maso la tête qui s'penche un peu sur le côté, l'air à la réflexion. ouais, non, clairement, elle avait du mal à comprendre.

D'habitude,  je suis facilement convaincante avec les gens. Mais Roxane n'est pas n'importe quel gens. C'est un réel casse-tête chinois pour moi, et c'est ça qui me donne encore plus envie de la connaitre, de l'aider, même si elle veut pisser sur ma générosité et mon empathie. J'ai été élevée comme ça, et je peux pas rester les bras croisés en voyant mes amis souffrir. Surtout Aidan, lui qui ne dit rien, lui qui ne montre rien sauf sa bite. J'ai bien vu qu'il était totalement déchiré en évoquant l'agression de sa sœur. Je baisse le regard, réfléchit un instant. Je cherche encore une dernière carte à jouer pour convaincre Roxane que je suis pas contre elle, mais avec elle. " sans doute un peu des deux. " j'esquisse un petit sourire en coin mais je savais déjà qu'il n'aurait pas d'effet sur elle. Roxane et son poker face qui ne montre rien. A croire que y'a pas de battant qui palpite dans sa cage thoracique. " je suis pas venue pour refoutre le couteau dans la plaie, t'faire sentir mal, honteuse, ou quoi que ce soit... et si c'est le cas, je suis désolée. " je me mords la joue. A vouloir être trop spontanée, on finit par être maladroit en empiétant dans l'espace de l'autre. Je rassemble mes livres de cours pour lui montrer que je vais m'en aller puis je soupire. " tu t'en foutras surement mais... si un jour t'a besoin de parler à quelqu'un, je suis là. " j'ai une pointe au cœur. Je dis ces mots comme si au fond, c'est moi qui avait envie de me confier, et c'est moi qui avait subi ce qu'elle a subi.

c’était pas tous les jours qu’elle tombait sur des énergumènes comme erin. généralement, personne n’avait le courage de venir empiéter sur son espace personnel. là, en plus de lui faire du rentre dedans elle semblait décidée à ne pas lâcher prise. elle pouvait au moins lui attribuer ça, la persévérance. je vois ça. parce que pour continuer à gratter auprès d’une personne qui lui avait volontairement cassé le nez, fallait quand même en vouloir. et c’était sûrement pour cette raison que roxy elle avait pas franchement d’amis. incapable de bien se comporter avec les autres, toujours trop froide, toujours trop en retrait. il était parfois plus que difficile d’échanger ne serait-ce que quelques mots avec elle. non, non. j’comprends juste pas. parce que dans un esprit aussi étriquée que le sien, elle n’arrivait pas à saisir à quel moment est-ce qu’on avait envie de lui venir en aide. ça semblait bien trop tiré par les cheveux pour être réel et comme trop souvent, la reine des abeilles préférait rester sur ses gardes. les yeux noisettes qui la regarde débarrasser ses livres. elle aurait dû être soulagée, pas vrai ? d’avoir enfin ce qu’elle voulait, de la voir partir. alors pourquoi ce n’était pas le cas ? qu’est-ce que t’y gagnes à me parler au juste ? c’était quoi au final ? un pari ? la bonne action de l’année ? elle était exécrable roxane et le savait, y avait juste pas de logique actuellement.